Geneviève de Gaulle-Anthonioz
Genre : Image
Type : Photographie / Photograph
Source : © Archives nationales, fonds Défense de la France (don association Défense de la France) Droits réservés
Détails techniques :
Photographie argentique en noir et blanc.
Date document : Sans date
Lieu : France
Contexte historique
Geneviève de Gaulle est née le 25 octobre 1920, à Saint-Jean-de-Valeriscle (Gard), de Germaine Gourdon, sans profession et de Xavier de Gaulle, ingénieur des mines, aîné d'une famille de cinq enfants dont le troisième se prénomme Charles.
Orpheline de mère à quatre ans et demi, son père se retrouve seul avec trois enfants, il réside alors dans la Sarre où il exerce son métier. C'est en lisant une traduction de Mein Kampf, à l'âge de 13 ans qu'elle comprend à quel point Hitler et l'idéologie nazie représentent une menace pour la liberté et la culture. A Rennes, le 22 décembre 1930, Xavier de Gaulle épouse en seconde noce, Armelle Chevallier-Chantepie, deux autres enfants naîtront de cette union. En 1935, Geneviève et sa sœur Jacqueline sont en pension à Metz, mais la famille de Gaulle est obligée de quitter la Sarre qui devient allemande. Ils viennent alors habiter le 10 rue de Robien, à Rennes, ils y restent jusqu'en juin 1938. Dans un premier temps, Xavier de Gaulle sans travail est appelé à surveiller la construction de la caserne Margueritte. Il passe ensuite le concours de percepteur et est nommé à Loiron en Mayenne en septembre 1937. En juin 1938, il trouve un logement dans cette commune. Le 11 juillet 1938, Geneviève de Gaulle passe le bac dans l'Académie de Strasbourg, région où elle est scolarisée. En octobre, elle est très affectée par la disparition de sa sœur Jacqueline qui décède de la typhoïde à Loiron. En novembre de la même année, elle est inscrite en licence d'histoire à la faculté des lettres de Rennes. Le 2 octobre 1939, son père, officier de réserve est mobilisé au camp de Coëtquidan en qualité de Capitaine. Il loue alors un logement à Paimpont, où sa mère les rejoint après le bombardement du Havre.
Le 18 juin 1940, alors qu'elles se rendent à Coëtquidan, Geneviève de Gaulle et sa grand-mère se trouvent à Locminé, lorsque les troupes allemandes entrent dans la ville et qu'un prêtre en soutane vient leur annoncer qu'il a entendu à la radio de Londres qu'un jeune général, qui a été Secrétaire d'Etat à la Défense nationale, appelle tous ceux qui veulent le rejoindre à poursuivre le combat. Geneviève entend alors sa grand-mère dire discrètement au prêtre : "c'est mon fils. Monsieur le Curé, mais c'est mon fils !". Le lendemain les officiers de réserves, dont Xavier de Gaulle sont arrêtés et faits prisonniers. Geneviève retourne à Paimpont avec sa famille, où sa grand-mère décède dans ses bras, le 16 juillet 1940.
De retour à Rennes, elle commence alors ses premiers actes de résistance en déchirant les affiches de l'occupant, en fabriquant de petites croix de Lorraine ou en arrachant, du pont de la Vilaine, un fanion nazi qu'elle rapporte chez elle comme trophée. En 1941, inscrite à la Sorbonne elle se rend à Paris et est hébergée par sa tante, Madeleine De Gaulle. Geneviève devient membre du réseau Musée de l'Homme. Elle distribue des tracts dans le métro, effectue des missions de renseignements, rédige des articles, participe à la création de maquis au sein de Défense de la France.
Sur dénonciation, elle est arrêtée en possession de papiers compromettants, le 20 juillet 1943, dans la librairie de Mme Wagner, "Au voeu de Louis XIII" (68 rue Bonaparte - VIe arrondissement), qui servait de boîte aux lettres au mouvement. Plus d'une cinquantaine de membres de Défense de la France sont arrêtés ce jour-là avec elle. Elle a 22 ans et, a tenu à reprendre sa véritable identité, trouvant bien qu'il y ait des gens de la famille de Gaulle qui soient arrêtés et que cela se sache.
Elle passe six mois dans la prison de Fresnes puis à la mi-janvier les prisonnières politiques sont rassemblées à Compiègne avant d'être envoyées au camp de concentration de Ravensbrück. Là elle se retrouve aux côtés d'amies résistantes aux noms connus, Marie-Claude Vaillant-Couturier, veuve de Paul Vaillant-Couturier, rédacteur en chef de L'Humanité, et de Germaine Tillion, ethnologue. Geneviève de Gaulle arrive au camp en même temps que la mère de cette dernière. Dès les premiers mois de camp, son nom lui fait frôler la mort, et les quatre derniers mois elle est mise à l'écart, au bunker, cachot dans le camp sur l'ordre d'Himmler, qui caresse l'espoir d'une négociation avec le général de Gaulle et veut l'utiliser comme monnaie d'échange. En avril 1945, elle est remise à la frontière suisse où son père est devenu Consul Général de France à Genève. Elle est presque aveugle par manque de vitamines et pèse 44 kg.
Peu de temps après, elle rencontre Bernard Anthonioz, résistant savoyard, éditeur, ami d'Aragon et proche d'André Malraux. Ils se marient le 28 mai 1946 à Bossey (Haute-Savoie). Elle devient la présidente de l'Association des Déportées et Internées de la Résistance (ADIR) aux côtés de Marie-Claude Vaillant-Couturier, elle se fait un devoir de témoigner sur la barbarie nazie, devoir qu'elle renouvelle en 1987, au procès de Klaus Barbie.
En 1958, André Malraux propose au couple Anthonioz, qu'il a côtoyé pendant les années de traversée du désert, de le rejoindre au ministère de la culture. Geneviève est chargée de la recherche scientifique et Bernard devient chargé de mission, directeur de la création artistique et fondateur du Centre National d'Art Contemporain.
Au cours d'un dîner, elle fait la connaissance du père Joseph Wresinski, aumônier depuis deux ans, du "camp des sans-logis" de Noisy-le-Grand, camp édifié en tôle ondulée par les compagnons d'Emmaüs après l'appel de l'abbé Pierre de l'hiver 1954. En octobre 1958, elle se rend dans le bidonville de Noisy-le-Grand et est bouleversée de voir des visages ressemblant à ceux qu'elle avait vus en arrivant à Ravensbrück, des hommes et des femmes pataugeant dans la boue, la même détresse et la même humiliation dans le regard. Ce sont des familles pauvres de toutes nationalités qui viennent travailler en France ; mais qui n'ont pas de logement, rejetées, oubliées. Le père Joseph lui demande d'abord d'organiser une campagne radiodiffusée pour collecter du charbon pour l'hiver et de faire pression auprès du Ministre de la construction pour conserver ces logements précaires sans que l'on se soit soucié de ses occupants. Geneviève de Gaulle-Anthonioz décide alors de faire de la misère son cheval de bataille. Elle quitte le Ministère de la Culture.
En 1964, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, bien que mère de quatre enfants, devient la présidente de l'association ATD (Aide à Toute Détresse), créée par le père Joseph Wresinski, elle le restera jusqu'en 1998. C'est en 1968 que Joseph Wresinski donne le nom ATD-Quart Monde pour désigner les pauvres du monde entier qui refusent de se résigner à la fatalité de la misère pour eux-mêmes et pour tout homme. Le terme "Quart Monde" trouve ses racines dans le "Quart-Etat" ou "Quatrième Ordre" employé par des députés lors de la Révolution Française, pour désigner le "peuple des infortunés, des indigents, et de ceux qui n'ont aucune représentation". Elle va se battre tous les jours pour ceux qu'elle appelle des "Sans Domicile Fixe" (n'acceptant pas que l'on dise SDF), trouvant un lien avec la déportée qu'elle fut. Elle va rencontrer plusieurs présidents de la République et Premiers ministres. A la mort du Père Joseph Wresinski le 14 février 1988, elle continue le combat et devient membre du Conseil Economique et Social. Bernard Anthonioz décède, le 14 juillet 1994 et est inhumé au cimetière de Bossey (Haute-Savoie). En 1995, Geneviève de Gaulle-Anthonioz fait un rapport sur l'évaluation des politiques publiques pour la lutte contre la grande pauvreté et en 1996, sur l'avant projet de la loi de cohésion sociale. En 1997, la dissolution de l'Assemblée Nationale remet tout en cause. Elle n'hésite pas à plusieurs occasions, à hausser le ton, pour parvenir à ses fins. Le 29 juillet 1998, la loi relative à la lutte contre l'exclusion est votée. En septembre 1998, elle quitte la présidence du Mouvement ATD-Quart Monde et rejoint le rang des volontaires permanents.
Malade, Geneviève de Gaulle-Anthonioz décède le 15 février 2002, à Paris (6ème). Elle est inhumée près de son mari à Bossey (Haute-Savoie).
Geneviève de Gaulle-Anthonioz a écrit La Traversée de la Nuit et Les Secrets de l'espérance. Elle est titulaire de la Croix de Guerre et de la Médaille de la Résistance et est la première femme à recevoir la dignité de Grand Croix de la Légion d'honneur.
Geneviève de Gaulle was born on October 25, 1920 at Saint-Jean-de-Valeriscle (Gard) to her mother, Germaine Gourdon, and her father, Xavier de Gaulle – mining engineer, oldest of a family of five, the third of whom was Charles de Gaulle.
When her mother died, she was only 4 and a half years old, and her father found himself alone with three children. They lived in Sarre where he worked. It was when she read a translation of Mein Kampf at the age of 13 that she began to understand that Hitler and the Nazi ideology threatened the liberty and culture of Europe. In Rennes, on December 22, 1930, Xavier de Gaulle married his second wife, Armelle Chevallier-Chantepie, and had two children with her. In 1935, Geneviève and her sister, Jacqueline, were lodging in Metz, but the de Gaulle family was obligated to leave Sarre, which was becoming German. They thus came to inhabit 10 Rue de Robien in Rennes, where they stayed until June 1938. First, Xavier de Gaulle, now without work, was called to survey the construction of the Marguerite barracks. He then passed the test to become a tax collector, being assigned to Loiron in Mayenne in September 1937. In June 1938, he found lodging in this community. On July 11, 1938, Geneviève de Gaulle passed the baccalauréat at the Academy of Strasbourg, the region where she was educated. In October, her sister Jacqueline died of typhoid in Loiron, an event which strongly marked Geneviève's youth. In November of the same year, she enrolled as a student of history at the Faculty of Letters in Rennes. On October 2, 1939, her father, a reserve officer, was stationed at the Coëtquidan camp, where he served as captain. Thus, he rented an apartment in Paimpont, where Geneviève's mother rejoined them following the bombardment of Le Havre.
On June 18, 1940, as she and her grandmother returned to Coëtquidan, Geneviève found themselves in Locminé when German troops entered the city and the priest came to announce that he had heard over the radio that a young general, who had been Secretary of National Defense, was calling all those who wished to rejoin forces and continue the combat. Geneviève heard he grandmother then discreetly tell the priest, « that's my son. Monsieur le Curé, that's my son! ». The following day, the reserves officers, including Xavier de Gaulle were arrested and put in prison. Geneviève returned to Paimpont with her family, where her grandmother died in her arms on July 16, 1940.
Upon he return to Rennes, she began her first acts of resistance by ripping down posters of the occupation, by fabricating little croix de Lorraine, or by tearing down Nazi pennants, which she brought back to her house like a trophy. In 1941, she enrolled at the Sorbonne, returning to Paris and living with her aunt, Madeleine de Gaulle. Geneviève became a member of the Musée de l'Homme (Museum of Man) network. She distributed pamphlets on the metro, gathered information, wrote articles, and participated in the creation of maquis within Défense de la France.
After being denounced, Geneviève was arrested while she was in possession of compromising papers on July 20, 1943 in Madame Wagner's bookstore, « Au voeu de Louis XIII », which had served as the mailbox for the movement. More than 50 members of Défense de la France were arrested on this same day. She was 22 years old at the time. Geneviève took up her true identity, making it known that a member of the de Gaulle family had been arrested.
She spent six months in the Fresnes prison then in mid-January the political prisoners were assembled at Compiègne before being sent to the concentration camp at Ravensbrück. There she found herself alongside other famous former resistants, such as Marie-Claude Vaillant-Couturier, widow of Paul Vaillant-Couturier and chief editor of L'Humanité, and Germaine Tillion, the ethnologist. Geneviève de Gaulle arrived at the same time as Tillion's mother.
From the first months at the camp, her name nearly killed her, and the last four months, she was kept at a distance in a cell in the bunker of the camp under the orders of Himmler, who maintained the hope that a deal could be reached with General de Gaulle, using his cousin as a bargaining chip. In April 1945, she was removed to the Swiss border, where her father became Consul General of France in Geneva. She was almost blind from lack of vitamins and weighed only 44kg.
A little while later, she met Bernhard Anthonioz, a Savoyard resistant, editor, friend of Aragon and close friend of André Malraux. They married on May 28, 1946 in Bossey in Haute-Savoie. She became the president of the Association for Deportees and Prisoners of the Resistance (ADIR) alongside Marie-Claude Vaillant-Couturier, she wrote an account condemning the Nazi barbarism, which was reprinted in 1987, during the trial of Klaus Barbie.
In 1958, André Malraux, who had maintained close contact with the Anthonioz couple despite spending years traversing the desert, proposed that the couple join the cultural ministry. Geneviève was charged with scientific research, while Bernard led the mission, becoming director of artistic creation and founder of the National Center for Contemporary Art. During a dinner, Geneviève met the father of Joseph Wresinski, chaplain of the homeless shelter in Noisy-le-Grand, a camp built with corrugated iron by Emaus' companions after the call by the abbot Pierre in the winter of 1954. In October 1958, she returned to the shantytown of Noisy-le-Grand and was shocked to see faces resembling those she had seen upon arrival to Ravensbrück – men and women wading through the mud, with the same distress and humiliation in their regard. They were poor families from all nationalities that had come to work in France, but had not found lodging and were rejected, forgotten. Father Joseph asked her first to organize a radio broadcasting campaign to collect coal for winter and to pressure the Minister of Construction to preserve these precarious apartments without which the occupants would have nowhere to live. Geneviève de Gaulle-Anthonioz thus decided to dedicate herself to the fight against suffering.
In 1964, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, a mother of four, became the president of the association named Aide à Toute Détresse (ATD), or Aid to All Distress, created by Joseph Wresinski, where she would remain until 1998. In 1968, Joseph Wresinski gave the association a new name, ATD-Quart Monde, to describe the impoverished from all over the world who refused to resign themselves to suffering for themselves or for mankind. The term « Quart Monde » came from the term « Quart-Etat » or « Quatrième-Ordre », used by government officials during the French Revolution to describe the people who were « unfortunate, indignant, and those without any representation ». She would fight daily for those she called the « without a fixed domicile », finding a link with those who had been deported, like herself. She met several Presidents and Prime Ministers of France. At the death of Father Joseph Wresinski on February 14, 1988, she continued the fight and became a member of the Economic and Social Council. Bernard Anthonioz died on July 14, 1994 and was buried in the cemetery of Bossey in Haute-Savoie. In 1995, Geneviève de Gaulle gave a report evaluating the public policies in the fight against poverty, and in 1996, she gave another report on the pilot study of the law of social cohesion. In 1997, the dissolution of the National Assembly called this all into question. She did not hesitate to raise her voice, as she did several times, when looking to achieve her goals. On July 29, 1998, the law aligned with the fight against exclusion was passed by the National Assembly. In September, 1998, she left the presidency of the ATD-Quart Monde movement and joined the ranks of the permanent volunteers.
After falling ill, Geneviève de Gaulle-Anthonioz died in Paris on February 15, 2002. She was buried near her husband in Bossey, Haute-Savoie.
Geneviève de Gaulle wrote La Traversée de la Nuit and Les Secrets de l'espérance. She was a recipient of the Croix de Guerre (Cross of War) and the Médaille de la Résistance (Medal of the Resistance) and was the first woman to ever receive the honor of the Grand Croix de la Légion d'honneur (Great Cross of the Legion of Honor).
Traduction : Matthias R. Maier
Sources : Site Internet http://memoiredeguerre.pagesperso-orange.fr/biogr/anthonioz-degaulle.htm (notice biographique de Joël David, Ville de Rennes).