Rue Louis-Turban, Rennes (Ille-et-Vilaine)

Légende :

Nom de rue rennaise à la mémoire de Louis Turban, résistant du réseau d'action Overcloud, employé à la SNCF mort en déportation le 10 mai 1944.

Genre : Image

Type : Nom de rue

Producteur : Joris Brouard

Source : © Cliché Joris Brouard Droits réservés

Détails techniques :

Photographie numérique en couleur

Date document : 13 juillet 2018

Lieu : France - Bretagne - Ille-et-Vilaine - Rennes

Ajouter au bloc-notes

Contexte historique

Louis TURBAN est né le 25 juillet 1901 à Villennes-sur-Seine (Seine-et-Oise, Yvelines), fils de Jacques, Louis, Marie TURBAN et de Marie, Alexandrine LABIA. Après avoir obtenu le baccalauréat, Louis Turban se tourne vers des études d’ingénieur à l’école des Arts et Métiers d’Angers (Maine-et-Loire) et obtient un diplôme d’ingénieur en 1918.

En 1921, il effectue son service militaire à l’école militaire du génie. Il quitte l’Armée le 1er juin 1923 avec le grade de sous-lieutenant. Le 16 juin, il entre aux chemins de fer de l’Etat en qualité d’attaché de groupe à la gare Saint-Lazare de Paris. En 1926, il est nommé sous-chef de gare aux Batignolles. L’année suivante, il est promu sous-inspecteur pour la région de Tours (Indre-et-Loire). Cette même année, il atteint le grade de lieutenant de réserve. En 1928, il quitte Tours pour la gare de Rouen (Seine-Inférieure, Seine-Maritime) toujours au poste de sous-inspecteur. En 1929, il est nommé inspecteur de 2e classe assumant les fonctions de chef de gare à Achères (Seine-et-Oise, Yvelines) puis retourne à Rouen début 1930. Le 1er octobre 1933, il devient inspecteur divisionnaire de 1ère classe, chef de l’arrondissement du service de l’Exploitation de Rennes (Ille-et-Vilaine) et s’installe au 26 rue Lafond avec sa femme d’origine anglaise, Agnès Ingham.

Le 2 septembre 1939, jour de mobilisation générale, sa carrière est interrompue et Louis Turban rejoint le 5e Régiment de génie au grade de lieutenant. Il décroche une citation à l’ordre du régiment et de la division, le 30 juin 1940. Le 22 juillet 1940, il est fait prisonnier puis interné à Baccarat (Meurthe-et-Moselle). Le 8 août 1940, il est libéré en raison de son appartenance à la SNCF et reprend son poste d’avant-guerre à Rennes.

En décembre 1940, il prend contact avec le réseau de renseignement Georges France créé par l’Intelligence Service britannique (MI6). Reconnu officiellement agent P1 de renseignement en date du 1er janvier 1941, il constitue en qualité de chef de secteur, l’antenne rennaise du réseau tout en poursuivant son activité professionnelle. En contact avec les services londoniens, et compte tenu de sa place au sein de la SNCF, il collecte un grand nombre d’informations sur le positionnement et les déplacements ferroviaires des troupes d’occupation. A partir du 22 juin 1941, date du déclenchement de l’invasion de l’URSS par l’Armée allemande, Louis Turban parvient à faire transmettre à Londres, des renseignements capitaux concernant l’acheminement de troupes allemandes en partance de Bretagne vers le front de l’Est.

A partir de novembre 1941, il intègre le réseau d’action Overcloud, organisation fraîchement créé par les frères Joël et Yves Le Tac sous l’impulsion conjointe du BCRA (Bureau central de renseignement d’action) dépendant de la France Libre, et la section RF du SOE (Special Operations Executive), service secret britannique en charge de porter la guerre subversive en Europe occupée. Au sein de l’organisation Overcloud, Louis Turban officie en tant qu’agent P2 et assure les liaisons entre les différentes branches que constitue le réseau. Au sein d’Overcloud, il est notamment en charge des liaisons entre la branche action-SNCF baptisée « Bête Noire », composée pour l’essentiel d’employés de la SNCF, et la branche renseignement du réseau en contact étroit avec le réseau de renseignement Georges France.

Alors que l’organisation Overcloud étend son activité sur une large partie de la Bretagne et qu’elle dispose d’une antenne parisienne, elle est menacée fin 1941, début 1942 par les services de contre-espionnage allemand qui parviennent à mettre en relation des civils français travaillant pour les nazis avec des membres du réseau. Ainsi, au début du mois de février 1942, le réseau subit une première vague d’arrestations en partie due à un civil français travaillant pour la section Gestapo des services de la Sipo-SD (Sicherheitspolizei-Sicherheitsdienst) de Rennes. En effet, ce dernier est parvenu à entretenir un lien étroit avec l’une des secrétaires du réseau lui ayant permis de subtiliser un carnet – instrument contraire à toutes les règles de sécurité mises en place par le SOE – sur lequel était inscrit un très grand nombre de noms de l’organisation Overcloud.

Le 3 février 1942, alors que Louis Turban se rend à Quimper pour un rendez-vous professionnel avec le chef de gare de Quimper (Finistère), il est arrêté par la police allemande vers 8h15 lors d’une étape à Rosporden (Finistère). Conduit le soir même à la prison Jacques Cartier de Rennes, il est transféré le lendemain sur Paris et interné à la prison de Fresnes. Dans le même temps, son domicile est perquisitionné et sa femme est arrêtée. Son bureau à la SNCF fait également l’objet d’une perquisition et sa secrétaire, Jeanne Ropers, est également mise en état d’arrestation. Ces dernières seront incarcérées plusieurs mois au fort de Romainville (Seine-et-Oise, Seine-Saint-Denis) avant d’être successivement libérées, fin novembre 1942 pour Jeanne Ropers, et mars 1943 pour sa femme, Agnès Ingham.

De son côté, Louis Turban est placé à l’isolement à Fresnes durant plusieurs mois avant que son dossier ne soit classé comme relevant de « l’espionnage » avec la mention « NN » (Nacht und Nebel, Nuit et Brouillard) par la Sipo-SD. Le 8 juillet 1943, Louis Turban est déporté discrètement dans un convoi « NN » sous le matricule 4377 depuis la gare de l’Est de Paris en direction du camp de concentration de Natzweiler-Struthof (Alsace annexée) avec 55 autres déportés parmi lesquels 7 autres membres du réseau Overcloud dont les frères Joël et Yves Le Tac. Il y décède d’épuisement et de maltraitance le 10 mai 1944.

En 1954, la mention « Mort pour la France » et le titre de « déporté résistant » lui sont attribués. A titre posthume, Louis Turban a été nommé commandant des Forces françaises combattantes et a été fait chevalier de la Légion d’Honneur. Son nom est inscrit sur le monument aux morts de la gare de Rennes.


Joris Brouard

Sources :

Service historique de la Défense, Vincennes :

- GR 16 P 5800118 TURBAN Louis
- GR 17 P 185 Overcloud
- GR 28 P 3 25 Mission Overcloud

Archives départementales d’Ille-et-Vilaine : 514W11 ; 213W63

Notice « TURBAN Louis » par Guillaume Quesnée et Thomas Fontaine ; Les cheminots victimes de la répression, 1940-1945 ; ouvrage collectif sous la direction de Thomas Fontaine, éditions Perrin/SNCF, 2017, p. 1444