Terrains de parachutage dans la Drôme

Légende :

Croquis des sites de parachutages dans la Drôme et dans les départements limitrophes.

Genre : Image

Type : carte

Producteur : Alain Coustaury

Source :

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme

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Analyse média

La carte montre que la Drôme a possédé de nombreux terrains de parachutages. Ils étaient répartis sur pratiquement tout le territoire du département. Si certains étaient éloignés des agglomérations (Brette, William 16), d'autres étaient proches de bourgades (Allex, Temple, Chlore (au Pilon, équidistant de 3 km environ des villages de Claveyson, Bren, St-Barthélemy et Chantemerle.). Le Vercors dispose de plusieurs terrains dont certains seront souvent utilisés.

On constate que les terrains repérés n'ont pas tous été utilisés. Ceux qui l'ont été ont réceptionné du matériel et, pour certains, des hommes. Aucun terrain drômois n'a vu atterrir des avions de liaison amenant ou récupérant des agents. Un terrain, celui de Vassieux-en-Vercors, Taille-crayon a été aménagé pour réceptionner des avions de la taille des Hudson ou des C47 Dakota. L'attaque allemande du 21 juillet 1944 n'a pas permis son utilisation par les Alliés.


Alain Coustaury

Contexte historique

Les parachutages, les opérations aéroportées

Les succès allemands en 1940 en Hollande, en 1941 en Crête poussent les Britanniques à améliorer la technique et l’utilisation des parachutes. Pour cela est créé le SAS (Special Air Service) dont les hommes sont coiffés du béret rouge.

Le parachute utilisé n’avait rien de commun avec les parachutes actuels. Il n’offrait pratiquement aucune possibilité de manœuvre, notamment d’orientation ou de déplacement horizontal. La précision du saut dépendait donc largement de la qualité de navigateur du pilote de l’avion qui donnait l’ordre du saut ou du largage après avoir repéré le terrain et tenu compte de la dérive causée par le vent.

Devant l’ampleur des besoins, il fallut reconsidérer toute la production des équipements.

La loi prêt-bail permit la fabrication du nylon en Grande-Bretagne qui remplaça, avantageusement, la soie pour la voilure du parachute.

Au début, pour des raisons d’économie et de temps, l’équipement réglementaire des parachutistes britanniques ne comportait pas de parachute ventral ce qui entraîna des pertes humaines.

Il fut nécessaire aussi de modifier l’armement et l’équipement afin de les adapter au saut en parachute.

Furent mis au point des casques spéciaux avec jugulaires de menton et de nuque, des bottes capables d’amortir les chocs d’atterrissage souvent très durs.

L’armement dut être modifié, les fusils et mitraillettes allégés par l’adaptation d’une crosse pliante. Les sacs à dos réglementaires ne convenaient plus. Les hommes portant leur parachute sur le dos, ils durent brêler leur équipement sur le ventre, y compris leur arme. Le tireur au FM portait son arme dans un sac de jambe (leg bag) attaché sur le côté, de la botte à l’aisselle. Il le libère une fois le parachute ouvert. La charge pend une dizaine de mètres au-dessous, retenue par un harnais. Elle touche le sol avant l’homme, diminuant ainsi la vitesse finale d’atterrissage. Cible facile lors de l’atterrissage, le parachutiste saute toujours avec son arme individuelle, certains avec l’arme collective.

Les agents spéciaux parachutés étaient normalement armés d’un pistolet ou d’un revolver. Ils étaient toujours largués avant les charges ou les containers, cylindre de 40 cm de diamètre, de 1,7 m de long (attention, aujourd’hui, container/conteneur = boite, définit, une caisse aux dimensions normalisées, 20 pieds/6,10 m ou 40 pieds de long qui a révolutionné le transport de marchandises par rail, route et navires ). Souvent, un comité de réception était prévu au sol pour accueillir les agents. Mais certains agents furent largués « blind » c’est-à-dire à l’aveuglette, sans comité d’accueil !

L’organisation

À l’origine des parachutages, Raymond Fassin (Sif) et le Romanais Bruno Larat sont affectés au SOAM (service des opérations aériennes et maritimes) qui devient, en avril 1943, le COPA (centre d’opérations de parachutages et d’atterrissages). En 1942, Raymond Fassin, parachuté « blind » le 31 décembre 1941, organise l’infrastructure de R1, R2 dont il prend la direction et de R3, R4, R5, R6. Le 20 février 1943, Bruno Larat est parachuté pour seconder Raymond Fassin.

En avril 1943, le commandant des opérations aériennes pour R1 et R2 est le Drômois Bruno Larat (Luc, Xavier). Pour R1, le chef est Léopold Vigneron (madame Gauthier) qui a sous ses ordres Henri Faure (Christian, Albert, Gérard), chef des opérations aériennes en Drôme-Ardèche. À partir de juin 1944, à cause du grand nombre des parachutages, Henri Faure est déchargé de la responsabilité des opérations en Ardèche. Firmin Faure (Étienne), son adjoint le remplace dans ce département.

Bruno Larat, arrêté à Caluire en même temps que Jean Moulin, est remplacé par Léopold Vigneron, parachuté le 23 juillet 1943 au nord de Lyon. Il est chargé d’instruire les chefs de SAP sur les nouvelles dispositions et les nouveaux équipements (S. Phone, Euréka).

Le 28 juillet 1943, la Drôme, pour les régions de parachutage, fait partie de la région John.

À la fin de septembre 1943, la SAP dirigée par Henri Faure dispose de onze terrains dans la Drôme et l’Ardèche.

Petit à petit, avec beaucoup de difficultés, les équipes SAP sont formées. En juin 1943, Henri Faure contacte Pierre Rey et Marc Chapoutier, de Tain-l’Hermitage, pour constituer une équipe SAP de réception de parachutages. Ils recrutent plusieurs Tainois. Pierre Rey indique le terrain Chlore au carrefour du Pilon (Bren/Saint-Barthélémy-de-Vals). Louis Cotte trouve un terrain au sud-ouest de Margès près de la ferme Dumoulin (Terrain Pluton ?). En septembre 1943, est créé le groupe SAP de Taulignan – Valréas. Comme pour toute organisation de la Résistance, le repérage, la certification des terrains furent lents.

En août 1943, Amédée Tena, de Montségur, donne les coordonnées de 2 terrains d’atterrissage à Marcel Descour (Bayard).

Septembre 1943, Léopold Vigneron fournit un système Euréka à Henri Faure pour la réception des parachutages de la SAP À la fin de septembre 1943, la SAP dirigée par Henri Faure secondé par Longepierre (Coste) disposait de onze terrains dans la Drôme et huit dans l’Ardèche.

En juin 1944, pour faire face à l’augmentation du nombre des opérations, le service des parachutages est réorganisé. Pour la Drôme, Henri Faure répond au nom de code Galvani 13. Il prend la direction de toutes les opérations de parachutage de la Drôme.

Organisation de la SAP dans la Drôme pour la période de juin 1943 au 30 septembre 1944.

Henri Faure (Christian, Gérard, Albert), chargé de mission de 1ère classe de la mission Galvani. Chef départemental Drôme – Ardèche

Lieutenant Mathon Jean (Nano)

Lieutenant Longepierre (Coste)

Lieutenant Faure Firmin (Étienne), devient responsable pour l’Ardèche le 6 juin 1944

Lieutenant Faille Léon (Constant)

Lieutenant Junique (Marius)

Lieutenant Monié Philippe (Jacques), vient de l’Ardèche le 6 juin 1944

Radios Cornec René (Nubien) Blass Henri (Maori) Claude (Sibellius) Lieux d’émission : moulin de Montélier de la famille Leglen (2 enfants), ferme des Moutiers à Allex

Secrétaires et agents de liaison Madame Adamson (Olga) nom de code KIM4 et CIF4

Madame Rieu-Charlot (Yvelines ? Évelyne ?) nom de code CIF3

Mademoiselle Dulac Yvette (Étiennette)

Mademoiselle Courtial (Annette)

Boîtes aux lettres

Monsieur et Madame Vinson, avenue de Chabeuil, Valence

Madame Mathon Jeanne, avenue Félix Faure, Valence

Madame Chazal Léa, rue du Pont du Gat, Valence

Madame Wilmes, faubourg Saint-Jacques, Valence

Monsieur Davin Albin Léon, responsable du terrain Fabert près de Marsanne, arrêté le 12 octobre 1943, mort en déportation à Flossenbürg.

Effectifs des équipes permanentes

Équipe de Tain : Billon Marcel, Boreil Jacques, Cotte (chapelier à Saint-Donat), Pierre Rey, Jean Rey, Marc Chapoutier, Cotte Marcel, Colomer Henri, Espic Pierre, Françon Paul, Fillot Gabriel Gaymard Marcel, Gris René, Habrard Charles, Morand Étienne, Pinet Gaston, Robert Adrien, Michon Abel

Équipe de Dieulefit : Baral Louis, Barthale Louis, Baud Gabriel, Ceccaldi Dominique, Chomarat Édouard, Delclaux Edmond, Duffaud Dultichi (docteur), Gomi (dentiste), Giraud Henri, James Henri, Jouve Jean, Lasalle Roger (Jo), Rodet André, Valentin Charles, Veyrier Ernest, Bouchet Henri (Ricou)

Équipe de Saint-Nazaire-en-Royans : Algoud Lucien, Bec Marcel, Bertrand Fernand, Bourne Jean, Chardon Louis, Delon Raymond, Dupont ?, Doucin André, (fusillé le 21 mai 1944 à Vassieux ), Ferroul Jean (responsable du terrain), Odeyer Émile, Ravaux Marcel, Rime Ernest, Rivière Paul, Romanais André, Romanais Paul.

Les terrains

Il n’y a pas eu, semble-t-il, d’atterrissages d’avions alliés dans la Drôme pendant l’occupation. Le seul terrain d'atterrissage aménagé est celui de Vassieux. Il est repéré et adopté le 3 mars 1943 par Yves Farge, Pierre Dalloz, Ravalec et Pupin. Il portera le nom de Taille-crayon ou Gabin. Il est préparé par l’équipe du capitaine Amédée Tournissa (Paquebot). Il peut recevoir des C-47 Dakota ou des Hudson. Ce sont les Allemands qui l’utilisent le 21 juillet 1944 et les jours suivants ! Contrairement à ce qu'il est couramment admis, très peu de leurs planeurs s’y posent. Il sert surtout pour leurs avions de ravitaillement en hommes et en matériel et pour l’évacuation de leurs blessés.

Trois types de terrains sont définis :

Les terrains d’atterrissage : 1 500m de long, parfaitement plat, éloignés le plus possible des habitations, de points hauts, de DCA ennemie.

Les terrains ‘’Homo – Arma : 300m de long au minimum, sol pouvant recevoir du personnel sans trop de risques.

Les terrains ‘’Arma’’ : terrains dont la nature ne permet pas la réception de personnes sans risque d’accident.

Un système simple de coordonnées géographiques permet de l’identifier avec précision. Il est reporté sur la carte routière Michelin, sur laquelle on applique une grille secrète en papier calque. Cette grille, spécifique à chaque département, est posée sur la carte en faisant coïncider la ligne horizontale de référence en latitude L sur un parallèle et la ligne verticale de référence en longitude G sur un méridien. Par exemple le terrain Temple a pour coordonnées : carte Michelin 77, pli 12, Sud 49 G 80 N (lettre relevée sur la grille), Est 2 G 80 14 (chiffre de la grille). Le code du terrain est transmis, par radio, à Londres. S’il est homologué, le terrain reçoit un nom de code et un ensemble de messages personnels. Si un parachutage est préparé, les messages sont diffusés par la BBC à 13 h 15, pour informer l’officier d’opération. L’équipe de réception est mise en alerte par la confirmation du message à l’émission de 21 h 15.

Plus de 90 terrains furent homologués dans la Drôme. Mais seuls ceux connaissant des conditions géographiques adéquates furent utilisés. La carte localise et porte le nom de code des terrains.

Il est parfois nécessaire d’aménager les approches de la zone de largage. Le 17 juin 1944, Henri Faure reçoit, de Londres, le télégramme suivant : « OPS 30 du 31, Air Ministry demande aujourd’hui si vous pouvez couper buissons, je dis buissons sur le terrain Temple, je dis Temple que désirons tenter avec Hudson, je dis Hudson Top buissons doivent être coupés de façon à augmenter possibilités dans le sens de la longueur Top utiliserons Temple avec phrase mois dernier. » Le message demande l’arasement de buissons à l’entrée de la « piste » afin de faire atterrir un bimoteur léger l’Hudson, fréquemment utilisé pour déposer des personnes. Henri Faure narre la suite donnée à cette demande. « Les soi-disant buissons dont parle Londres sont, en réalité, deux superbes peupliers qui bordent le terrain, au sud, de la propriété de Mme veuve Vincent, du quartier de Soulier à Allex. Je délègue Comer Charles et Chabanne Pierre de l’équipe d’Allex qui connaissent bien cette dame pour lui faire connaître la demande des Anglais. Elle réagit aussitôt en brave Française qu’elle est : Vous pouvez raser tout ce qui vous gène du moment que c’est pour la France. Le lendemain, les deux hommes, aidés de Brochier Fernand abattaient les deux arbres. Le travail terminé, je rédigeais un message afin d’informer Londres que le terrain était dégagé ». Aucun avion ne s’est posé sur Temple.

Liste de terrains

Terrains du Vercors

Saint-Martin-en-Vercors :Cavalier ; Les cavaliers sont toujours là ; 1,3 E de 3G40, 2N de 50 1 km Ouest : Coupe-papier ; ça ne fait rien, c’est la guerre 2 km Nord : Papier-Gomme ; Je vais foncer et m’accrocher ; La guerre vient de commencer

La Chapelle-en-Vercors, 3 km Sud-Ouest, plateau de l’Oscence à La Maye – La May ; Crayon ; Gloire et honneur à ce cochon de popotier 1 km à l’Est, plateau d’Herbounouze : Plume

Le Chalet (forêt de Lente)  La cavalerie est l’arme de décision ; 4,8E de 3G20 ; 7N de 49G80

Vassieux Gabin : ça ressemble à la bête humaine ; 6,5E de 3G80 ; 4N de 49G80 La Kasba était son asile Il était sur le quai des brumes Taille-crayon : Atarax grossit toujours

Méaudre, 4km au Nord Sous-main : Les cuirassiers sont de fiers cavaliers 5E de 3G40, N de 50G

Saint-Julien-en-Vercors, 2 km au Nord Presse-papier : La Pérouse est né à Albi Le petit chat est mort

La grande cabane Le revolver est enrayé ; 4,8E de 3G40 ; 2,3N de 49G80

Les difficultés

La plus dramatique est l'écrasement de l'avion, lors de son approche ou de son tour de repérage. Le 3 novembre 1943, l'appareil s'écrase près de Marcols-les-Eaux en Ardèche alors qu'il devait parachuter sur Temple à Allex. Six aviateurs sont tués. Un rescapé, blessé, John Brough, est ramené à Valence par Henri Faure. Il est rapatrié le 8 février 1944.

Difficultés liées au cadre physique

La géographie physique de la Drôme oblige à répartir les parachutages sur plusieurs départements : un parachutage en Drôme-Nord dessert une partie de l’Isère ; sur le Vercors, la Drôme et l’Isère ; sur la Drôme-sud, la Drôme et le Vaucluse.

Le vent, souvent violent dans la Drôme, peut déporter les parachutes ; le matériel est alors récupéré par les autorités françaises et cédé aux Allemands comme à Truinas le 30 septembre 1943.

Défaillance du matériel

Le 10 mars 1944, sur Taille-crayon, la défaillance du S Phone ne permit pas de rectifier la hauteur trop élevée des avions. Cela provoqua une dispersion importante des containers sur une surface couverte de neige et balayée par un vent violent.

La difficulté de trouver quatre lampes électriques en état de marche et du mercurochrome pour passer le verre de la ‘’lampe signal’’ peut faire annuler un parachutage !

Le 13 juillet 1944, au camp de la forêt Saint-Ferdinand près de Zeralda (Algérie), la section du bataillon de Choc de Muelle est en alerte et doit se rendre à l’aérodrome pour embarquer. Son camion tombe en panne en chemin. En arrivant à Blida devant la baraque des services spéciaux, les deux bombardiers affectés aux parachutages des missions secrètes roulent sur la piste. Les créneaux horaires de la mission étant précis, le groupe américain est parti et les Français ont été remplacés par du matériel pour le Vercors dont les besoins sont, sur ce plan, illimités.

Difficultés liées à des problèmes de pénurie de matériel et de personnel

On a envisagé le ravitaillement des maquis en utilisant des planeurs. À Londres, le 17 mars 1944, le commandant Duperrier essaie de convaincre le général Mockle-Ferryman d’utiliser des planeurs pour ravitailler les maquis. Ce dernier démontre qu’il est peu probable que l’on puisse utiliser des planeurs pour cette opération. Il présente des arguments pour justifier sa position : - Il est vrai que les planeurs modernes peuvent délivrer des charges importantes ou des grands volumes sans trop de risques de casse. - Mais avec la politique des « emballages perdus » qu’il faudrait adopter, on ne peut espérer un retour des pilotes des planeurs. Or, l’armée britannique est à court de pilote et cet état doit empirer avec le futur débarquement. Même si le principe peut être admis par les Britanniques, par le SOE, ce n’est que si Alger forme des pilotes de planeurs français en Afrique du Nord que l’on peut envisager l’utilisation des planeurs. Cette formation se ferait avec l’aide de la RAF, de l’USAAF.

Le 17 avril 1944, le général d’Astier réclame la mise à la disposition des Français de bombardiers Stirling qui viennent d’être remplacés par des Lancaster. Les Britanniques répondent qu’ils ne peuvent pas les céder car les appareils ont été versés dans les écoles de bombardement.

L’évacuation du matériel parachuté est parfois difficile par manque de véhicules. Le 24 avril 1944, à la suite d’un message imprécis, Henri Faure ne dispose que d’un seul camion pour l’évacuation. Du retard est pris. Un car passe devant le camion. Un passager téléphone à la Milice qui intervient immédiatement.

Mauvaise interprétation, imprécision des messages Le pilote est trompé par les feux de la Saint-Jean et largue son chargement sur ceux-ci (rapport Cutbert de juin 1944) !

Le message a été annoncé à deux équipes, sur le même terrain : le 24 septembre 1943 à Lens-Lestang - Marcollins Récupération difficile quand l’équipe n’est pas au rendez-vous à la suite d’un mauvais message : le 30 septembre 1943 : les « deux bêtes » se transforment en « huit bêtes » et l’équipe ne réagit pas.

Deux terrains ont le même code : le 10 avril 1944, le terrain Dattier de Poët-Laval, code Q, reçoit le parachutage destiné au terrain Victor, situé à 30 km au Sud, à Nyons, qui a le même code.

Intervention des Allemands, de la Milice

Le risque d’infiltration est important. Il entraîne une très grande méfiance de la part des Résistants. En avril 1944, le capitaine Pierre Casanova et le lieutenant Henri Rozan parachutés dans la Loire, en font les frais. Ils sont accueillis par Robert Bennes, acheminés vers Valence, après une liaison avec Léopold Vigneron. N’étant pas arrivés sur le terrain prévu, on les soupçonne d’être des agents allemands infiltrés. On les enferme dans une maison à Valence. Ils sont sommés de faire passer à la BBC le message « l’éléphant aime les carottes » qui passe après 4 jours. Libérés, ils se rendent en Ardèche pour accomplir leur mission.

Le 24 avril 1944, sur dénonciation, la Milice intervient sur le terrain Chlore. Deux réfractaires sont arrêtés. Le terrain ne peut plus être utilisé.

Dissensions dans la Résistance, difficultés avec Alger

La carte des terrains montre que le sud de la Drôme est pauvre en DZ. Cette région, siège de nombreux maquis FTP (indépendants dans le langage des Britanniques), semble avoir été mise à l’écart. ( ?).

Une indiscrétion entraîne une confusion lors de la réception le 14 novembre 1943, lors du premier parachutage sur le Vercors, dans la prairie de Darbounouze. Le terrain est connu de la grande majorité des Résistants. Cette absence de discrétion inquiète le chef militaire du Vercors, Alain Le Ray, qui ne peut faire modifier le texte du message et le lieu. La réception se déroule dans une certaine confusion. Les Résistants s’approprient les armes, les détournant de leur destination initiale L’opération se déroule dans une ambiance connue par Vichy et les Allemands. Dès le lendemain, les GMR patrouillent mais surtout les Allemands, avec des voitures goniométriques repèrent les deux opérateurs radios installés à Saint-Martin-en-Vercors : Gaston Vincent (Azur) et Pierre Bousquet (Mississippi).

La casse du matériel à l’atterrissage est importante et met en cause l’incapacité des préparateurs d’Alger. Le rapport du 14 juin 1944, de Cutbert, après sa visite au maquis de Combovin en témoigne « Les troupes de ce maquis sont bien entraînées. La vue la plus désolante de ce camp fut celle de la quantité d’armes et de munitions rendues inutilisables lors de leur mauvais parachutage. […] détruites en arrivant au sol. J’ai vu certains endroits où les containers de munitions ont explosé à leur arrivée. Le commandant m’a dit que 30% de ses matériels avaient été rendus inutilisables, soit à Alger ou lors du largage parce que le container s’ouvre pendant sa chute ou son parachute ne s’ouvre pas. Il m’a dit aussi que des membres des comités de réception avaient été tués par des containers s’ouvrant en l’air. L’un des membres de ces comités de réception m’a confirmé que ‘’cela va mal quand le parachutage vient d’Alger’’ ».

Ce qui est parachuté.

Des armes, des explosifs, des habits, des chaussures, du matériel médical léger, pansements, des tracts, de l'argent, de la nourriture.....… Exemples Le 14 octobre 1943, terrain Pluton : 4 fusils-mitrailleurs avec leurs munitions, 32 Sten avec leurs munitions, 80 Gammon, 60 Mills, 6 pistolets, 2 containers de sabotage, 2 colis de munitions, 1 colis de premiers secours.

Entre le 6 janvier 1944 et le 6 mai 1944, la Drôme a réceptionné 225 000 000 de Francs et 25 000 dollars sur les terrains Ajusteur, Agonie, Temple.

Entre le 1er janvier 1944 et le 15 avril 1944, Alger et Londres parachutent 1207 armes individuelles, 80 armes collectives, 39 mortiers, 2923 grenades.

Le 10 mai 1944, les tracts parachutés sur Brette se caractérisent par leur caractère violent. Des cachets permettant l’impression d’un motif à tête de mort et tibias entrecroisés et la mention Nazi au-dessus furent aussi parachutés.

Dans la nuit du 14 au 15 juin 1944, la compagnie Piron réceptionne à Margès : 7 containers contenant 48 fusils en bon état, 4 fusils cassés avec 125 cartouchières de 50 cartouches et 19 baïonnettes ; 4 mitrailleuses légères complètes avec canon de rechanges et 74 bandes de mitrailleuses de 250 balles ; 24 fusils-mitrailleurs avec 4 chargeurs vides par arme et 3 700 balles sans compter deux FM cassés et hors d’usage ; 7 sacs de 41 grenades ; 272 paquets de 250g de plastic ; 4 rouleaux de gutta (explosif), 15 rouleaux de cordon Bickford, 2 mèches lentes, 9 boites de crayons allumeurs (3 rouges, 3 blanches, 2 vertes, 1 noire), 4 percuteurs, 15 fusées rouges, 1 pelote de ficelle de chanvre, 1 boite relais, un sac contenant des ressorts et des pièces de rechange ; des pansements individuels et un brancard ; 18 pantalons kaki, 27 chemises, 9 paires de chaussettes ; chacun des containers renferme en outre 6 bandes de mitrailleuses et 18 paquets de chocolat

Les avions

Des bombardiers quadrimoteurs, au long rayon d’action, ont été aménagés pour le largage de charges ou d’agents spéciaux. On peut citer les Avro Lancaster, Handley-Page Halifax, Boeing B-17 Flying fortress, Consolitated B-24 Liberator. Des avions plus légers sont utilisés ; le plus célèbre est le Westland Lysander qui a la grande qualité de se poser très court. Généralement, les charges sont larguées en ouverture automatique. Les parachutistes sautent en utilisant un toboggan dirigé vers l’arrière ce qui les protège, en partie, du vent créé par la vitesse de l’avion.

Appareils ayant effectué des parachutages dans la Drôme

Les caractéristiques citées peuvent varier selon les nombreuses versions de ces appareils qui ont été construits en grandes séries, sur plusieurs années.

Avro-683 « Lancaster », Grande Bretagne Ce quadrimoteur est mis en service en 1941. C’est un des bombardiers les plus efficaces de la guerre et le plus célèbre parmi les avions britanniques. Le « Lanc » est un quadrimoteur de 31 m d’envergure et de 21 m de longueur. Équipé de 4 moteurs Rolls-Royce de 1 500 CV environ, il a une vitesse de croisière de 340 km/h. Son rayon d’action est de 2 700 km avec une charge de 6 350 kg.

Boeing B 17 « Flying fortress, forteresse volante », États-Unis C’est le plus connu des bombardiers quadrimoteurs de la guerre. Il est mis en service en juin 1939. L’appareil a une longueur de 22,8 m pour une envergure de 31,6 m. Son poids en charge est de 30 tonnes. La vitesse de croisière avoisine 340 km/h. Le plafond dépasse 10 000 m ce qui lui permet d’échapper à de nombreuses pièces anti-aériennes. Les bombardements s’effectuent généralement vers 7 / 8 000m. Le rayon d’action peut atteindre 5 000 km avec une charge réduite. Ce sont des B 17 qui effectuent le parachutage diurne du 14 juillet 1944 à Vassieux-en-Vercors.

Consolidated Vultee B 24 Liberator, États-Unis 4 moteurs de 1 200 CV, avec une envergure de 33,5 m et une longueur de 20,5 m, le B 24 est moins connu que le B 17. Le B 24 est mis en service opérationnel en juin 1941. Il fut construit en plus grand nombre que le B 17. Plus avancé techniquement, la qualité de son aile lui donne une très grande autonomie de 3 500km avec 2,2 tonnes de bombes.

Handley Page « Halifax », Grande Bretagne Moins célèbre que le Lancaster, le « Halibag » a pourtant joué un rôle très important. Propulsé par 4 moteurs Rolls-Royce de 1 280 CV, son envergure est de 30 m pour une longueur de 21 m. La vitesse de croisière avoisine 350 km/h. Le rayon d’action peut dépasser 2 000 km. C’est un Halifax qui s’écrase dans la nuit du 9 février 1944 vers Mantaille, au Nord-Ouest de Châteauneuf-de-Galaure. L’équipage, qui a sauté au-dessus de Ratières, est sauf. Parmi les passagers se trouve Francis Cammaerts. Ce dernier est récupéré par la Résistance locale.

Deux appareils sont à citer même s’ils n’ont pas effectué de missions dans la Drôme Lockheed Modèle 414 (A-29 PBO) « Hudson » un des avions utilisés à partir de 1942, pour déposer ou recueillir des agents sur des terrains préparés par la Résistance. Il devait être le premier avion à se poser sur la piste de Vassieux. C’est aussi un bimoteur de bombardement Envergure : 20 m ; longueur 13,5 m ; poids en charge, jusqu’à 10 000 kg ; vitesse maximum, jusqu’à 420 km/h ; rayon d’action 3 450 km.

Westland « Lysander », Grande-Bretagne Sorti en 1936. Cet appareil était destiné, au départ, à coopérer avec l’armée de terre. Il fut rapidement retiré des premières lignes et transformé pour des remorquages de cibles et des opérations clandestines. C’est la version Mark III SCW qui servit au transport, à la dépose et à la reprise des personnalités de la Résistance. Il était équipé d’un réservoir supplémentaire et d’une échelle d’accès. Son train d’atterrissage très solide s’accommodait d’un terrain sommaire. Sa faible vitesse d’atterrissage permettait de se contenter d’une piste courte. Équipé d’un moteur de 870 ch, sa vitesse ne dépassait pas 340 km/h. Il ne semble pas que des Lysander aient atterri dans la Drôme.


Auteurs : Alain Coustaury

Sources : - Fédération des Unités combattantes de la Résistance et des FFI de la Drôme, Pour l'amour de la France, Drôme-Vercors 1940-1944, Livre, Valence, édition Peuple Libre, 1989,

Martin Patrick, La Résistance dans le département de la Drôme, 1940-1944, Thèse de doctorat, Paris IV Sorbonne, auto-édition, 2002, 520,

Venner Dominique, Les armes de la Résistance, Livre, Paris, Jacques Grancher, 1976, 335.

TÉMOIGNAGES : Chatelin François ("capitaine Luciani"), Perquin J-L, 2002, Entretiens, François Chatelin, parachuté le 17 juillet 1944 à Dieulefit (Drôme) sous le nom de "Luciani", prend ses ordres auprès du capitaine Pierre Raynaud ("Alain"), chef des opérations aériennes Sud-Drôme et membre du réseau Jockey du SOE. Il commande la 12ème compagnie du 3ème bataillon de l'Armée secrète de Dieulefit et participe aux combats de la libération de Grenoble le 23 août puis Montélimar le 29 août. Il continue de commander cette unité sur le front des Alpes au sein de la 1ère division alpine reconstituée

 Reverchon Roger (capitaine "Raynal"), Perquin J-L, inconnue, Entretiens, Saute le 14 juillet 1944 (mentionné sur son état des services) à Comps près de Dieulefit (Drôme). Commande une compagnie FFI : combats à Pont-de-Claix (38) et libération de Grenoble.

Sassi Jean (colonel), Perquin J-L, inconnue, Correspondances et entretien, Jean Sassi ("Nicole", "Latimer") était radio de l'équipe Jedburgh "Chloroform".

NOTES BIBLIOGRAPHIQUES :

Foot (MRD), SOE in France, Her Majesty's Stationery Office, 1996.

Muelle Raymond, Le premier bataillon de choc, livre, Paris, Presses de la Cité, 1977.

Poniatowski Michel, Mémoires, livre, Plon / le Rocher, 1997, 140 à 189, Michel Poniatowski fut membre du commando-parachutiste largué dans la Drôme après les événements du Vercors.

Rousset de Pina (capitaine), Le bataillon de choc en action, Editions Gilbert, 1947.