Stèle du Prayé située à proximité du lieu-dit "Etoile I" au col du Donon (Bas-Rhin)

Légende :

A la mémoire de huit hommes du deuxième Special Air Service, SAS ou service spécial de l'air, fusillés par les Allemands le 15 octobre 1944 (exécutés en réalité entre Saales et Schirmeck : à La Grand Fosse). La stèle est inaugurée le 24 mai 1987.

Genre : Image

Type : Stèle

Source : © Association pour des études sur la Résistance intérieure des Alsaciens Droits réservés

Détails techniques :

Photographie numérique en couleur

Date document : sans date

Lieu : France - Grand Est (Alsace) - Bas-Rhin

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Contexte historique

Dans la nuit du 6 au 7 septembre 1944, un important parachutage d'armes, de munitions, d'explosifs et de ravitaillement a lieu sur le terrain Pré Barbier, près de Celles-sur-Plaine (Vosges). Le même jour, trois jours après les combats de la ferme de Viombois, le lieutenant-colonel Franck vient annoncer au poste de commandement (PC) de la première centurie, installé à Lajus (Vosges), qu'il met le matériel réceptionné à la disposition du GMA Vosges. L'intégralité est mise en dépôt. Le même jour, le 7 septembre 1944, le lieutenant-colonel Guy d'Ornant, alias "Marchal", le commandant Marcel Kibler, alias "Marceau", et le capitaine Jean Eschbach, alias "Rivière", se rendent au PC de Lajus. Ils y trouvent également le major Sykes qui, avec le capitaine Henri Derringer, alias "Pellegrin", a installé ses SAS à proximité de la Pierre Percée. Rivière s'entend alors avec le major anglais pour lui faire parvenir à nouveau des renseignements que ce dernier câblera à Londres. Un système de liaisons est mis en place. Le débat tourne autour des combats de la ferme de Viombois et du commando du Sichersheitsdienst, SD ou service de sécurité, qui sévit dans la région, depuis Baccarat. 

La principale difficulté est de garder le contact et de pourvoir au ravitaillement des 150 hommes qui restent en forêt. Le colonel Henri Bourgeois, alias "Maximum" et le commandant Marcel Kibler, se trouvent coincés à la maison du garde-forestier Sibille à Neuveville-les-Raon (Vosges) en raison de l'arrestation du capitaine René Meyer, alias "Marc", le 6 septembre 1944 à Bertrichamps. Ils chargent le lieutenant-colonel Guy d'Ornant, moins "brûlé", d'établir une liaison avec la vallée de Celles. Un tri est effectué parmi les éléments restants et seule une vingtaine d'hommes se porte volontaire sous la direction du sous-lieutenant René Ricatte, alias "Jean-Serge". Cette petite unité se replie dans le secteur de Ban-de-Sapt (Vosges). C'est dans ce dernier lieu que le lieutenant-colonel Marchal, installe son PC avec ses deux agents de liaison, Arlette Rousselot et Marie-Madeleine Levêque. Il rejoint le maquis de Jean-Serge quelques jours plus tard. Les Anglais du Special Air Service (SAS) du lieutenant-colonel Franck, les volontaires de l'aspirant Vuillard, alias "Jojo", et le capitaine Henri Derringer, se retirent du côté de Moussey.

La présence allemande s'intensifie et de nombreux requis civils creusent des fossés antichars sur la ligne Lunéville - Rambervillers - Remiremont. Néanmoins, les Allemands évaluent la force du GMA Vosges à deux bataillons. En réalité, il ne reste plus qu'une vingtaine issue en grande partie de la première centurie sous les ordres du sous-lieutenant René Ricatte, les Anglais du SAS et les volontaires de l'aspirant Vuillard. Seul, le service de renseignements (SR) du capitaine Jean Eschbach est encore actif. Ce dernier n'utilise plus que du personnel féminin pour les liaisons car les hommes font l'objet d'une mobilisation générale décrétée par les Allemands pour creuser les tranchées de la toute nouvelle Vorvogesenstellung ou position avancée des Vosges. Parmi ces derniers, des hommes peuvent renseigner Rivière sur les différents tronçons de cette nouvelle ligne de défense. Dans le même temps, la Gestapo s'installe à la Neuveville-lès-Raon comptant sur deux jeunes miliciennes, anciennes prisonnières à la ferme de La Barraque, pour retrouver les chefs de la Résistance.

Le 15 septembre 1944, le colonel Henri Bourgeois se rend à Moussey pour y rencontrer le capitaine Henri Derringer et le lieutenant-colonel Franck qui lui fait part des récentes opérations de parachutages. Il insiste auprès de ce dernier pour obtenir de Londres, un radio et des moyens de transmission. Dès le lendemain, il regagne Raon-l'Etape et son PC à Neuveville-les-Raon (Vosges).

Durant le mois de septembre 1944, la mission SAS du lieutenant-colonel Franck, stationnée dans les bois du lac de la Maix, parvient à bénéficier de trois parachutages d'armes derrière le village de Moussey (Vosges) sur le plateau de la Charbonnière, dans la nuit du 14 au 15, 18 au 19 et du 21 au 22. Le deuxième largage comprend six jeeps armées et des provisions d'essence. Malgré les conseils de prudence du colonel Henri Bourgeois et du commandant Marcel Kibler, ils harcèlent les voies de communication empruntées par l'ennemi et dans ce cadre, des actions de sabotage sont entreprises à Senones (Vosges), Moyenmoutiers (Vosges), Ban-de-Sapt (Vosges), Etival (Vosges) et dans le secteur du col du Donon (Vosges). Grâce à leurs moyens motorisés, les SAS empruntent les chemins forestiers, tant dans la vallée de Plaine que celle du Rabodeau, jusqu'au col du Hantz. 

Devant le raidissement de la défense allemande, le manque de perspective d'une libération immédiate par les Alliés, les menaces d'arrestations dans le secteur de Raon-l'Etape et le contact rompu avec l'Alsace, le colonel Henri Bourgeois et le commandant Marcel Kibler décident de rejoindre Moussey afin d'y établir leur PC. Le 23 septembre 1944, ils s'installent dans la maison du garde-chasse Albert Freine. Le capitaine Jean Eschbach reste à Raon-l'Etape comme relais, mais très rapidement, devant l'avance des Alliés et le minage de tous les ponts sur la Meurthe, il décide de déménager une nouvelle fois dans la maison du garde forestier Sibille à Neuveville-lès-Raon. Le lendemain, le 24 septembre, le colonel Henri Bourgeois, le commandant Marcel Kibler et Albert Freine échappent de justesse à la grande rafle à Moussey et se retrouvent au camp des SAS. Ensemble, ils prennent la décision de former une patrouille pour aller récupérer les armes qui sont encore dans la maison d'Albert Freine à Moussey. La mission se passe bien malgré la présence ennemie.

Le 26 septembre 1944, devant l'intensification de la pluie, le lieutenant-colonel Frank décide de replier ses SAS dans des fermes isolées à deux kilomètres au sud de Moussey. Il redonne sa liberté au capitaine Henri Derringer et à la vingtaine de l'aspirant Vuillard. Cette dernière unité se réfugie dans la grotte de la Haye-Labe où elle est en sécurité. Néanmoins, quelques volontaires restent avec les Anglais. Le colonel Henri Bourgeois, le commandant Marcel Kibler et Henri Derringer établissent leur nouveau PC dans le fenil de la maison d'Alphonse Farine à Moussey. Le ravitaillement et les liaisons s'effectuent désormais de nuit.

Dans la nuit du 30 au 31 septembre 1944, les SAS du lieutenant-colonel Franck obtiennent à nouveau un parachutage de vivres dont une partie tombe dans les arbres à proximité de Moussey. Le nouvel objectif du GMA Vosges est d'obtenir des parachutages d'armes massifs afin d'équiper le GMA Vosges reconstitué. Ce dernier peut alors jouer le rôle d'infanterie de montagne et ainsi nettoyer le massif du Donon, facilitant l'avancée des armées alliées. Dans le même temps, la présence allemande devient de plus en plus importante et près de 200 Feldgendarmes ou gendarmes de campagne s'installent au château à Moussey à moins de 500 mètres du PC du GMA Vosges.

Le 4 octobre 1944, les Allemands opèrent une action importante contre le camp des Anglais de la mission SAS. Un cordon de troupes coupe toute la vallée et passe à quelques mètres de la maison qui sert de PC au GMA Vosges. Le lendemain, le 5, devant l'arrivée imminente des Alliés, l'ennemi arrête tous les hommes de 18 à 55 ans et incendient toutes les fermes où se sont réfugiés les Anglais. Le dispositif de ces derniers est totalement anéanti.

Le 5 octobre 1944, le capitaine Jean Eschbach se rend dans les lignes alliées avec le capitaine Druce de la mission SAS Loyton. Le but de ce dernier est de récupérer les éléments SAS qui se trouvent du côté de Moussey. Ne pouvant plus se rendre sur place, il décide d'accompagner Rivière. En effet, Jean Eschbach veut informer les Alliés, qui ne se trouvent qu'à 25 kilomètres de là, qu'une nouvelle brigade SS vient d'arriver dans le secteur d'Anould-Corcieux (Vosges). La petite équipe arrive deux jours tard dans le secteur de la 2ème division blindée (DB) à Gerbéviller (Meurthe-et-Moselle). Peu de temps avant, la vingtaine dirigée par le sous-lieutenant René Ricatte, accompagné du lieutenant-colonel Guy d'Ornant, quitte son cantonnement de Ban-de-Sapt (Vosges) pour rejoindre les lignes alliées qu'elle atteint le 6 octobre 1944.

Le 9 octobre 1944, les SS quittent le village de Moussey, il ne reste plus que les agents de la Gestapo. Le désengagement des Allemands encourage le corps-franc, commandé par l'aspirant Vuillard à reprendre des patrouilles pour harceler les communications et les diverses corvées de l'ennemi. Néanmoins, le problème du ravitaillement devient de plus en plus inquiétant car l'état-major du GMA Vosges est toujours cantonné dans l'inaction.

Le 20 octobre 1944, le capitaine Jean Eschbach, acompagné d'un guide, franchit à nouveau les lignes et parvient à la maison du garde forestier Sibille à La Neuveville-lès-Raon. Ce dernier, arrêté par la Gestapo dans la nuit du 19 au 20, interrogé sur un certain Jean Rivière, est parvenu finalement à s'en tirer mais la menace est sérieuse. En effet, depuis son départ du 5 octobre, les arrestations, les rafles et les exécutions se sont multipliées dans tout le secteur. Très rapidement, Rivière décide donc de refranchir les lignes alliées en ramenant Raymond Sibille, le fils du garde forestier et Louis Schmieder, alias "Petit Louis", ainsi que deux agents de liaison, Arlette Rousselot et Marie-Madeleine Levêque.

Le 27 octobre 1944, le colonel Henri Bourgeois, le commandant Marcel Kibler, le capitaine Henri Derringer et Albert Freine se mettent en route pour la grotte de la Haye-Labe où est stationné le corps-franc sous la direction de l'aspirant Vuillard. Puis, la colonne chemine lentement et en silence. Trois jours plus tard, après une marche harassante, ils se retrouvent en face des lignes alliées. La jonction avec les éléments de la 2ème division blindée (DB) s'effectue à Merviller (Meurthe-et-Moselle) en fin d'après-midi. Le 1er novembre 1944, le général Leclerc vient leur rendre visite et leur conseille de rejoindre le lieutenant-colonel Guy d'Ornant qui a établit son PC dans le château de la Chaude Eau, près d'Aillevillers-et-Lyaumont (Haute-Saône). Il prend également la décision de garder les hommes du corps-franc du sous-lieutenant René Ricatte. 


Eric Le Normand, "Les activités du Groupe Mobile Alsace (GMA) Vosges du 7 septembre au 31 octobre 1944" in DVD-ROM La Résistance des Alsaciens, Fondation de la Résistance - Dpt AERI, 2016