Lettre de Jean Belloni à sa femme, 1er janvier 1944
Légende :
Lettre clandestine de Jean Belloni adressée à sa femme Marguerite le 1er janvier 1944.
Genre : Image
Type : Lettre manuscrite
Source : © Association généalogique des familles Bourrée et Lapeyre Droits réservés
Détails techniques :
Lettre manuscrite et illustrée. Dimensions : 20,7 x 13 cm.
Date document : 1er janvier 1944
Lieu : France - Nouvelle-Aquitaine (Aquitaine) - Lot-et-Garonne - Villeneuve-sur-Lot
Analyse média
Le 1er janvier 1944, Jean Belloni rédige une lettre à sa femme pour lui adresser ses meilleurs vœux pour la nouvelle année. Arrêté le 15 juin 1941, il est interné à Eysses depuis le 15 octobre 1943.
En détention, la correspondance est surveillée et limitée en nombre ; c’est pourquoi de nombreuses lettres furent transmises clandestinement grâce aux gardiens résistants ou grâce aux familles venant rendre visite à leurs proches incarcérés…. Le dessin a certainement été réalisé par Joseph Stern qui était très proche de Jean Belloni à la prison de Tarbes puis à Eysses et qui a réalisé d’autres dessins à son attention. Il représente, d’une part, le drapeau français, symbole national et républicain, et d’autre part, une main transmettant une enveloppe à travers des barreaux. Ce second élément du dessin évoque d’une part le caractère clandestin de cette missive, et d’autre part le lien entre l’extérieur (la liberté) et la prison, peine privative de liberté.
Cette lettre adressée à sa femme montre qu’il garde l’espoir d’être libéré dans le courant de l’année mais également de voir son pays libéré de l’occupation allemande. Communiste de longue date, il termine néanmoins sa lettre par « Vive de Gaulle, vive la France » ; De Gaulle représentant la Résistance unifiée comme elle l’était à Eysses au sein du collectif. Enfin, il souligne que bien qu’il soit un bagnard sa seule faute est d’avoir été un bon Français.
Fabrice Bourrée
Contexte historique
Jean Arthur Belloni est né à Monclar d’Agenais (Lot et Garonne) le 23 décembre 1896. Son père, Michel, est coiffeur et sa mère, Anne David, est tailleuse de robes. Il reprend le métier de sa mère et devient tailleur d’habits, d’abord chez Galinou puis chez Caminade, grand couturier de Villeneuve. Il n’est pas mobilisable en 1914 à cause d’une infirmité. Le 10 janvier 1920, il épouse Marguerite Varlot qui avait fui Amiens en 1917 à cause des bombardements. De leur union naît Jeannine le 30 avril 1926. Ils résident alors à Villeneuve-sur-Lot. Dans les années 1930, Jean Belloni est trésorier de la cellule communiste de Villeneuve-sur-Lot et de la société sportive « Avant garde Villeneuvoise ».
Dès 1940, il s’engage dans la lutte clandestine en distribuant des exemplaires de l’Humanité. Le groupe de résistants auquel il appartient comprend son ami Gaston Cavaillé ainsi que Germain Marlas, Oswald Demeurs et Jean Delrieu. En mai 1941, suite à la diffusion d’un numéro de l’Humanité portant des accusations à l’encontre du commissaire de police de Villeneuve, une enquête judiciaire est ouverte. Le 15 juin 1941, à la suite d’une dénonciation, la gendarmerie de Villeneuve interpelle Jean Belloni et ses quatre camarades. Il comparaît le 21 juin 1941 devant le Tribunal de Première Instance d’Agen puis est interné du 15 au 18 septembre 1941 à la prison de Toulouse. Il est présenté le 27 septembre devant le Tribunal militaire de Toulouse qui le condamne à cinq ans de travaux forcés le 6 novembre 1941 pour activité communiste. Il est ensuite transféré à la maison d’arrêt de Tarbes le 8 décembre 1942 puis à celle d’Eysses le 15 octobre 1943. Suite à l’insurrection des patriotes détenus dans cette centrale, il est livré avec les autres détenus aux autorités allemandes le 30 mai 1944.
Jean Belloni est déporté le 20 juin 1944 au camp de concentration de Dachau sous le matricule 73070 ; il est affecté au commando des tailleurs. Il est rapatrié de ce camp le 17 mai 1945 mais décède des suites de sa déportation le 10 août 1947 à Amiens. La mention « Mort pour la France » a été inscrite en marge de son acte de décès le 11 avril 1949. Le titre de déporté résistant lui a été attribué à titre posthume par décision en date du 4 février 1986.
Fabrice Bourrée