Brassard de l'Union des femmes françaises - Ile-de-France

Genre : Image

Type : Brassard

Source : © Collection Maurice Bleicher Droits réservés

Détails techniques :

Brassard en tissu avec écusson

Date document : 1944-1945

Lieu : France - Ile-de-France

Ajouter au bloc-notes

Analyse média

L'écusson cousu sur le brassard tricolore porte l'inscription "Union des Femmes Françaises - Ile-de-France". En son centre figure le navire, symbole de Paris.

Ce navire est le symbole de la puissante corporation des Nautes ou des Marchands de l'eau, très importante dans la ville durant l'Antiquité. La devise de la ville, « Fluctuat nec mergitur » (« Est battu par les flots mais jamais ne sombre »), est également une référence à ce bateau.


Fabrice Bourrée

Contexte historique

"Il est créé une organisation prenant la dénomination de " Union des Femmes Françaises " pour la défense de la famille, la Libération et la Reconstruction de la France, et qui sera régie par la loi du 1er juillet 1901 (…)". Ainsi est rédigé l'article premier des statuts de l'UFF, déclarés à la préfecture le 15 avril 1945. Association féminine, proche du parti communiste, cette organisation est née dans la clandestinité. Ce contexte particulier et l'absence d'archives internes, ne permettent pas de retranscrire de façon concise sa genèse. Bien que cela reste parfois insatisfaisant, il est néanmoins possible de confronter les témoignages des actrices de cette histoire et les archives disponibles pour lancer quelques pistes.

Une structuration progressive

"Il fallait donc se préoccuper de ces femmes, empêcher qu'elles n'acceptent la "fatalité" de cette situation. Il fallait les informer, leur expliquer les raisons de leurs malheurs, et, en même temps, leur faire entrevoir la sortie du tunnel dont le chemin obscur serait sans doute long et tortueux, semé d'embûches et de sacrifices. Pour cela, avec elles, à partir de ce qu'elles vivaient, et pour des objectifs en apparence terre à terre, commencer à protester, à agir". Le témoignage d'Yvonne Dumont est significatif de la volonté des dirigeants communistes pendant l'Occupation de mobiliser les femmes. Au travers de tracts, de papillons, de journaux clandestins se déclinent les mots d'ordre d'une propagande clairement orientée vers les femmes et plus spécifiquement vers les "ménagères".
Les efforts des communistes se sont d'abord portés sur les femmes de prisonniers. Sous l'impulsion de Danielle Casanova, plusieurs dirigeantes des organisations féminines d'avant-guerre tentent de les rassembler autour de revendications très concrètes : le retour des prisonniers, l'augmentation de l'allocation militaire, un droit de correspondance régulier, d'expédition de colis etc. Elles organisent des manifestations, font signer des pétitions, un journal est même diffusé : Le Trait d'union. A partir de l'été 1941, des comités populaires ou féminins se mettent en place, un mouvement encadré par des dirigeantes aguerries au "travail en direction des femmes", sous la direction de Danielle Casanova. Ce mouvement se structure graduellement, de petits comités se forment localement, puis une direction régionale se met en place et enfin une direction dans chaque zone fédère les différents groupes. Dans ses mémoires, Lise London décrit assez précisément le fonctionnement des comités : "Nos comités féminins étaient organisés sur le modèle du Parti communiste, par groupes de trois femmes dont une seule était en contact avec une responsable du triangle de la direction locale. C'était ainsi du bas au haut de l'échelle". Un témoignage confirmé par celui de Josette Dumeix : "Trois femmes forment un groupe. Plusieurs groupes d'un quartier ou d'une ville sont dirigés par trois femmes, celles-ci sont en relation avec une responsable départementale. Ces responsables sont en liaison permanente avec une responsable interdépartementale regroupant 6 à 10 département". En zone nord, les comités féminins sont rassemblés au sein l'Union des Femmes Françaises pour la Libération de la France et dans la zone sud, ils sont fédérés au sein de l'Union des Comités des Femmes de France dont la direction est installée à Lyon. Même si ces comités réunissent des femmes d'origines et d'horizons différents, dans les deux zones, les organisations sont dirigées par des militantes expérimentées proches du parti communiste. Elles assurent les fonctions d'encadrement de l'organisation. La zone nord est placée, dans un premier temps sous la responsabilité de Danielle Casanova jusqu'à son arrestation en février 1942. Elle est alors remplacée par Yvonne Dumeix puis par Claudine Michaut et Maria Rabaté. En zone sud, les deux responsables sont Marcelle Barjonet et Simone Bertrand. Le nom de l'organisation tel qu'il fut maintenu à la Libération, Union des Femmes Françaises, apparaît pour la première fois en novembre 1943 dans le journal La Patriote parisienne qui contient un article intitulé : "Qu'est-ce que l'Union des Femmes Françaises ?". Cette organisation ne désigne alors que les éléments de la Zone Nord.
Parmi les dirigeantes, nombre d'entre elles sont issues de l'Union des Jeunes Filles de France, une organisation de masse du PCF créée en 1936 et animée notamment par Danièle Casanova, Claudine Michaut (Chomat) et Jeannette Vermeersch. Dans les divers témoignages de résistantes communistes, le passage par l'UJFF est d'ailleurs très fréquemment évoqué comme un épisode les ayant naturellement conduites à entrer dans la résistance. Ce combat n'étant que la suite logique de celui qu'elles avaient porté pour soutenir les Républicains espagnols. Pourtant l'UJFF ne fut pas le seul vivier de militantes. En effet, certaines dirigeantes militaient avant la guerre dans une autre organisation : le Comité mondial des Femmes contre la guerre et le fascisme. Présidé par Gabrielle Duchêne, une compagne de route du PCF, il visait à mobiliser des femmes, de diverses tendances politiques ou origines sociales contre la guerre, le fascisme et contre "toutes les atteintes portées aux conditions matérielles et morales d'existence des femmes". Le comité a d'ailleurs de nombreux liens avec les organisations féminines de cette période que ce soit avec les féministes ou les catholiques. Maria Rabaté était la secrétaire du comité français et d'autres résistantes en étaient membres comme Simone Bertrand ou Rose Guérin. A la Libération, ce comité tombe pratiquement dans l'oubli. Après la guerre, les dirigeantes de l'UFF ont pourtant beaucoup exalté le rôle des femmes dans la résistance et plus particulièrement celui des jeunes filles de l'UJFF mais le comité mondial des femmes contre la guerre et le fascisme n'a occupé qu'une place très restreinte dans la mémoire communiste. A cet égard, Renée Rousseau soulève une hypothèse intéressante : "Cet oubli est peut-être le résultat de certaines frictions personnelles, mais surtout du désir de faire apparaître le mouvement féminin du parti comme directement issu de la Résistance et non lié à l'Internationale Communiste comme le Comité mondial".

Les actions

Les comités féminins sont orientées vers la propagande et cela de façon constante. Ils impulsent des manifestations, publient et distribuent une presse clandestine et organisent également la solidarité autour des familles touchées par la répression. Le travail de propagande des communistes en direction des femmes est très fréquemment évoqué dans les rapports des Renseignements généraux de la Préfecture de police. Un rapport daté du 1er mars 1943, dresse le constat suivant : "Le même effort de propagande est tenté parmi les femmes afin de les amener à constituer des " Comités féminins " et des " Comités de défense de la famille " sous couvert desquels ils voudraient les entraîner à l'action pour empêcher leurs maris, pères, fils, frères et fiancés de partir pour l'Allemagne. Ils s'efforcent également de les amener à manifester dans les mairies pour exiger un meilleur ravitaillement, des vêtements et des chaussures pour les enfants". Quelques mois plus tard, en décembre, les rapports confirment et même insistent sur cet aspect de l'action des communistes : "C'est au développement de l'agitation parmi les femmes que les communistes ont consacré la plus grande partie de leur propagande. Ils persistent à penser que l'agitation parmi les femmes peut avoir, dans les circonstances actuelles une importance considérable, en raison des domaines où elle peut s'exercer et aussi de la combativité dont les femmes font preuve " lorsqu'elles sont engagées dans l'action ". Dans ce but ils ont conseillé à leurs responsables d'apporter tout leur concours à l'action féminine en prenant soin de ne pas engager seulement les femmes communistes, mais le plus grand nombre possible de ménagères apolitiques. La forme de l'action des femmes doit, selon les directives communistes avoir toujours un caractère spontané pour être suivie, car, disent-ils, "dans leur ensemble, les ménagères sont peu perméables à la propagande politique. Il importe donc de provoquer sur les marchés, dans les salles de spectacles etc., des manifestations d'apparence spontanée et de les étendre ensuite".
Ces rapports recoupent les témoignages de nombreuses militantes sur plusieurs points : d'une part, sur le souci clairement exprimé de s'appuyer sur des revendications très concrètes pour mobiliser les femmes et d'autre part, sur la nécessité de traduire leur mécontentement dans des manifestations. Les mots d'ordre diffusés dans la presse féminine clandestine, sur des tracts ou des papillons, sont en effet toujours en lien avec la vie quotidienne des "ménagères" : l'augmentation de la ration de pain, du charbon, de la viande, des chaussures pour les enfants etc.
Certains évènements comme la célébration de la fête des mères sont propices à la diffusion de ces idées. Quant aux manifestations de ménagères, elles se déroulent souvent de la même façon : les femmes se réunissent sur la place du marché pour réclamer par exemple du lait pour les enfants, elles se dirigent en cortège en direction de la mairie et demandent qu'une délégation soit reçue par le maire ou tout autre représentant des pouvoirs publics. Deux manifestations, parisiennes, bénéficient d'une place importante dans la mémoire collective. La première, celle de la rue de Buci, s'est déroulée le 2 juin 1942. Madeleine Marzin en est la principale protagoniste, arrêtée puis condamnée à mort, elle parvient à s'échapper à la gare Montparnasse. La seconde, celle de la rue Daguerre a lieu la 1er août 1942. Lise London, accompagnée par des membres des FTP prend la parole au cours de cette manifestation qui s'accompagne du pillage d'un magasin Félix Potin. Elle est condamnée à mort mais n'est pas exécutée car elle est enceinte.
Les comités éditent aussi, à différents échelons locaux, des journaux aux noms divers : La ménagère parisienne est l'organe de l'Union des Femmes Françaises de la région parisienne, La voix des Femmes, est publié par l'UFF de la banlieue sud. En province aussi divers journaux clandestins sont diffusés : Les Mariannes dans le Nord Pas de Calais, Le cri des mères dans la Drôme et l'Ardèche, Femmes de France dans le Var, etc. Pendant cette période se multiplient les journaux clandestins adressés aux femmes, chaque comité essaie de diffuser un journal. Des tracts sont également distribués dans les queues devant les magasins ou sur les marchés.
Les comités féminins regroupent dans un premier temps essentiellement des femmes communistes ou proches du parti, mais rassemblent progressivement des femmes au-delà de ce cercle. La volonté de recruter bien plus largement que dans les seuls rangs communistes se retrouve par exemple dans l'appel lancé aux femmes catholiques à Lyon en décembre 1943, un appel qui aurait été diffusé à la radio de Londres. En revanche, les dirigeantes restent des militantes expérimentées même si la répression force l'organisation à confier des responsabilités à de nouvelles adhérentes.

Le tournant de l'année 1944

Au début de l'année 1944, l'action de l'UFF s'intensifie et s'oriente vers un nouveau type d'activités. En effet, un appel des FTP est lancé en direction de l'UFF pour que cette organisation leur apporte aide et soutien. Ils demandent que 10 ou 20 % (selon les sources) des effectifs féminins soient affectés au travail avec les FTP. Il semble que cet appel ait suscité de vives réactions au sein de la direction du PCF. L'extrait de ce rapport des services des renseignements généraux, daté du 2 mars 1944, en témoigne : "Le désaccord qui oppose, au sein du Parti Communiste, les militants de la branche dite "politique" à ceux de la branche "militaire" (FTP), déjà signalé à maintes reprises, tend à s'aggraver (..). Une nouvelle preuve de ce désaccord vient de se manifester au sujet des femmes auxquelles les FTP font de plus en plus appel pour les tâches secondaires, de manière à pouvoir utiliser comme combattants, tous les hommes disponibles. (…)Les militants de la branche politique estiment que l'action des femmes sur le plan politique et surtout revendicatif est capitale pour le Parti en raison de l'accueil favorable qu'elle rencontre généralement dans la population et de l'influence qu'elle exerce sur les ouvriers des usines, notamment en ce qui concerne le ravitaillement. En conséquence ils jugent que les femmes doivent être organisées au sein de l'Union des Femmes Françaises et entraînées à l'action par des démonstrations spectaculaires, telles que les manifestations devant les mairies, préfectures, maisons de prisonniers etc.(..)". D'après cet extrait du numéro d'avril 1944 de La Vie du Parti, il apparaît que la demande des FTPF a été transmise : "Les femmes communistes ont le devoir de passer les 20% de leurs effectifs et cadres aux FTPF. Chaque fois que les organisations combattantes formulent des demandes de personnel féminin, il faut résolument [souligné dans le texte] tout faire pour satisfaire ces demandes, sans s'arrêter à ces considérations que cela peut démolir les rouages de l'organisation féminine. Il est possible de trouver les forces nécessaires pour réaliser toutes les tâches.(..)"
L'Union des Femmes Françaises de la Zone Nord était adhérente au Front National, elle se dote au printemps 1944 d'un comité directeur. Le 11 juin 1944 une réunion clandestine a lieu au collège de jeunes filles de Sainte Marie de Passy, elle réunit des dirigeantes de l'organisation de la zone nord et celles-ci désignent un comité directeur réunissant notamment : Marie Bell, Marie Couette, Eugénie Cotton, Hélène Gosset, Irène Joliot-Curie, Françoise Leclercq, Claudine Michaut, Maria Rabaté, Edith Thomas. Parallèlement une réunion de l'Union des Comités des Femmes de France se tient à Lyon, le 6 mai 1944, en présence de Claudine Chomat. C'est à cette époque que les contacts entre les dirigeantes des deux zones se multiplient.
L'Union des Femmes Françaises organise une seconde réunion au cours de laquelle des consignes et directives sont établies en vue de mieux structurer l'organisation mais aussi de préparer l'insurrection. Les femmes sont appelées à y participer, comme en témoigne le texte de cette affiche non datée mais signée par "l'Union des Femmes Françaises pour la défense de la Famille et pour la libération de la France" : "A l'heure où vient la délivrance, l'Union des Femmes Françaises par la voix de son comité directeur, qui groupe les femmes venues de tous les horizons sociaux, religieux et politiques, vous convie à réaliser l'Union indispensable pour mener le combat libérateur. Groupant déjà des milliers de femmes, l'Union des Femmes Françaises s'est fait connaître au cours de ces quatre années d'occupation par l'aide qu'elle n'a cessé d'apporter aux familles de prisonniers, fusillés, réfugiés, sinistrés, aux réfractaires et Francs-Tireurs-Partisans français. Aujourd'hui, veillée d'armes, l'Union des Femmes Françaises demande à toutes les femmes patriotes qui ne veulent pas attendre passivement que la libération leur vienne de l'extérieur, de rejoindre ses rangs. Femmes, vous avez un grand rôle à jouer aujourd'hui et demain dans une France libérée où l'on reconnaîtra vos droits. Dès maintenant répondez aux appels du Gouvernement provisoire de la République et du Conseil National de la Résistance. Apportez aux combattants d'aujourd'hui et demain toute l'aide qu'ils réclament, tout la sollicitude qu'ils sont en droit d'attendre de vous, considérez-vous comme mobilisées au service de la Patrie blessée, trahie, appauvrie mais toujours vivante et qui va renaître dans toute sa gloire au travers des combats (..)". Dans les zones libérées des Comités départementaux de Libération sont mis en place et des représentantes de l'UFF en font partie. Une présence qui prouve la reconnaissance de l'action de cette organisation et qui fonde sa demande d'adhésion au Conseil National de la Résistance. Le texte de cette requête, non daté, permet de saisir les arguments avancés : l'organisation rappelle d'abord qu'"aucune organisation féminine de la Résistance n'a été reconnue par le Conseil National de la Résistance", souligne ensuite la place des femmes dans le combat contre l'occupant et le sacrifice de certaines d'entre elles. Elle évoque enfin le droit de vote qui vient de leur être accordé en vertu de l'ordonnance du 21 avril 1944. La lettre se termine en ces termes : "A une heure extrêmement grave pour notre pays, nous estimons que les femmes de France doivent avoir dans les organes dirigeants de la Résistance la place que leur méritent leur action quotidienne et leur héroïsme. C'est pourquoi, l'Union des Femmes Françaises, organisation féminine de Résistance demande à être reconnue directement par le Conseil National de la Résistance".
La requête de l'UFF est rejetée par le CNR en raison de son appartenance au Front National. Selon William Guéraiche, ce refus s'expliquerait par la crainte des membres du CNR de voir les communistes devenir majoritaires dans cet organisme par leur présence dans des groupements proches du parti.

Le premier congrès

En octobre 1944, les deux branches de l'organisation se réunissent pour créer une seule et même structure. Dans une salle de la mairie de Clichy, rassemblant les deux comités directeurs, se tiennent des journées d'étude de l'Union des Femmes Françaises. Quatre objectifs sont fixés aux déléguées des divers départements : l'Aide au Front, l'amélioration du ravitaillement, l'action pour la reprise économique et l'effort de guerre, la défense de la famille et enfin la renaissance de la France. Quelques mois plus tard, l'organisation édite une première brochure, intitulée "8 mois de travail de l'Union des Femmes Françaises", dans laquelle les dirigeantes dressent un premier bilan de l'action menée. Concernant les questions d'organisation, plusieurs branches d'activité sont mises en place : les comités UFF, les groupes des "Amies du Front", les "Comités de ménagères" et ceux de "l'Assistance française". Le rapport annonce 1.018.446 adhérentes à l'UFF ou à l'une de ses branches et souligne également la présence des déléguées de l'UFF dans les diverses structures instaurées à la Libération. Il avance que 90 déléguées de l'UFF font partie des Comités départementaux de Libération, que 1.562 sont présentes dans les Comités locaux de Libération, que 1.161 sont conseillères municipales, six sont conseillères générales et neuf sont maires (il est précisé que ces chiffres datent d'avant les élections municipales d'avril et mai 1945).
Le premier congrès de l'Union des Femmes Françaises s'ouvre le 17 juin 1945 à la salle de la Mutualité à Paris. Placé symboliquement sous la triple présidence de Danielle Casanova (la communiste), Berthie Albrecht (la chrétienne) et Suzanne Buisson (la socialiste), ce congrès se veut celui de l'union. La composition du premier bureau directeur de l'UFF, élu lors de ce congrès en est l'illustration. Il réunit des femmes communistes, souvent membres du Comité Central du PCF comme Claudine Michaut, Jeannette Vermeersch ou Marie-Claude Vaillant-Couturier et des femmes non communistes à l'exemple d'Eugénie Cotton, Jenny Roudinesco ou Elisabeth de la Bourdonnaye. Les communistes restent majoritaires mais font preuve d'ouverture. Les dirigeantes entendent mettre en place une organisation de masse ouverte à toutes les Françaises.
Au cours de ce premier congrès, Yvonne Dumont, chargée des questions d'organisation, affirme qu'il existe alors 4.405 comités de base répartis dans 87 départements. Son intervention intitulée "Vers le deuxième millions d'adhérentes !", tend à démontrer que l'organisation en regroupe alors plus d'un million. Ce chiffre officiel doit être considéré avec beaucoup de réserve mais le succès de l'organisation au moment de la Libération et dans les mois qui ont suivi est réel. Il n'existe alors aucune autre organisation féminine capable de réunir autant de militantes. A l'issue de ce premier congrès, plusieurs mots d'ordre sont lancés en direction des femmes dans une brochure intitulée : "Par notre travail et notre union assurons le bonheur et la sécurité de nos foyers dans une France grande et démocratique".
Quatre thématiques sont présentées : la nécessité de se mobiliser en faveur de l'instauration d'une république démocratique, d'agir pour la promotion et la protection de la famille, de participer à la renaissance matérielle et morale du pays et enfin de lutter contre fascisme. C'est d'ailleurs dans cette perspective qu'est lancée une initiative internationale : la création d'une organisation rassemblant les femmes du monde entier pour lutter contre la perspective d'une nouvelle guerre et agir contre le fascisme. Des discussions et rencontres ont donné naissance à la Fédération Démocratique Internationale des Femmes en 1945.
Au cours des mois qui suivent la libération du pays, l'UFF connaît un véritable engouement et parvient à rassembler des femmes bien au-delà du cercle des communistes ou des sympathisantes. Le contexte politique international et national entraîne, à partir de 1947, une baisse importante du nombre d'adhérentes.
Le début de la guerre froide et la démission des ministres communistes provoquent une crispation des positions qui se répercutent sur l'UFF. Pourtant l'organisation continue d'exister et d'être active, notamment dans la combat pour la Paix.
Avant même la création officielle de cette organisation, les dirigeantes ont tenu à entretenir la mémoire des femmes qui se sont engagées dans le combat contre l'occupant. Il s'agit d'un élément récurrent dans l'histoire de cette organisation qui a longtemps fait reposer sa légitimité sur cet engagement. Dans tous ses congrès, les photos des "martyres" sont exposées, l'agenda cérémoniel est ponctué par des commémorations liées à cette période. Danielle Casanova, présentée comme l'une des fondatrices de l'organisation occupe une place particulière dans sa mémoire. Le souvenir de la Résistance est constamment mobilisé dans leurs différents combats : dans la lutte pour la paix, dans le combat contre la Comité européenne de Défense, dans les discours contre la guerre d'Algérie… Elle est un élément constitutif de l'organisation.


Auteur : Gisèle Sapiro in DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004

Sources et bibliographie :
Archives de la Préfecture de Police de la ville de Paris, BA 2068 (Dossier Parti Communiste Français, Correspondance janvier-juin 1943) ; BA 2070 (Dossier Parti Communiste Français, Correspondance 1944).
Archives du Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Claudine Chomat-Laurent Casanova, carton 1 ; Fonds UFF (7 cartons).
Les femmes dans la Résistance, actes du colloque de l'Union des Femmes Françaises de novembre 1973, Paris, Editions du Rocher, 1977.
8 mois de travail de l'Union des Femmes Françaises, brochure édités par l'UFF, 1945. M.Gilzmer, C. Lévisse-Touzé, S.Martens, Les femmes dans résistance en France, Paris, Taillandier, 2003.
William Guéraiche, Les femmes et la République, Paris, Editions de l'Atelier/Editions ouvrières, 1999.
Renée Rousseau, Les femmes rouges. Chronique des années Vermeersch, Paris, Albin Michel, 1983.
Sylvie Chaperon, Les années Beauvoir. 1945-1970, Paris, Fayard, 2000.
Lise London, La mégère de la rue Daguerre, Paris, Seuil, 1995.
Entretien de Sandra Fayolle et Emmanuel Debono avec Lise London, juillet 2003.