Jean Saussac
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Jean Saussac, artiste-peintre, décorateur de théâtre et de cinéma ; résistant ; militant communiste ; maire d’Antraïgues-sur-Volane (Ardèche) de 1965 à 1977 ; initiateur des « Nuits d’Antraïgues » et des « Banquets républicains »
Genre : Image
Source :
Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Ardèche
Contexte historique
Jean Saussac est né le 28 février 1922 à Paris, et décédé le 13 février 2005 à Aubenas (Ardèche).
Réfractaire au STO, il interrompit ses études, regagna l’Ardèche en 1943 où il entra dans les FTP (Antraïgues fut choisi comme siège de l’état-major unifié de la Résistance départementale fin juillet 1944). Il adhéra au communisme, fut encarté à l’UJRF et au PCF.
Jean Saussac avait réalisé sa première exposition à Antraïgues à l’âge de seize ans, ce qui lui valut le surnom de « lou pintre » attribué par les villageois. Il commença à se consacrer à son art à partir de 1943. De 1945 à 1947, il mena une vie semi-bohème à Paris, fréquenta l’Académie du Montparnasse d’André Lhote, tout en gagnant sa vie en faisant des portraits rapides aux terrasses des cafés et brasseries. Il fut sélectionné au Prix de la jeune peinture « Drouand-David » à la Biennale de Menton, revint à Antraïgues en 1948 et commença à vendre ses premières œuvres.
Il partagea désormais son temps entre sa carrière artistique, son militantisme politique, et pendant une courte période, l’enseignement pour pouvoir survivre. Il fut ainsi auxiliaire d’anglais au collège des Vans puis de dessin au lycée de Montélimar. Il fut un temps rédacteur dans les colonnes du journal communiste Rouge Midi. Son village ardéchois devint pour lui une base dont il s’éloignait souvent pour mieux y revenir.
Les expositions des œuvres de Jean Saussac dans une vingtaine de localités, petits villages et grandes villes, lui permirent de s’affirmer dans le milieu artistique. Marseille et la Galerie Da Sylva, où il exposa en 1949, 1952, 1954 et 1957, jouèrent un rôle important dans son ascension vers une notoriété qui lui assura une grande indépendance. Il rencontra à Marseille les peintres Ambrogiani, Ferrari, Babouleine, Mélik. Il devint l’ami de Claudius Chaveau, patron de la marque de peinture pour artistes Pébéo, qui lui apporta son soutien.
Dans la période de guerre froide, ses convictions communistes le conduisirent à s’engager dans la lutte pour la paix et le désarmement nucléaire. En octobre 1950, il fut parmi les plus actifs Combattants de la paix et de la liberté (futur Mouvement de la Paix) dans la campagne pétitionnaire pour l’Appel de Stockholm. Il intervint aux Assises départementales de la paix qui se tinrent à Privas le 29 octobre 1950, en présence de 500 délégués, où il présenta un plan de travail en cinq points (« action tournée vers la jeunesse ; défense plus nette de la Liberté ; création d’une milice des combattants de la Paix ; parcours itinérant avec exposition sur les malheurs de la guerre ; manifestation culturelle pour la Paix »). Cette dernière proposition fut reprise par le Mouvement de la paix et devint une tradition pour l’organisation.
Le travail de création de Jean Saussac ne se limitait pas à la peinture sur chevalet. Très tôt, il avait réalisé des décorations murales (fresques et mosaïques) et illustré pour des éditeurs des œuvres littéraires (Les Fleurs du mal de Baudelaire, Ardèche Douce-Amère d’André Griffon, recueils de poèmes d’Alain Borne). Dans les années soixante, son art s’épanouit dans la création de décors, de costumes, d’affiches pour le théâtre, le cinéma, le music-hall. Ses commanditaires et amis s’appelaient Jean Dasté, Gabriel Monnet, Jo Lavaudant, Robert Enrico.
En 1965, aux élections municipales, Jean Saussac prit la tête d’une liste d’union de la gauche dans son village d’Antraïgues et l’emporta. Il demeura maire de la localité jusqu’en 1977, date à laquelle lui succéda un médecin communiste, Michel Beyssade. Les liens affectifs de Saussac avec la population étaient forts. Il transforma la vie du village cévenol en proie à un exode rural continu et en fit une petite république - refuge pour ses amis artistes progressistes. L’installation de Jean Ferrat et Christine Sèvres en 1964 fut un tournant dans la vie de la commune. En 1971, Saussac fit entrer son ami dans le conseil municipal comme adjoint à la Culture. D’autres artistes s’étaient agrégés au village, notamment Catherine Sauvage, Francesca Solleville, Isabelle Aubret. Dès 1966, Saussac avait initié un festival populaire, « Les nuits d’Antraïgues ». Aux côtés de Ferrat, Pierre Brasseur, Jacques Brel, Lino Ventura, Claude Nougaro, Alain Leprest comptèrent au nombre de ses invités.
Jean Saussac, qui avait son franc-parler sur son organisation politique, ne décrocha jamais du Parti communiste. En 1997, alors qu’il n’avait plus de mandat d’élu, il proposa de remplacer la fête traditionnelle du parti dans le village par une formule ouverte de « banquet républicain » qui, d’année en année, fit événement, jusqu’au décès du peintre en 2005. L’Humanité du 11 août 2003 commentait en ces termes l’édition de 2003 où étaient présents Marie-Georges Buffet, Alain Bocquet, Roger Hanin : « 800 convives ont trouvé une place, mais un millier de demandes n’ont pu être satisfaites. Etrange rendez-vous tout de même que celui-ci, pour lequel on se presse sur la place de la Résistance, tout en haut de la commune, entre église aux allures romanes et restaurant « La montagne » (…) Temps suspendu quand une belle voix s’élève : "quand les hommes vivront d’amour, il n’y aura plus de frontières". Qu’en pensent les Palestiniens présents dont l’un des porte-parole dénonce (…), ici, au cœur de l’Ardèche, ce mur qui se construit pour enfermer sa terre, un peuple ? »
Atteint d’un cancer, se sachant condamné, Saussac ne renonça pas à son travail de création : toujours inventif, il grava de nombreuses poteries de son ami Jean-Jacques Lioury, potier à Antraïgues, et en collaboration avec le peintre Patrice Rigaud, il réalisa une dernière commande (« Cette fresque, c’est mon testament ») promise à la municipalité communiste de Cruas. Lors de ses obsèques, de multiples hommages lui furent rendus, notamment par Gabriel Monnet et Jean Ferrat, qui écrivit : « Mon Jeannot, (…) Jamais tu n’acceptas le monde tel qu’il est. C’est sans doute ce qui nous a rendus si proches car tu me savais pareil à toi. ».
Jean Saussac s’était marié à trois reprises. En 1945, il avait épousé Luce Picard dont il eut deux fils (Michel et Alain). Divorcé en 1977, il épousa en 1978 Michèle Sévenier, dont il divorça en 1980. En 1983, il vivait avec Michèle Estève, qu’il épousa en 1999. Il eut avec sa dernière compagne une fille, Clara, née en 1991.
700 peintures et dessins de Jean Saussac sont répertoriés et photographiés dans l’ouvrage de Marie Bachy, historienne de l’art. Cette somme n’est pas exhaustive. Cet ouvrage esquisse par ailleurs un inventaire de l’œuvre multiforme de Saussac (décors pour le théâtre, le cinéma, le music-hall, illustrations de livres, réalisations de fresques et de mosaïques, gravures de poteries) et donne une idée des multiples lieux où des œuvres de Saussac sont aujourd’hui exposées.
Jean Saussac était par ailleurs un généreux donateur pour ses amis et pour les organisations progressistes (PCF, Mouvement de la Paix notamment).
Auteur : Pierre Bonnaud pour le site du Maitron en ligne.
Sources :
Patrice Rigaud, Le lièvre bleu ou la fresque-testament de Jean Saussac, (photos Rémi Le Bret), Lyon, Bachès et Sept Editions, 2005.
Marie Bachy, J. Saussac, le peintre, Editions du Chassel, Association des Amis de Jean Saussac, PNR des Monts d’Ardèche, 2009.
Les Allobroges (1944-1956).
À travers l’Ardèche, supplément hebdomadaire de l’Humanité-dimanche, publié par la fédération de l’Ardèche du PCF (1957- 1958).
L’Humanité. ─ Le Dauphiné Libéré.─ Le Progrès. ─ Envol (mensuel FOL de l’Ardèche. J. Saussac fit partie de son comité de parrainage).
