Monument élevé à la mémoire des fusillés sur la commune de Condorcet

Légende :

Le 19 mars 1944, les Allemands massacrent sept personnes au hameau de Saint-Pons, commune de Condorcet.

Genre : Image

Type : Monument

Producteur : Cliché Alain Coustaury

Source : © Collection Jean Sauvageon Droits réservés

Détails techniques :

Photographie numérique en couleur.

Date document : 2006

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme

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Analyse média

Monument élevé à la mémoire des fusillés sur la commune de Condorcet, au départ de la route menant au hameau de Saint-Pons.

La stèle, simple mais solennelle, rassemble les noms de sept personnes abattues sur la petite commune de Condorcet le 19 mars 1944 : le docteur Bourdongle Jean, Gras Stanislas, Long Gustave, Montlahuc Bertin, Silan Henri, Silan Marcel, Raspail Simon.

Une plaque est également apposée sur le mur de l’ancienne école du hameau de Saint-Pons rappelle les noms des trois fusillés à cet endroit : le docteur Bourdongle, Bertin Montlahuc et Stanislas Gras.


Auteurs : Robert Serre

Contexte historique

À Nyons, le docteur Jean Bourdongle, 32 ans, marié et père d’un enfant de deux ans, président du comité directeur du Front national de la Résistance de la ville, probablement dénoncé, est arrêté une première fois le 21 janvier 1944, en même temps que 8 autres résistants et 42 Juifs, et enfermé à la prison Montluc à Lyon. Faute de preuves, il est relâché, mais Klaus Barbie, très habilement, attache à ses pas le jeune espion Joseph Barthélemy, surnommé « Marie-Louise », âgé de 17 ans, qui parvient ainsi à s’infiltrer dans le maquis de la Bessonne, au fond d’un ravin débouchant sur Condorcet.

Ce maquis, dirigé par Challan-Belval (« Pierre »), avait commencé à s’installer en décembre 1943 dans les baraques désaffectées du Chantier de Jeunesse nyonsais n° 33, puis le reste de ses hommes était venu vers la mi-février 1944.
Barthélemy séjourne trois semaines dans ce maquis, jusqu’au 3 mars 1944 et se montre assez malin pour recueillir beaucoup de renseignements sans pour autant se trahir. Le 3 mars, se disant dépressif, il demande un congé de maladie au docteur Bourdongle qui, non seulement le lui accorde, mais lui offre une centaine de francs pour payer son voyage et demande à son épouse de lui remettre un sandwich pour le trajet.
Deux semaines plus tard, le 19 mars, Joseph Barthélemy réapparaît à Nyons, plastronnant en uniforme des Chantiers de jeunesse au milieu d’une trentaine de soldats allemands qui, à 6 h du matin, viennent sonner à la porte du domicile du docteur Bourdongle. Pressentant le pire, le médecin fait disparaître sa femme et son fils avant d’ouvrir. Il est aussitôt appréhendé rudement. La maison est fouillée minutieusement, sans résultat. Bourdongle, emmené à la mairie, est interrogé brutalement, torturé même ainsi qu’en feront foi les taches de sang laissées dans la pièce et les traces et blessures relevées sur son corps.
Mais le véritable objectif des Allemands est de détruire le maquis Pierre. Une colonne de 250 hommes, dans 9 camions et 3 voitures (dont une immatriculée dans le Rhône) part de Nyons appuyée par une automitrailleuse et trois canons de 37 mm. Bourdongle est dans un des camions. À Aubres, la colonne se scinde en deux : pour prendre les maquisards en tenaille, un groupe monte par le col d’Aubres, l’autre par les Pilles et Condorcet.
Par chance, les maquisards installés dans le camp, ont déménagé depuis la veille. Furieux, les nazis se précipitent dans le café-épicerie de Bertin Montlahuc, 30 ans, qui ravitaillait les résistants et leur servait d’agent de liaison, utilisant son laissez-passer pour des transports de provisions alimentaires, d’armes et munitions. Ils s’en saisissent, ainsi que du maçon Gustave Long qu’ils joignent à Bourdongle. Ils volent l’argent et les bijoux de madame Montlahuc. Puis ils mettent le feu à la maison à l’aide d’une grenade incendiaire. Repartant vers le nord, ils abattent au passage le jeune berger Simon Raspail, 11 ans ½, encore écolier. Au hameau de Saint-Pons, ils incendient les fermes Silan et Gras. Les Allemands questionnent Stanislas Gras, 57 ans, qui refuse de dénoncer le maquis de Saint-Pons. Ils capturent aussi Henri Silan, 44 ans, et son fils Marcel Silan, 21 ans, tous deux cultivateurs dans le hameau. Les corps de Long et des Silan père et fils seront retrouvés partiellement brûlés dans la ferme. Seuls le fils Gras, Marcel, et l’ouvrier Pellagati ont réussi à s'enfuir. Poursuivant leur œuvre, les nazis incendient les baraques des Chantiers de jeunesse où avait séjourné le maquis. Puis, après les avoir odieusement torturés, ils abattent au fusil-mitrailleur, contre le mur de l’école du hameau, le docteur Bourdongle, Bertin Montlahuc et Stanislas Gras.

Sept morts, cinq fermes, l’école, une maison et les baraques du CJ 33 incendiées, argent, bijoux, bétail, matériel, véhicule volés, tel est le bilan de ce passage. « Marie-Louise » (le « mouton »), ne tardera pas à sentir le vent tourner et à s’engager dans la Waffen SS qui l’envoie combattre sur le front russe. Capturé et identifié lors de la débâcle finale, il est renvoyé en France et traduit en Cour de justice à Lyon en octobre 1946. Son attitude au tribunal est odieuse, pleine de morgue, provocante. Il est condamné à mort. Mais le jugement sera cassé et la peine commuée en travaux forcés à perpétuité. Transféré à la prison de Riom (Puy-de-Dôme), il sera gracié et libéré quelques années plus tard.


Auteurs : Robert Serre
Sources : AN, BCRA, 3AG2/478-171Mi189. ADR, 3808 W 280. ADD, 1920 W. La Drôme en armes, n° 4 du 5 septembre 1944 (article d’Andrée Viollis et d’Aragon). Thèse de Francis Barbe, 2007, 12 pages. Pour l’amour de la France. Challan-Belval. Thèse Patrick Martin. Burles, La Résistance et les maquis en Drôme-sud. Thèse A. Chaffel. Vilhet. Schmitt, Bourdongle. Toesca, Mémoires, sd. La Picirella. Dufour. Terre d’Eygues n° 13. Monument St-Pons de Condorcet, Roche-Saint-Secret-Béconne, Sahune, Les Pilles. Une place de Nyons porte le nom de Bourdongle.