Les émissions radio clandestines et l'enjeu vital du progrès technique
Légende :
Scène extraite de Résistance, série télévisée de Dan Franck, 2014
Genre : Film
Type : Téléfilm
Source : © Gaumont Télévision - Légende- MMXIV Droits réservés
Détails techniques :
Durée : 1 minute 53 secondes
Date document : 2014
Lieu : France
Analyse média
La scène commence par la lecture en langage courant ( « en clair ») d’un renseignement à transmettre. Une codeuse le transforme, par un procédé de cryptage, en une série de lettres sans signification apparente.
Pendant ce temps, l’opérateur radio règle son émetteur clandestin de façon à être perçu par la « centrale » de Londres » : une fois branché sur courant alternatif, chaque émetteur est repérable grâce à son « quartz », une lamelle de cristal qui a pour propriété de stabiliser les ondes radio sur une fréquence unique, déterminée par l’épaisseur de la lamelle.
L’opérateur radio transmet ensuite le message codé par alphabet morse : chaque pression sur sa machine équivaut à couper le courant de la fréquence, permettant d’émettre un signal court ou long. L’antenne, qui transmet les signaux émis vers l’extérieur, est généralement fixée artisanalement en hauteur à l’intérieur de la pièce, pour ne pas attirer l’attention.
Dans la rue, la menace vient des voitures allemandes équipées de « gonio » (système de repérage radiogoniométrique, avec antenne rotative). Trois d’entre elles, en cumulant leurs données, peuvent rapidement circonscrire le secteur d’où viennent les ondes émises, puis repérer l’endroit où le champ est le plus intense.
Bruno Leroux
Source:
Pierre Lorain, Armement clandestin. SOE France 1941-1944, chez l'auteur, 1972, pages 11 et suivantes.
Contexte historique
L’histoire des émissions radios clandestines est celle d’un combat à distance lentement gagné par les Alliés, avec pour arme le progrès technique. En 1941 et 1942, l’opérateur radio transporte une lourde valise avec un poste volumineux, émet et reçoit des messages dans la même session, opère parfois pendant plusieurs heures au même endroit. Côté allemand, le repérage en est lui aussi à ses débuts : pour être efficace, il faut justement que la cible émette à plusieurs reprises depuis le même lieu, sur plusieurs heures et sur une même fréquence. Le bilan de cette phase d'apprentissage est terrible pour les résistants: ainsi, les 3/4 des radios envoyés par la France libre sont neutralisés.
A partir de 1943, les pertes diminuent peu à peu: 50 % au premier semestre, 25% durant l'année qui suit. Pourtant, il suffit désormais d'une demi-heure à la goniométrie allemande pour localiser un lieu d’émission. C'est que les moyens progressent considérablement côté allié (français et britannique, pour l'essentiel): les opérateurs radio expérimentés sont plus nombreux, dotés de davantage de quartz grâce auxquels ils peuvent changer de fréquences suivant un plan de travail précis, de postes plus légers qui leur permettent de changer aussi régulièrement de lieu d’émission. En 1944, une nouvelle génération de postes miniaturisés dédiés à l'émission ou à la réception permet de découpler les deux opérations et de réduire encore le temps de communication.
Bruno Leroux
Sources:
Pierre Lorain (voir ci-dessus); Frantz Malassis, "Les liaisons radio des réseaux, une nécessité mais un danger permanent", Lettre de la Fondation de la Résistance n° 76, mars 2014, p. VII
Emetteur-récepteur britannique 3 MK II, très perfectionné mais non miniaturisé. Poids total de la valise: 14,8 kg
Coll. Musée de la Résistance nationale, Champigny-sur-Marne
MCR1 et RCD31Postes miniatures: un récepteur "biscuit" MCR 1 (en haut à gauche) et deux émetteurs
Coll. Musée de la Résistance nationale, Champigny-sur-Marne