Article "Les martyrs de la Résistance - Marcel Clech", signé J. Meunier

Légende :

Article de presse intitulé "Les martyrs de la Résistance - Marcel Clech", signé Jean Meunier, sans date

Genre : Image

Type : Article de journal

Source : © Archives municipales de Tours - Fonds Jean Meunier 5Z36/46 Droits réservés

Détails techniques :

Article de presse découpé, papier journal 5 x 27,5.

Date document : Sans date

Lieu : France - Centre - Val-de-Loire (Centre) - Indre-et-Loire - Tours

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Analyse média

Dans cet article de presse, Jean Meunier rend hommage au résistant breton Marcel Clech, "l'une des figures les plus pures de l'armée clandestine", arrêté à l'automne 1943 et dont le décès venait d'être officialisé.

Meunier retrace alors le parcours résistant de Marcel Clech : dès juin 1940, il avait gagné l'Angleterre, où il avait été chargé de missions périlleuses. Suite à un accident de parachute, il exerca les fonctions d'opérateur radio pour le compte des services alliés, SOE en particulier, qui le chargèrent des transmissions dans la région Ouest et l'établirent pour ce faire en Touraine.
Jean Meunier relate que, début 1942, Marcel Clech, sous le pseudonyme de "Georges 60", se présenta chez lui. Il fallut, raconte-t-il, l'installer et lui établir un faux état-civil... et même camoufler une cicatrice visible qui aurait pu le trahir... Son poste émetteur-récepteur fut installé rue de la Tour-d'Auvergne, chez un certain M. Cornic, expert-comptable que Meunier connaissait. La connexion avec Londres était établie.

Meunier raconte ensuite comment, au moment-même où Marcel Clech émettait vers Londres, un avion allemand survola la zone et l'identifia grâce à la goniométrie. Quelques minutes plus tard, le quartier fut encerclé par les Allemands, qui procédèrent à des fouilles poussées et à l'arrestation de quelques personnes sans lien avec les événements. Le poste émetteur-récepteur fut déplacé à plusieurs reprises dans Tours, mais la goniométrie allemande parvint à le localiser à chaque fois.

Marcel Clech fut rappelé à Londres, avant de revenir en France, où Meunier put l'apercevoir pour la dernière fois. Quelque temps après, établi à Boulogne-Billancourt, il fut arrêté en pleine émission, après une trahison. Personne ne le revit. Marcel Clech laissait derrière lui son épouse et leurs deux filles. Marcel Clech fut remplacé dans ses fonctions par Marcel Dubois, "Hercule", arrêté à son tour.

Jean Meunier rappelle enfin toutes les qualités qui étaient les siennes : efficacité, discrétion et amour de la France et de la liberté.

Les archives du SOE permettent de compléter ce portrait, tout en rectifiant un peu la chronologie: il semble que ce soit plutôt à la mi-1942 que Jean Meunier ait commencé à travailler avec Marcel Clech

Marcel Clech était chauffeur de taxi avant la guerre. Au total, il fut envoyé trois fois en France par le SOE: une première mission, dès août 1940, avorta car la vedette qui devait le transporter sur les côtes de la Manche dut rebrousser chemin. La deuxième commença en avril 1942: débarqué sur la côte méditerranéenne, il passa par Lyon pour rejoindre à Paris le réseau Autogiro comme opérateur radio; mais, apprenant qu'une arrestation était survenue à l'intérieur de ce réseau, il changea d'objectif. Après être demeuré un mois à Clermont-Ferrand, il se mit au service d'un autre réseau, Monkeypuzzle, qui opérait dans le Centre,

C'est à ce moment que le lien avec Jean Meunier s'établit, par le biais de la famille Aron, semble-t-il. Jean Aron était membre du SOE à Lyon, et son frère Emile, médecin à Tours. D'après le témoignage de Jean Meunier devant la CHOLF, c'est Emile qui lui laissa un message lui recommandant un radio "Georges 60".  Clech vint donc à Tours et, pris en charge par Meunier, put émettre jusqu'à la fin de l'année 1942. A ce moment-là, repéré, il se cacha puis finit par être exfiltré vers Londres le 14 avril 1943.

Marcel Clech revint pour une troisième mission en France dès le 14 mai 1943, par avion Lysander cette fois, comme radio de deux autres réseaux du SOE : Inventor et Donkeyman. Il fut arrêté à l'automne 1943; pour la date, les sources varient entre septembre et novembre et les circonstances exactes de son arrestation restent encore aujourd'hui à éclaircir.

On sait aujourd'hui qu'il fut un détenu classé "Nuit et Brouillard" par la Sipo-SD, ce qui explique qu'on n'ait plus eu de nouvelles de lui: pour ces résistants considérés comme les plus dangereux, toute communication avec la famille était interdite. De la prison de Fresnes, il fut déporté le 6 décembre 1943 vers le camp de transit de Neue Bremm, et quelques jours après au camp de Mauthausen. Il fut affecté au kommando (camp rattaché) d'Ebensee, où les déportés travaillaient dans des tunnels pour créer une usine souterraine, il y fut exécuté le 14 mars 1944, pour un motif inconnu.                                                                                                                                                              

 


Paulina Brault et Bruno Leroux

Sources:   dossier personnel de Marcel Clech au Public Record Office, fonds du SOE (HS9/324/4); Michael Foot, Des Anglais dans la Résistance. Le service britannique d'action SOE en France 1940-1944, Tallandier, 2008;  témoignage de Jean Meunier recueilli par Odette Merlat pour la Commission d'Histoire de l'Occupation et de la Libération de la France,  le 22 mai 1947 (AN 72 AJ/135); "base de données des déportés de France par mesure de répression" de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation.