Dernière lettre de Marcel Simon
Légende :
Dernière lettre de Marcel Simon avant son exécution, le 26 septembre 1943, à la Citadelle de Besançon.
Genre : Image
Type : Lettre manuscrite
Source : © Musée de la Résistance et de la Déportation de Besançon, M0335_2002.822.07 Droits réservés
Détails techniques :
Lettre manuscrite recto-verso sur formulaire de correspondance.
Date document : 26 septembre 1943
Lieu : France - Bourgogne - Franche-Comté (Franche-Comté) - Doubs - Besançon
Contexte historique
Marcel Simon, 20 ans en 1940, est un jeune agriculteur. Il a formé son engagement citoyen et son engagement religieux à la JAC. Responsable du groupe Guy Mocquet à Larnod, il est en relation avec "Philippe", délégué du Front national. "Philippe" de son vrai nom Bourdy, est hébergé par la famille Compagnon de Chouzelot (à 10 km de Larnod). Le groupe Guy Mocquet est en relation avec le groupe Marius Vallet (du nom du premier fusillé officiel de la Citadelle de Besançon) et avec le groupe Alsace (à l'initiative d'un jeune Suisse, André Montavon). Paul Paqueriaud, caché à Besançon, assume les liaisons entre les groupes. Marcel Simon veut à la fois retarder la progression de l'armée allemande et prouver la présence d'une Résistance active. Il organise des actions spectaculaires et nombreuses : 31 attentats répertoriés dans l'acte d'accusation des 16 fusillés du groupe Guy Mocquet lors du procès à Besançon, le 26 septembre 1943. On peut retenir, en particulier, le 18 mars, une expédition pour couler quelques péniches près de l'écluse d'Aveney, complétée le 22, par un dynamitage de la grue flottante envoyée par l'armée allemande pour récupérer les embarcations coulées. Enfin, au moment de leur arrestation, les membres du groupe projetaient une opération d'envergure, qui consistait à enlever les principaux officiers allemands de Besançon pour constituer des otages. Les arrestations sont simultanées. Aucune autre n'est réalisée dans les semaines suivant les interrogatoires : personne n'a parlé. Les interrogatoires sont terminés fin août, et le procès fixé au 15 septembre 1943. La prison de La Butte est transformée en forteresse ; la salle d'audience reportée dans la partie la plus reculée de l'édifice. L'avocat, maître Paul Koch, assure une défense très précise, pendant les quatre jours des débats. Cette mise en scène doit impressionner l'opinion publique française.
La condamnation à mort intervient pour 16 d'entre eux et Marcel Simon demande une dernière fois la parole : " Mes amis, j'ai été votre chef, et je ne vous abandonnerai pas, le capitaine doit rester sur le vaisseau, quand il sombre " et il demande à être exécuté seul. Les condamnés demandent un prêtre. Un prêtre allemand est proposé pour accompagner les dernières heures. Refus très net des résistants: "Dieu n'est pas allemand ; nous voulons un aumônier français ." (On rapporte qu'à Fresnes, la Gestapo avait abusé de la foi religieuse de certains prisonniers). La confession par l'abbé Mauvilly est refusée à Marcel Simon s'il n'y a pas d'interprète : "Ce n'est pas parce que vous portez une soutane que vous avez le droit d'en savoir plus que nous". Finalement la confession est autorisée, avec un interprète pour chaque groupe de quatre résistants. Le 26 septembre 1943 à 5 h 40, quatre camions montent les 16 résistants à la Citadelle. Ils chantent La Marseillaise. A 8 h 25, Marcel Simon est exécuté avec Saturnino Trabado, Balthazar Robledo et Paul Paqueriaud. Ils sont enterrés à Saint-Ferjeux et les tombes sont constamment fleuries, malgré l'interdiction des autorités allemandes. Les condamnés ont eu le droit d'écrire des lettres, parfois censurées quand elles portaient des espoirs de victoire. Quelques extraits de ces lettres permettent de parachever le portrait de Marcel Simon, héros de 23 ans. A ses parents, il écrit : "Je vous demande de faire dire des messes pour moi, de prendre soin de mes arbres, afin que vous ayez un souvenir de moi." A son parrain Armand Buttet : "Je n'écris pas à Henri car il a assez de chagrin comme ça" (Henri, son frère, est prisonnier)."Je pense que, après la guerre, vous ferez renaître la JAC". A son curé, l'abbé Pourchet : "Je forme des voeux pour que, avec la paix, renaisse dans la paroisse, la JAC pour laquelle j'ai milité... Sachez que c'est en Français chrétien que je meurs. Vive la France ! " et aussi : "Sachez que ma dernière pensée fut pour vous, pour ma Patrie, pour Dieu, pour la Vierge. Au revoir, près de Dieu." Au même curé de Pugey, il disait aussi en octobre 1941 : "Je me ferais tuer pour les jeunes" Il avait alors 21 ans.
Raymond Tourrain, dans son ouvrage Les fusillés de la Citadelle ajoute que : "Les exécutions de Marcel Simon, des 16 autres fusillés du 23 septembre, furent à l'origine de l'engagement de nombreux jeunes résistants subjugués par le martyr, le courage et la dignité de ceux qui venaient de mourir ".
Maryse Marchandin DVD-ROm La Résistance dans le Doubs, AERI,