Rapport de police concernant l'arrestation de Corniglion-Molinier
Légende :
Rapport de police concernant l'arrestation d'Edouard Corniglion-Molinier, daté du 13 janvier 1941
Genre : Image
Type : Télégramme
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Détails techniques :
Document de deux pages (recto-verso).
Date document : 13 janvier 1941
Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Alpes-Maritimes - Nice
Analyse média
Le commissaire divisionnaire de Police spéciale (ancêtre des Renseignements généraux) de Nice fournit au préfet des Alpes-Maritimes, le 13 janvier 1941, des informations sur les activités gaullistes et/ou anglophiles du commandant d’aviation Corniglion-Molinier (qui avait combattu pour l’Espagne républicaine au sein de l’escadrille dirigée par André Malraux). Le rapport indique que la correspondance postale et les communications téléphoniques du suspect étaient depuis plusieurs semaines soumises au Contrôle postal et téléphonique, tout en signalant son arrestation à Marseille, le 5 janvier, par la DST puis son inculpation d’atteinte à la sûreté extérieure de l’Etat (plusieurs sources indiquent son arrestation à la fin décembre, peut-être que le 5 janvier correspond à la date de son incarcération au fort Saint-Nicolas). Le préfet Ribière a souligné : « recrutement au profit de l’ex-général de Gaulle », « Malraux », ainsi que l’arrestation et l’incarcération de Corniglion-Molinier, tout en annotant le document par la consigne « Ficher les 2 et classer. Me demander le dossier Malraux ». Ce rapport complète le télégramme adressé de Vichy le 27 novembre 1940.
Jean-Louis Panicacci
Contexte historique
Edouard Corniglion-Molinier, ardent républicain et alors d’idées progressistes, avait produit plusieurs films sous le Front populaire. Après sa démobilisation, il avait rencontré Emmanuel d’Astier de la Vigerie avec lequel il avait fondé, en décembre 1940 à Cannes, la fantomatique « Dernière colonne », organisme politico-militaire devant opérer des sabotages de trains destinés à l’Allemagne. Le Contrôle postal et téléphonique, mis en place à la fin de 1940, ouvrait des centaines de lettres tous les jours et écoutait des dizaines de communications téléphoniques afin de repérer les activités gaullistes et anglophiles (mais aussi communistes), voire de neutraliser leurs animateurs par un internement « administratif » décidé par le préfet. André Malraux, alors présent à Saint-Jean Cap-Ferrat puis à Cap d’Ail, était surveillé par la police en raison de son passé politico-militaire mais il ne se livra à aucune activité hostile au gouvernement avant le printemps 1944, se contentant d’écrire de nouveaux textes, voire de corriger des épreuves, éconduisant ceux qui, comme Claude Bourdet, le sollicitaient de les rejoindre dans la clandestinité. Corniglion-Molinier put parvenir en Grande-Bretagne en mars 1941 via le Maroc et la Martinique, participer aux opérations des Forces Aériennes Françaises Libres contre l’Allemagne, puis au Moyen-Orient et enfin sur le front de l’Atlantique, obtenant les étoiles de général de brigade.
Auteur : Jean-Louis Panicacci
Sources :
Claude Bourdet, L’aventure incertaine, Paris, Stock, 1995
Laurent Douzou, La désobéissance, histoire du mouvement Libération-Sud, Paris, Odile Jacob, 1995
Jean-Louis Panicacci, La Résistance azuréenne, Nice, Serre, 1994.