Le mémorial de Sainte-Anne, plateau de Manivert, Lambesc

Légende :

Le mémorial aux héros et martyrs de la Résistance de Sainte-Anne, l'un des principaux monuments des Bouches-du-Rhône dédiés à la Résistance, situé sur le plateau de Manivert, commune de Lambesc

Genre : Image

Type : Mémorial

Source : © Cliché Robert Mencherini Droits réservés

Détails techniques :

Photographie numérique en couleur.

Date document : Décembre 2007

Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Bouches-du-Rhône - Lambesc

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Analyse média

Le mémorial aux héros et martyrs de la Résistance se dresse au sommet de la Chaîne des Côtes, à une altitude de 487 mètres, dans la commune de Lambesc, sur le plateau de Manivert. On attribue souvent à ce dernier le nom de la chapelle proche de Sainte-Anne de Goiron.

Le monument occupe le milieu d'une clairière à la végétation rase, entourée d'une couronne d'arbres et d'arbustes et s'élève sur les lieux des combats qui, le 12 juin 1944, ont opposé les maquisards aux troupes allemandes. Bien que voué, principalement, aux victimes de la répression du maquis des Côtes et des environs, il constitue l'un des plus importants monuments des Bouches-du-Rhône dédiés à la Résistance, du fait de son ampleur et de la longue liste des noms qu'il honore.

Il se compose d'une grande colonne de quinze mètres flanquée, à sa base, de deux ailes parallélépipédiques aux bords arrondis. L’ensemble est posé sur une dalle à laquelle on accède par quatre marches. La colonne comporte au sommet, une croix de Lorraine et, à sa base, une statue de femme en pleurs, le visage enfoui dans ses mains jointes.

Les deux ailes s’ornent de bas reliefs sculptés. Celui de gauche est consacré à trois maquisards : l’un en position de guetteur, un autre au repos et un troisième, qui, mitraillette à la main, fait, de face, le signe de la victoire. Sur le bas relief de droite, deux soldats allemands casqués tirent sur un résistant debout, vu de dos ; deux autres gisent déjà au sol.

L’autre face du socle porte deux plaques commémoratives en bronze, où figurent, au total 272 noms (271 si l’on tient compte d’un doublon) : 140 sur la première, 132 sur la seconde. Chacune est surmontée par une inscription, dans la pierre :

« Ils sont morts pour que vive la France » et « Aux héros et martyrs de la Résistance 1939-1945 ».

La liste des noms se clôt sur une exhortation :

« Ils sont morts pour nos libertés, sachons nous souvenir et soyons dignes de leur sacrifice ».

L’origine de cet ensemble de bronze est indiquée par l’inscription finale de la seconde plaque :

« posée lors de la cérémonie du 12 juin 1980, cette plaque conçue par le président JB Daumas a été coulée dans les ateliers de l’École nationale supérieure des Arts et Métiers ». De fait, elle remplace la liste primitive, gravée dans la pierre et très dégradée.

Une autre plaque apposée, le 12 juin 2010, sur un bloc face au monument fait référence à cette liste de noms :

« Sur ce monument sont gravés les noms des 272 résistants de notre région, victimes de la barbarie nazie. Leur mémoire est honorée en ce lieu, chaque 12 juin par le rappel du sacrifice des 62 d’entre eux tombés dans ces collines le 12 juin 1944 ».

La liste de noms ne se borne pas aux seuls maquisards de la Chaîne des Côtes. On y trouve des résistants arrêtés à Martigues ou à Marseille. Tous n’ont pas été tués lors des combats du 12 juin dans le massif des Côtes. C’est le cas, entre autres, de Jean Moulin. Celui-ci possédait non loin de là, à Saint-Andiol, une résidence familiale et, en janvier 1942, après son parachutage, s’était réfugié au maset de La Lèque, à Eygalières.

Le monument central est entouré d’autres stèles, individuelles ou collectives, certaines érigées à proximité de la chapelle Sainte-Anne, d’autres disséminées dans les contreforts du massif, avec des regroupements plus importants au nord, dans les lieux-dits "du Fenouillet" et "du Grand Pont", entre la Roque-d’Anthéron et Charleval.


Robert Mencherini

 

Contexte historique

L’initiative de l’érection du mémorial de Sainte-Anne revient à un « comité du canton de Lambesc et des communes environnantes » qui, à la Libération, regroupe les comités locaux de Libération (CLL) de Lambesc, Charleval, La Roque-d’Anthéron, Saint-Estève Janson, Rognes, Saint-Cannat et Mallemort. Son président est celui du CLL de Rognes, Henri Tassy. Le comité lance une souscription publique à la fin de l’année 1944 pour édifier ce monument « à la mémoire de ses héros et martyrs tombés héroïquement dans la lutte pour la Résistance aux Maquis de Cèze et Saint-Anne pour la cause de la République et de la France ».

Au début janvier 1945, ainsi qu’Henri Tassy le précise lors d’une rencontre, à Marseille, avec le comité départemental de Libération (CDL), les travaux sont déjà engagés, la colonne centrale et les bas-reliefs sont en voie de réalisation. Quatre kilomètres de route ont été aménagés. Mais les fonds levés (qui atteignent 1,4 - 1,5 millions de francs) pour lesquels le canton de Lambesc a abondé pour 375 000 francs sont insuffisants. Le comité cantonal demande donc l’aide du CDL. Celui-ci, qui se félicite chaudement de l’initiative, propose d’élargir la souscription au département, avec des appels dans la presse et suggère l’organisation de fêtes pour lever des fonds. D’ailleurs, le 25 février 1944, le CDL verse lui-même une subvention de 5 000 francs et chaque membre de son comité directeur effectue un don personnel de 100 francs. Les promesses sont suivies d’effet et l’érection du monument de Sainte-Anne est régulièrement évoquée dans la presse et dans les réunions des CLL. Une carte postale du monument est également mise en vente au prix de 10 francs.

Le comité espérait inaugurer le mémorial pour le premier anniversaire de l’attaque du maquis. Mais cet espoir est déçu. C’est seulement la première pierre qui est posée le mardi 12 juin 1945, par Amédée Remondin, maire de Lambesc. Ce jour-là, la presse note qu’une foule considérable se presse, à 18 heures, sur le lieu de la cérémonie. Il lui a fallu, pour y accéder, trois bons quarts d’heures de marche au milieu d’une végétation qui porte encore la marque des combats et de l’incendie de l’année précédente. Les maires et les présidents des CLL des communes environnantes sont présents, ainsi qu’Henri Tassy président du comité cantonal. La CGT est représentée, ainsi que la Résistance vauclusienne, en la personne du colonel Beyne. Francis Leenhardt, président du CDL, clôt les allocutions par un hommage vibrant aux maquisards.

Les diverses pièces du mémorial ont été façonnées par la marbrerie Maunier de Salon-de-Provence, dans ses ateliers, à partir des plans et d’une maquette établis par Élisée Maunier. Les bas-reliefs ont été réalisés par le sculpteur de la marbrerie, M. Zimmermann. Un GMC de l’armée a ensuite hissé les diverses pièces jusqu’au sommet de la colline. Certaines, ébauchées, sont terminées sur place, c’est le cas, par exemple de la pleureuse.

L’inauguration officielle du monument a lieu, le dimanche 16 juin 1946, à 10 heures. On retrouve, au pied de la plateforme, une foule nombreuse, les représentants des CLL et les maires voisins, rejoints par les sous-préfets d’Aix et Arles, le préfet Combes et le général Olleris, commandant de la 9e région.

Le mémorial aux héros et martyrs de la Résistance de Sainte-Anne est, tous les ans, à la date du 12 juin, le lieu de commémorations. Il est entretenu par le syndicat intercommunal qui a succédé, en janvier 1948, au comité cantonal à l’initiative de son érection. Celui-ci regroupe huit communes : Alleins, Charleval, Lambesc, Mallemort, Rognes, La Roque-d’Anthéron, Saint-Cannat, Saint-Estève-Janson. 


Auteur : Robert Mencherini

Sources :
Presse régionale, archives départementales des Bouches-du-Rhône, 9 W 13, 41 et 44 ;

documents fournis par Suzanne Gérard-Vaisse, sœur d’Henri Vaisse, tué au maquis ;

Éric Roche, site « Le maquis de Sainte-Anne », 2012 ;

témoignage de M. Jean-Marie Bertaudon, compagnon de la marbrerie Maunier.