Jardin public à Montélimar

Légende :

Lieu de récupération d’armes par la Résistance.

Genre : Image

Type : Carte postale

Producteur : Nouvelles Galeries Montélimar

Source : © Souvenirs, Denis Arlaud ; Cinquantenaire des maquis des Baronnies, 1994 Droits réservés

Détails techniques :

Carte postale.

Date document : 1908

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - Montélimar

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Analyse média

Parmi les cartes postales éditées par le grand magasin Les Nouvelles Galeries de Montélimar, au tout début du XXe siècle, figure l’une des fiertés de la ville, son jardin public.

Cette carte postale date de 1908.

Derrière l’objectif et à l’est, sont les allées – promenades ménagées lors de la démolition des remparts – tandis que le cliché donne à voir une large promenade appréciée par quelques passants, sur la gauche, et vers la droite, une haie basse découvrant une pièce d’eau assez vaste ornée d’une sorte d’île. Les rideaux d’arbres, plus loin à l’ouest, cachent la gare du PLM (Paris-Lyon-Marseille), devenu SNCF par la suite.

Curieusement, la situation et l’existence même du jardin public de Montélimar ne sont pas sans rapport avec l’arrivée du chemin de fer. Les choses se nouent au moment de la construction de la ligne reliant Valence à Avignon, à partir de 1853.

Sur les 8 ha achetés par la Compagnie ferroviaire, la commune décide d’acquérir la partie non utilisée par les installations et parcs à voitures et charrettes de l’« embarcadère » (la gare).

Une partie du conseil municipal et d’autres intérêts pensent à utiliser l’emplacement comme « une esplanade […] destinée aux manœuvres militaires et à la tenue des foires ». Par ailleurs, les anciens propriétaires font pression, leurs terrains proches de la gare ayant pris de la valeur.

Cependant, le 5 juillet 1856, après « un grand débat », le conseil décide (par 14 voix contre 6) de ménager « une esplanade destinée aux promenades et allées d’agrément, pièces d’eau et pelouses ». L’essentiel des travaux s’échelonne durant l’année suivante. « La forme des ateliers de charité » mobilise 450 indigents, ce qui « donne une idée de la misère ambiante » à l’époque, remarque Marylène Marcel-Ponthier.

« L’esplanade » va bientôt s’appeler « jardin public ». L’aplanissement terminé, les allées, les plantations, les animaux, « le lieu d’aisance »… humanisent le jardin. Les pièces d’eau sont appelées « lacs » ; en 1874, « le rocher » qui y trône est équipé du jet d’eau bien mis en valeur par le cliché.

Détail apparemment paradoxal, c’est dans cette pièce d’eau, côtoyée chaque jour par les promeneurs, que se situe, au début de la Seconde Guerre mondiale, une cache d’armes provenant du matériel d’unités de l’armée française, dissoutes en 1940, après l’Armistice.


Auteurs : Michel Seyve
Sources : ADD, 132 J 1, 1920 W. Vincent-Beaume. Pons. La Picirella. Guide-Mémorial du Vercors résistant. Joseph Parsus, Dans la Résistance, Malleval, sd. Martin. Les Allobroges 8 sept 44. Plaque com. Romans. Maitron. Reymond Tonneau, Vercors… pays de liberté, histoire d’un miraculé, éditions du Signe, 2003.

Contexte historique

L'armement pose aux volontaires des maquis un problème sans doute parmi les plus compliqués. Une anecdote, "pieusement transmise" par Yvonne, l'épouse de Gaby Reynier, dans le livret rédigé à l'occasion du Cinquantenaire des maquis des Baronnies, est digne d'illustrer cet acharnement des résistants à trouver des armes pour se battre.
Gaby, écrit-elle, « eut vent qu'à l'arrivée des Allemands, certains militaires se sont délestés de leurs mousquetons, dans la pièce d'eau située en face de la gare, dans le parc de Montélimar. Une nuit, il fait le voyage Buis-Montélimar, se défait de son pantalon, et va patauger au milieu des canards dans l'eau glacée, à la recherche des précieux "Berthier"[modèle de fusil moins célèbre que le fusil Lebel mais plus efficace et largement utilisé]. C'est le succès et il enveloppe ses pétoires dans un grand sac de jute. Puis, ayant repris une tenue décente, et chargé de ses mousquetons, il prend calmement le train d'Orange, passage obligé avant de rejoindre la correspondance, c'est-à-dire un tortillard joignant Orange à Buis-les-Baronnies. Las ! le train est bondé de joyeux permissionnaires teutons, chantant à tue-tête des rengaines à la mode qui, dans leur langage, devaient être paillardes. Notre Gaby s'isole et c'est sur le marchepied du train qu'il accomplit le trajet Montélimar-Orange, à une vitesse qui n'a rien à voir avec celle du TGV. Les armes récupérées, dûment dérouillées, iront rejoindre le camp de la Fournache. »

Outre l'intérêt de l'observation du témoin visuel qu'il est, le résistant nous apprend sa propre participation à l'opération. Nous rencontrons ainsi Gaby Reynier sédentaire, paisible coiffeur à Buis-les-Baronnies, agissant au sein du réseau local le jour, mais également Gaby Reynier, participant de nuit, à 80 kilomètres de chez lui, à la récupération d’un sac d’armes, caché par des militaires français en 1940, au même titre que n'importe quel membre des maquis de la montagne. À travers ce cas particulier, nous devinons la souplesse et l'efficacité de la Résistance méridionale. A travers ce cas particulier, nous devinons la souplesse et l'efficacité de la Résistance méridionale.


Auteurs : Michel Seyve
Sources : ADD, 132 J 1, 1920 W. Vincent-Beaume. Pons. La Picirella. Guide-Mémorial du Vercors résistant. Joseph Parsus, Dans la Résistance, Malleval, sd. Martin. Les Allobroges 8 sept 44. Plaque com. Romans. Maitron. Reymond Tonneau, Vercors… pays de liberté, histoire d’un miraculé, éditions du Signe, 2003.