Jean-Baptiste Fusella
Légende :
Jean-Baptiste Fusella, résistant de la première heure, membre de la direction régionale des Jeunesses communistes en Corse, ici après-guerre
Jean-Baptiste Fusella, Resistance fighter from the outset, member of the regional head of the Communist Youth in Corsica, shown here after the war
Genre : Image
Type : Photographie
Producteur : Jean-Baptiste Fusella
Source : © Archives privées Jean-Baptiste Fusella Droits réservés
Détails techniques :
Photographie en couleur.
Date document : Après-guerre
Lieu : France - Corse
Contexte historique
Milieu familial et professionnel : Neuvième enfant d'une famille qui en comptait 10. Son père était marin pêcheur à Bastia, sa mère, sans profession. Jean-Baptiste Fusella, que tous nomment "Batti", conformément à l'usage corse des diminutifs, obtient le Certificat d'études primaires et, en 1934, devient télégraphiste à la poste de Bastia.
Licencié en octobre 1939 après la dissolution des organisations communistes, il participe à l'activité artisanale de son père et, à partir de 1940, il se consacre entièrement au métier de la pêche. La guerre et l'Occupation font de lui un résistant des plus actifs, rapidement contraint à la clandestinité. Le 24 janvier 1944, il épouse Marie Giusti, née le 22 décembre 1922. Ils auront 5 enfants. C'est en 1952 qu'il entame une nouvelle activité professionnelle comme navigateur dans la Marine marchande. Il obtient en 1956 un petit brevet d'officier de la Marine marchande. En 1960, la compagnie Chambon, de Marseille, lui confie la commande des remorqueurs. Il poursuit cette activité jusqu'à sa retraite en 1976 à 55 ans.
Les motivations de Jean-Baptiste Fusella sont à chercher en dehors de sa famille. Il grandit dans un quartier très populaire qui est celui du Vieux Port de Bastia. Il entre très tôt, en 1936, aux Jeunesses communistes. Il est secrétaire de la section de Bastia jusqu'en 1939 et secrétaire du Cercle Paul Vaillant-Couturier. En 1939, il fait partie de la délégation corse au 10e Congrès national des Jeunesses communistes. Celle-ci porte un drapeau bi-face avec la tête de Maure, qui a été confectionné par un communiste de Bastia, Albert Stefanini, un ouvrier-tailleur qui fait également partie de la délégation et qui sera l'année suivante interné à la forteresse de Calvi. Cette délégation compte 11 personnes qui s'illustrent par la suite dans la Résistance comme Etienne Micheli (dit "Léo"). Elle est conduite par Jean-Baptiste Angeli responsable régional des Jeunesses communistes. Danièlle Casanova, qui le reçoit, lui demande de s'exprimer "in lingua materna ".
En 1940, Jean-Baptiste Fusella fait partie dans la clandestinité du premier triangle des Jeunes communistes en Corse. Ce sont ses convictions communistes qui le préparent à la Résistance. Dès juillet 1940, les premiers tracts sont tirés dans un magasin à filets du Vieux port sur la machine à écrire du syndicat du Bâtiment. Sur la jetée du port de Bastia, de jeunes Bastiais inscrivent en gros caractères : " A bas Pétain, à bas Vichy, Pétain = Bazaine ".
Jusqu'à la Libération, des tracts seront distribués dans les boites aux lettres, jetés aux spectateurs des cinémas, des stades, ou aux passants sur le boulevard Paoli. Un élément essentiel est la rencontre en janvier 1941 avec Pierre Georges ("Fabien") qui arrive à Bastia et prend contact avec les Jeunes communistes. Il les réunit près de Bastia, à Pietranera dans la maison des Fusella. Il restera jusqu'au 6 février. Lui-même n'a alors que 21 ans. Il est revenu d'Espagne en mars 1938 après avoir été grièvement blessé : il combattait dans les Brigades internationales depuis 1937. Son prestige est grand. Il apporte des nouvelles de Gabriel Peri et Danielle Casanova. Ses conseils stimulent les jeunes communistes : il les amène à mettre en place la direction clandestine régionale de la Jeunesse communiste résistante en Corse dont Jean-Baptiste Fusella fait partie : " Fabien nous incitait à puiser dans l'histoire de notre île, pour faciliter le rassemblement des patriotes corses contre le fascisme italien et ses prétentions ". Il les incite à créer des comités populaires pour la défense des conditions de vie et à élargir ainsi le front résistant qu'il nomme encore " Le Front des Français " et qui deviendra, en mai, le Front national. Il leur apprend les pratiques des clandestins, l'utilisation du pochoir, les moyens de se procurer des noyaux techniques, c'est-à-dire des moyens de reproduction. Dès février, grâce à l'aide des cheminots, ils rapportent d'Ajaccio une machine à écrire Gestener. Fabien préconise de laisser un bon à valoir pour les matériels empruntés. Ce qu'ils feront, par exemple, en décembre 1942, alors que les occupants italiens viennent d'arriver, pour une ronéo, du papier, des stencils, pris à l'Ecole Mattei de commerce et d'industrie à Bastia. Le matériel sera caché dans une barque puis chez les Fusella au Vieux Port.
Le 28 avril, Fusella est arrêté et incarcéré à la prison Ste-Claire. Libéré au bout de trois mois, il est envoyé en octobre au camp de jeunesse de Matifou en Algérie.
A son retour, la direction clandestine du Parti communiste corse lui donne la responsabilité de l'organisation en Casinca. Il s'y rend avec "Léo" Micheli. Le recrutement s'étend peu à peu à toutes les régions de Corse. Fusella est recherché par les Italiens. En 1943, le Front national corse se prépare à la lutte pour la Libération : des armes arrivent d'Alger par sous-marins ou parachutages. Fusella est chargé de diffuser dans l'île des tracts appelant à prendre les armes contre les occupants. Il n'est pas arrêté. Mais le Tribunal militaire italien le condamne par contumace, le 19 juin 1943, à 10 ans de réclusion. Il se cache dans les maquis du sud de l'île. Il est à Ajaccio le 9 septembre parmi ceux qui pénètrent à la préfecture et y installent le comité de Libération. Les Corses sont mobilisés à partir de novembre 1943 : Fusella est incorporé dans la Marine, dans la 8e escadrille de vedettes. Il participe en juin 1944 au débarquement sur l'île d'Elbe et en août à celui de St Tropez. Son unité est chargée de la chasse aux sous-marins. Démobilisé au bout de 30 mois, il revient à Bastia. Il entre au Conseil municipal en 1946. Depuis 1990, il est responsable de l'ANACR de Haute-Corse et préside l'association départementale des Amis de la Résistance qu'il a fondée.
Personal and Profession Background:
Fusella was born the ninth child of 10. His father was a fisherman in Bastia, and his mother without a profession. Fusella, called “Batti” by most and in accordance with Corsican linguistic diminutives, obtained a grade school diploma in 1934 and then became a telegraph operator in Bastia. Dismissed in 1939 after the dissolution of Communist organizations, he worked alongside his father and, beginning in 1940, he devoted himself fully to fishing professionally. The war and the Occupation pushed him into resistance activity even further, eventually forcing him into hiding. On January 24th, 1944, he married Marie Giusti who was born on December 22nd, 1922. They would have 5 children. It was in 1952 that he began a new professional venture as a navigator in the Merchant Navy. In 1956, he obtained an official certificate of rank in the Merchant Navy. In 1960, he was given command of tugboats by the Chambon company of Marseille. He continued to do this until his retirement in 1976 at the age of 55.
Jean-Baptiste Fusella’s motivations for becoming involved in the Interior Resistance were found outside the home. He grew up in a very working class neighborhood of Bastia called Vieux Port. He entered very early, in 1936, the Communist Youth. He was secretary for the region of Bastia until 1939 and then secretary for the Cercle Paul Vaillant-Couturier. In 1939, he participated in the Corsican delegation of the 10th National Congress of the Communist Youth. This proceeding bore the two-sided flag with the Head of the Moor, which was created by a Communist in Bastia, Albert Stefanini, a tailor who also participated in the delegation and who would be sent to internment the following year at the fortress of Calvi. This delegation consisted of 11 people who would become well known within the Resistance movement, such as Etienne Micheli (called “Léo”). Jean-Baptiste Angeli, the regional head of the Communist Youth, led the proceedings. Danièlle Casanova asked Angeli to express himself “in lingua materna”.
In 1940, Jean-Baptiste Fusella took part in the underground movement of the first coalescence of the Communist Youth in Corsica. It was his communist convictions that prepared him for his participation in the Resistance movement. Beginning in July 1940, the first leaflets were printed in a net warehouse in Vieux Port on the printing machine of the construction industry’s trade union. On the pier of Bastia’s harbour, young Bastians wrote in large letters “Down with Pétain, Down with Vichy, Pétain = Bazaine”. Until Liberation, leaflets would be distributed in mailboxes, thrown at spectators in the movie theatres, in stadiums, or passersby on the boulevard Paoli.
The meeting in 1941 between Pierre Georges (“Colonel Fabien”), who arrived in Bastia on the Général Bonaparte, and the Communist Youth in Corsica would prove an essential element to the future creation of the Front national on the island. They met near Bastia, in Pietranera in the house of Fusella. Pierre Georges stayed until February 6th. He himself was only 21. He returned from Spain in March 1938 after being gravely injured while fighting in the International Brigades for a year. His prestige was great. He brought with him news from Gabriel Peri and Danièle Casanova. This information enlivened the Communist Youth, leading them to organize the clandestine regional head of the Communist youth in Corsica in which Jean-Baptiste Fusella took part, “Fabien encouraged us to take hold of the history of our island, to facilitate the gathering of Corsican patriots against Italian fascism and its claims”. He also encouraged them to create popular committees for the protection of living conditions, as well as to enlarge the ranks of the Resistance movement, still called “Les Front des Français” but would become, in May, the Front national. He taught them proper practices when in hiding, how to use camouflage, and techniques for printing and duplicating clandestine documents. Beginning in February, thanks to the aid of railway workers, they brought back with them from Ajaccio a Gestetner, a type of duplicating machine. Colonel Fabien also advised using redeemable vouchers for printed material. They used one, for example, in December 1942, as Italian forces began to arrive, for a printing machine, papers, and stencils, taken from the Mattei School of Commerce and Industry in Bastia. The material was hidden inside of a small boat and then at the home of the Fusellas in Vieux Port.
On April 28th, Fusella was arrested and imprisoned in the prison of Sainte-Claire. Released after three months, he was sent in October to a Vichy youth camp in Matifou in Algeria.
After his return, the clandestine head of the Communist Party gave him control of the branch in Casinca. He went there with “Léo” Micheli. The recruitment extended little by little to every region of Corsica. Fusella was wanted and sought out by the Italians. In 1943, the Corsican Front national began to prepare to fight for Liberation. Arms arrived from Algeria by submarine or parachute. Fusella was charged with distributing leaflets throughout the island urging people to bear arms against occupying forces. He managed to not be imprisoned. Yet, the Italian Military Tribunal sentenced him to 10 years imprisonment on June 19th, 1943 after failing to appear in court. He hid within the maquis in the south of the island. He was in Ajaccio September 9th, amongst those who infiltrated the prefecture and there established a committee for Liberation. Corsicans began to mobilize in November 1943, and Fusella was incorporated into the navy, in the 8th squadron of speedboats. He participated in the June 1944 landing on the island of Elba and in the August landing on Saint-Tropez. His unit was charged with carrying out submarine warfare. Demobilized after 30 months, he returned to Bastia. He entered the municipal council in 1946. Since 1990, he has been the head of ANACR (Association nationale des anciens combattants de la Résistance) in Haute-Corsica and presides over the departmental association of Amis de la Résistance that he founded.
Auteur : Hélène Chaubin, CD-ROM La Résistance en Corse, 2e édition, AERI, 2007.
Traduction : Sawnie Smith