Article du journal La Dépêche dauphinoise, 2 février 1944

Légende :

Article relatant l’exécution de deux jeunes résistants romanais de 19 ans au fort de la Duchère à Lyon.

Genre : Image

Type : Presse légale

Source : © AERD Collection Lucienne Robert Droits réservés

Détails techniques :

Coupure de presse.

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Rhône - Lyon

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Analyse média

Il s’agit d’un article du journal La Dépêche dauphinoise, organe de la démocratie du Sud-Est du 2 février 1944, relatant l’exécution de deux jeunes résistants romanais de 19 ans au fort de la Duchère, détenus à la prison Saint-Paul à Lyon. 

Transcription de l’article :

« Deux terroristes sont passés par les armes
Le 25 janvier, ils avaient déchargé leurs revolvers sur une patrouille de police. Le 1er février, la sentence a été exécutée une heure après le jugement de la Cour martiale.
Lyon (O.F.I.). – Deux terroristes, Jean Arsac et André Saullorente, condamnés à mort par la Cour martiale, ont été fusillés après que la sentence a été prononcée.
Le 25 janvier, dans une rue de Vienne (Isère), une patrouille de police interpellait deux individus suspects qui, pour toute réponse déchargèrent sur elle leurs revolvers et s’enfuirent.
Après une poursuite mouvementée et un échange de coups de feu, les deux bandits étaient finalement arrêtés. C’étaient Arsac et Saullorente, deux terroristes dangereux, capturés grâce au courage et au sang froid des forces du maintien de l’ordre.
Le 1er février, les deux bandits ont comparu devant la Cour martiale qui les a condamnés à mort. »


La presse aux ordres relate à sa façon l’exécution par la Gestapo des jeunes résistants, qualifiés de « bandits » et de « terroristes dangereux ». A contrario, elle souligne « le courage et le sang-froid des forces du maintien de l’ordre ».
Le Petit dauphinois, autre organe de la presse collaborationniste édité à Grenoble, indique que c'est une patrouille de la Milice, et non de la police comme l’écrit La Dépêche, qui a interpellé les deux hommes.


Auteurs : Robert Serre

Contexte historique

Avant le 6 juin 1944, onze résistants drômois arrêtés et détenus à la prison Saint-Paul de Lyon sont condamnés à mort par la Cour martiale et exécutés au fort de la Duchère.

Au cours d'une mission dangereuse à Vienne (Isère), le 25 janvier 1944, deux jeunes FTPF (Francs-tireurs et partisans français) romanais, Jean Arsac et André Saullorente sont surpris par les policiers alors qu'ils tentent de s'emparer, avec la complicité du personnel, des tickets d'alimentation de la mairie ; ils sont transférés à la prison Saint-Paul. 

Après avoir comparu devant une cour martiale le 1er février 1944, et comme ils ont été arrêtés avec des armes (et, selon la presse collaborationniste, parce qu’ils auraient tiré), ils sont condamnés à mort après que la cour a « délibéré » pendant « deux minutes exactement ». La sentence est exécutée une heure après le jugement par la Gestapo, au fort de la Duchère. Au vu des impacts de balles, beaucoup de GMR du peloton d’exécution ont tiré à côté. 

Les deux Drômois avaient 19 ans. 
Jean Arsac, né à Romans, engagé le 25 juillet 1943 dans le groupe-franc FTP Nord-Drôme, était le fils aîné d'Aimé Arsac, résistant actif, le frère de Raymond, et le beau-frère de René Robert, tous deux déportés. 
André Saullorente, né à Marseille, mécanicien, était un militant communiste. 


À Die le 27 février 1944 lors de l’assaut par le groupe FTPF de Paul Béranger, de Vachères, sur le collège où étaient détenus des maquisards de Creyers, 19 résistants sont arrêtés par les GMR, puis enfermés à la prison Saint-Paul à Lyon. 6 d’entre eux sont condamnés à mort le 13 mars par la Cour martiale et fusillés dans l'enceinte du fort de la Duchère, à Lyon le 15 mars 1944. Ce sont Alfred Brochot ou Brochet, André Dupuy ou Dupuis, 23 ans, ouvrier de Villeurbanne, militant des Jeunesses communistes et de la CGT, membre des Groupes francs FTP, Alexandre Flor ou Fort, William Gutschmidt ou Gotchmidt, originaire de Clichy-sous-Bois, qui avait quitté la région parisienne après l’arrestation de trois personnes de sa famille par la Gestapo, Jacques Oustando ou Gustando ou Oustenko, Vincent Vincenzo Santori ou Santoro. En outre, Robert Xima, (« Bonnefoi »), maquisard du groupe FTPF Béranger, lors de l'attaque du collège de Die, avait été blessé et hospitalisé, mais les GMR le font interner à Valence, puis l’embarquent vers Lyon, où il sera fusillé le 6 juin 1944.
On trouve deux autres Drômois fusillés à la prison Saint-Paul : Henri Recouras-Massaquant, né à Chabeuil, 22 ans, fusillé le 9 février 1944, et Pierre Ville, arrêté à Bourg-lès-Valence et fusillé le 3 mai 1944. Recouras-Massaquant, réfractaire au STO (Service du travail obligatoire), est accusé à tort de l’assassinat d’un indicateur des Allemands, lui aussi originaire de Chabeuil.


Auteurs : Robert Serre
Sources : ADD, 9 J 3, 1920 W, 132 J 30. Rapport Mme Poncet, fille de Paul Béranger, recueilli par Vincent-Beaume Martin, thèse. Thèse A. Chaffel. Pour l’amour de la France. Pons. Dufour. Virginie Sancico, La justice du pire, les cours martiales sous Vichy, Payot, décembre 2002, citant AD Yvelines, 1603 W 31. Abonnenc. La Picirella. Des indésirables. Martin. Plaque com. Romans. Monument Bozambo St-Christophe-et-le-Laris. Monument aux morts Chabeuil. Allée à Clichy-sous-Bois