Avenue de la Libération, Combourg (Ille-et-Vilaine)

Légende :

Rue empruntée le 2 août 1944 par les éléments blindés du Combat Command A (groupement tactique interarmes) de la 6th US Armored Division commandée par le général Robert W. Grow.

Genre : Image

Producteur : Joris Brouard

Source : © Joris Brouard Droits réservés

Date document : Février 2022

Lieu : France - Bretagne - Ille-et-Vilaine - Combourg

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Contexte historique

Le 25 juillet 1944, les Américains déclenchent en Normandie l’opération Cobra qui vise selon son concepteur, le général Omar N. Bradley commandant la 1ère armée américaine, à percer le front normand afin de sortir les Alliés de l’impasse du bocage normand dans laquelle ils piétinent depuis plusieurs semaines.

Confiée au VIIème Corps du général Joseph L. Collins, la force de frappe du plan Cobra bouscule les défenses allemandes sur un front étroit situé sur l’axe Périers/Saint-Lô. En quelques jours, les unités blindées et motorisées du VIIème Corps s’infiltrent dans le dispositif allemand semant la confusion et la désorganisation.

Tirant parti de l’état quasi apathique dans lequel baignent les forces allemandes, le VIIIème Corps du général Troy H. Middleton passe à son tour à l’offensive le 28 juillet depuis l’extrême-ouest du Cotentin. À l’instar du VIIème Corps, les fers de lance blindés du VIIIème constitués des 4ème et 6ème Divisions blindées (DB) mènent la charge à un rythme soutenu en dévalant le Cotentin sur les talons des Allemands qui tentent désespérément d’enrayer la progression quand ils ne se replient pas.

Longeant la côte ouest du Cotentin, les colonnes de la 6ème DB du major-général Robert W. Grow sont davantage ralenties dans leur progression que leurs homologues de la 4ème DB commandée par le major-général John S. Wood, laquelle parvient à libérer Coutances en fin de journée.

L’objectif d’Avranches initialement assigné à la 6ème DB, est dévolu à la 4ème DB du général John S. Wood. En effet, le 29 juillet, la 4ème DB est mieux positionnée pour se projeter sur Avranches tandis que la 6ème DB est bloquée par un pont détruit enjambant la rivière Sienne dont les Allemands gardent la rive sud. Après un combat retardateur mené par les défenseurs allemands, les troupes de la 6ème DB prennent position sur l’autre rive et établissent une tête de pont en attendant avant que le génie divisionnaire ne mette en place un pont provisoire nécessaire au franchissement des unités blindées.

Le 30 juillet, la 4ème DB s’élance à l’assaut d’Avranches pendant que la 6ème DB poursuit timidement sa progression à l’ouest du Cotentin avec pour objectifs, Bréhal et Granville. Le lendemain, Avranches est tombée aux mains des troupes de la 4ème DB qui en outre, se sont emparées du pont de Pontaubault (Manche) véritable tremplin vers la Péninsule bretonne. Durant la journée, la 6ème DB sécurise finalement les villes de Bréhal et de Granville. Elle reçoit ensuite l’ordre du VIIIème Corps de faire mouvement vers Avranches afin de relever les positions de la 4ème DB autour de la ville ainsi que celles de Pontaubault. Au soir du 31 juillet, les Américains en détenant les clés d’entrée en Bretagne, sont idéalement positionnés pour envisager la suite des opérations.

Le 1er août 1944, la 3ème Armée américaine du général George S. Patton Jr. devient opérationnelle avec pour objectif immédiat la conquête de la Bretagne et la capture des ports dont celui de Brest considéré comme prioritaire. Pressées par le calendrier, les préoccupations alliées en Bretagne sont avant tout liées aux besoins logistiques indispensables à la poursuite des opérations en Europe. Patton charge le VIIIème Corps de réaliser ces objectifs. Pour ce faire, le général Middleton en conformité avec les ordres de Patton décide de constituer deux axes principaux de progression :

- une avance d’est en ouest en direction de Brest confiée à la 6ème DB du général Robert W. Grow lequel supervisera également la progression de la Task Force A du brigadier-général Herbet L. Earnest chargée de sécuriser les ponts et la ligne de chemin de fer Brest-Rennes ;

- une avance du nord vers le sud confiée à la 4ème DB du général John S. Wood en vue d’isoler la Péninsule bretonne et de capturer la baie de Quiberon afin d’y aménager un port artificiel (opération Chastity) conformément au plan original Overlord.

Ce jour-là, les colonnes de la 4ème DB ont l’honneur d'entrer les premières en Bretagne en partant des têtes de pont qu’elles ont établies au sud de Pontaubault, dans le secteur de Saint-James (commune normande limitrophe de l’Ille-et-Vilaine) pour se diriger vers Rennes.

Plus à l’ouest, le général Grow tente de mettre sa division en mouvement dans des conditions de circulation difficile. En effet, le goulet d’étranglement d’Avranches par lequel doivent se faufiler les unités américaines pour rejoindre la Bretagne est si étroit qu’il entraîne de forts embouteillages, à tel point que le général Grow donne de sa personne pour fluidifier le trafic au coin d’un carrefour. Pour se lancer à l’assaut de Brest, le chef de la 6ème DB planifie deux axes de progression depuis Pontaubault : l’un au sud confié au CCA de la division sous les ordres du brigadier-général James Taylor, l’autre au nord au CCB commandé par le colonel George W. Read Jr. renforcé par le Reserve Command (CCR) du colonel Harry F. Hanson.

Or, le 1er août, le CCB est encore bloqué dans les embouteillages au niveau d’Avranches. Outrepassant les recommandations tactiques, Grow est alors contraint de placer le CCR – la réserve opérationnelle de la Division – en tête de la progression qui s’élance vers Pontorson. Il convient de préciser que le général Patton a ordonné oralement au général Grow de capturer Brest sous cinq jours. Par conséquent, cet ordre laconique impose une rapidité d’exécution et de mouvement de la part de la Division. À cet égard, il incombe à l’état-major de la 6ème DB de définir un itinéraire adéquat susceptible de modifications qui privilégie le contournement de positions allemandes présumées ou réputées fortifiées ; d’où les impérieuses missions de reconnaissance en aval du « torrent en crue » (expanding torrent) symbolisé par la progression des colonnes blindés sur les arrières de l’ennemi.

Dans les DB américaines, l’activité de reconnaissance relevait en principe de l’escadron de cavalerie mécanisée considéré comme les yeux de la division. Du fait de sa dotation théorique en véhicules légers lui conférant – malgré l’insatisfaction des militaires – une relative mobilité et rapidité, l’unité de cavalerie mécanisée pouvait se projeter en avant des colonnes de la DB afin de reconnaître les routes et les points de passages tout en rendant compte d’une éventuelle présence ennemie. L’une de ses autres missions consistait à assurer les liaisons physiques entre les différentes unités de la division, naviguant d’une colonne à l’autre par les routes secondaires tout en jouant un rôle de flanc-garde.

Au sein de la 6th Armored Division, c’est le 86th Cavalry Reconnaissance Squadron du lieutenant-colonel Albert E. Harris qui est chargé de ces missions. Mais le 1er août, l’escadron manœuvre encore dans le secteur d’Avranches lorsque le CCR s’élance vers 8h00 en direction de Pontorson. Arrivés au niveau du hameau de Brée situé sur la commune de Tanis, quelques kilomètres au nord-est de Pontorson, les éléments du CCR sont pris sous un violent feu allemand mélangeant artillerie lourde et armes antichars. L’avance est stoppée nette et les troupes américaines doivent combattre durant trois heures avant de venir à bout des positions allemandes. En de fin de journée, le CCR s’installe à l’ouest de Pontorson.

Le CCA quant à lui, prend tardivement la direction du sud-ouest depuis Pontaubault et traverse plusieurs communes sans grand incident majeur. Durant la nuit, il atteint Antrain (actuelle commune de Val-Couesnon) où il établit une tête de pont sur la rive ouest du Couesnon. Enfin, après être sortis des embouteillages autour d’Avranches, le CCB et l’artillerie divisionnaire se positionnent à la nuit tombée à l’est de Pontorson sur les arrières du CCR.

Le 2 août marque véritablement le début de la chevauchée de la 6ème DB en Bretagne qui doit s’effectuer sur deux tracés principaux. À 6h00, le CCB et l’artillerie divisionnaire franchissent les lignes tenues par le CCR pour se diriger vers Pleine-Fougères puis empruntent la route qui passe par les communes de La Boussac, Épiniac jusqu’à Lanhélin. L’objectif du CCB étant Dinan, les colonnes blindées se précipitent sur Lanvallay, commune située aux portes de Dinan, qu’elles atteignent vers 10h30.

À l’approche de Lanvallay, l’avant-garde du CCB se heurte à une vive opposition allemande qui bloque l’accès à Dinan. Le colonel Read engage ses troupes dans le combat mais reçoit peu après l’ordre de la Division de contourner la ville qui semble alors solidement défendue. Malgré cela, le colonel Read décide de poursuivre l’attaque sur Lanvallay qui est en partie conquise vers 15h00. Un nouvel axe de progression est ensuite attribué au CCB. Dissimulant son mouvement au moyen d’une arrière-garde restée à Lanvallay, les colonnes du CCB s’engagent vers le sud, libèrent Évran et rejoignent le secteur de Bécherel vers 22h00 où elles prennent contact avec leurs homologues du CCA et du CCR arrivés dans la journée.

Plus tôt dans la journée, le CCA prend son départ à 6h15 depuis Antrain pour s’orienter dans un premier temps en direction du nord-ouest et atteindre la commune de Trans-la-Forêt. Puis, il bifurque vers le sud-ouest sur un axe parallèle au CCB. Les colonnes du CCA prennent ainsi la route qui conduit les troupes à traverser successivement Cuguen, Trémeheuc et pénètrent dans Combourg par l’est. Une fois la commune traversée, le CCA marche vers La Chapelle-aux-Fitzméens jusqu’à Saint-Domineuc.

Sur son parcours, le CCA ne rencontre guère d’opposition ennemie. D’une part, les troupes allemandes ont reçu pour consigne de se replier sur les principaux ports bretons transformés en Festungen (forteresses). D’autre part, les FFI s’impliquent peu à peu dans les opérations de libération en suppléant les troupes américaines dans les missions de couverture de flanc et de consolidation des territoires libérés.

À Saint-Domineuc, le général Taylor est informé de la situation du CCB aux portes de Dinan et du projet de contournement de la ville. Afin d’anticiper le mouvement du CCB, la route du CCA qui devait initialement rejoindre Évran, est réorientée vers le sud en direction de Tinténiac. De là, les colonnes de tête mettent de nouveau le cap vers l’ouest dépassant à vive allure les communes de La Baussaine, Bécherel pour gagner le secteur de Médréac et Quédillac vers 18h00. À ce stade, le général Grow ordonne de faire une pause afin de reposer les hommes et les machines.

Après une mission de sauvetage de marins américains bloqués à Dol-de-Bretagne, le CCR est envoyé sur les traces du CCA avec lequel il fait sa jonction à Tinténiac en fin de journée. Enfin, le PC divisionnaire rejoint Saint-Domineuc vers 23h00 pour s’y installer.


Auteur : Joris Brouard

Sources et bibliographie :
- Archivistiques :

  • Archives départementales d’Ille-et-Vilaine : 171J1 ; 171J3
  • National Archives and Record Administration, USA :

- After Action Report, Third US Army, Vol. 1, 2, 3
- After Action Report, 50th Armored Infantry Battalion, 6th US Armored Division
- After Action Report, 603rd Tank Destroyer Battalion
- After Action Report, 777th Anti-Aircraft Artillery Battalion
- Unit History, Combat Command B, 6th US Armored Division

- Bibliographiques :

  • AUBIN Nicolas, La course au Rhin (25 juillet – 15 décembre 1944) : pourquoi la guerre ne s’est pas finie à Noël, Paris, éditions Économica, coll. « Campagnes & stratégies » 2018, 512 p.
  • BLUMENSON Martin, La Libération – L’histoire officielle américaine, éditions Charles Corlet, coll. « Libération et mémoire », 1993, 1021 p.
  • BRAME Wayne W. (Lieutenant Colonel), BRUMMITT LeRoy D. ( Major), LINTHWAITE George P. (Major), McBRIDE Arthur J. (Major), HARTING Herbert W. (Captain), BONHAM Dwight D. (Captain), COADY Gerald G. (Captain), DEW James R. (1st Lieutenant), Super Sixth in Exploitation – 6th Armored Division, Normandy to Brest – Operation Cobra, The Armored School, Fort Knox, Kentucky, USA, 1949.
  • D’ESTE Carlo, Histoire du débarquement, Paris, éditions Perrin, 2013, 560 p.
  • GAWNE Jonathan, 1944, La libération de la Bretagne : la bataille de Brest, éditions Histoire et Collection, 2004, 160 p.
  • HOFMAN George F., The Super Sixth – History of the 6th Armored Division in World War II and its post-war Association, Sixth Armored Division Association Publisher, Louisville, Kentucky, USA, 512 p.
  • ZALOGA Steven J., Brittany 1944. Hitler’s Final Defenses in France, editions Osprey, 2018, 96 p.
  • ZALOGA Steven J., Opération Cobra – La percée du front normand et la libération de la Bretagne – juillet/août 1944, éditions Osprey, 2010, 94 p.
  • ZALOGA Steven J., U.S Armored Divisions. The European Theater of Operations, 1944 – 45, editions Osprey, 2004, 96 p.

- Périodiques :

  • GROW Robert W. (Brigadier General), « An Epic of Brittany », Military Review – The Professional Journal of the U.S Army, February 1947, pp. 3-9

- Site Internet :