Léon Lichtenberg

Légende :

Bulletin d'adhésion de Léon Fichtenberg à l'Union départementale des anciens de la Résistance de la Dordogne, 14 février 1945

Genre : Image

Type : Formulaire

Source : © Archives départementales de Dordogne, 14 J 34 Droits réservés

Date document : Février 1945

Lieu : France - Nouvelle-Aquitaine (Aquitaine) - Dordogne

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Contexte historique

Léon Lichtenberg, né le 26 février 1925 à Siedlce (Pologne), de nationalité polonaise (il a été naturalisé français après-guerre), est lycéen au moment des faits. Ses parents sont forains. Il a un frère, qui s’engage dans l’armée française en 1939, puis dans la 2e DB, et une sœur. Avec sa famille, il arrive en 1928 en France, fuyant l’antisémitisme de la Pologne. Léon reste avec sa grand-mère à Paris, où il fait sa scolarité en primaire tandis que ses parents vont à Périgueux, où vit un frère de sa mère. Là, ils réussissent à ouvrir un commerce de confection "Toute la mode", 49 rue du président Wilson, commerce qui est plus tard spolié du fait des lois d’aryanisation économique et placé entre les mains d’un administrateur de biens juifs. Léon rejoint sa famille en 1936 pour entrer au lycée d’Etat de Périgueux (l’actuel lycée Bertran-de-Born). En 1943, il y passe son bac philo, conservant de ce lycée et de sa direction un sentiment de protection et de bienveillance générale.

Au début de la guerre, il assiste à l’arrivée des réfugiés puis à la débâcle mais le moment déterminant, comme pour son ami Raphaël Finkler (alias Achille, alias Ralph), est celui de la signature de l’armistice en juin 1940. La lecture du journal annonçant la nouvelle leur fait violemment percevoir que la France a perdu la guerre, et il a conscience qu’il faut faire quelque chose. C’est au lycée qu’il est contacté, ainsi que son ami Ralph, par un ami originaire de Strasbourg, Wolf Ibram, alias Willy, un militant du Mouvement national contre le racisme (MNCR) en contact avec les directions de Lyon et de Toulouse. Ibram leur confie la responsabilité de créér un mouvement à Périgueux et de recruter d’autres jeunes. C’est ainsi que, avec un troisième lycéen, Georges Smolarski, ils décident de constituer, selon le système de base de la sécurité issu du parti communiste, un triangle de direction. Rapidement s’ajoutent à l’équipe Paul Frydman (alias Dave) qui arrive de Paris où il a été emprisonné à la prison de la Santé du fait de son appartenance aux jeunesses communistes et quelques autres. Commençe alors une période pendant laquelle ils réalisent un programme de propagande et d’actions, collant ou distribuant des tracts et des revues, brisant les vitrines des collabos et des miliciens.

A la fin de l’année 1943, la situation devient critique, les équipes de jeunes sont repérées. Lichtenberg, Finkler, Frydman, doivent s’effacer. La situation pour tous les Juifs, ici comme ailleurs, est dramatique et le père de Léon a été inscrit sur la liste préfectorale des Juifs à arrêter en Dordogne dans le cadre de la rafle du 23 février 1943 menée par Vichy. Prévenu par un policier, il est recueilli par une voisine courageuse et échappe ainsi aux policiers venus l’arrêter. De leur côté, Lichtenberg, Finkler et Frydman, décident de rejoindre un maquis. L’entrée dans la Résistance est pour Lichtenberg un "impératif" à la fois moral, patriotique et personnel. Après un bref passage dans un maquis Roland AS cantonné à Vergt qu’ils jugent trop attentiste, ils réussissent à entrer dans un maquis périgourdin de la MOI, au lieu-dit le Got, sur la commune de La Trappe (aujourd’hui devenue Mazeyrolles). Ce groupe est décimé le 4 mars 1944, à Vaurez (commune de Belvès), au cours d’un accrochage avec des militaires allemands. Juan Gimenez, responsable départemental de la MOI Dordogne et chef du groupe, est tué avec deux de ses camarades, Giovanni Bagnara et Antonio Rabaneda. Léon et Ralph, qui n’étaient pas à Vaurez, rejoignent le maquis MOI de Veyrines-de-Domme, au lieu-dit Le Canadier, dirigé par José Florés Sanchez. Mais, le 16 mars 1944, la maison dans laquelle cinq maquisards dormaient, est encerclée puis attaquée par des Gardes mobiles français de Bergerac sous les ordres du capitaine Jean. José Florés Sanchez, Angel Poyo Munoz, Agustin Crespo Quevedo, y trouvent la mort en combattant. Desiderio Romero Platero, blessé, est fait prisonnier puis fusillé à Limoges le 25 avril 1944 après un simulacre de justice de la cour martiale de Vichy. Ralph Finkler, qui parvient à s’enfuir par une fenêtre et à échapper aux tirs des GMR, est le seul rescapé. Léon Lichtenberg faisait alors sa ronde avec un septième camarade et tous deux échappent ainsi au traquenard.

Léon et Ralph rejoignent alors un autre maquis de Carlos dans la forêt de la Bessède. Carlos Enrique Ordeig Fontanals, dit Carlos, capitaine de l’armée républicaine espagnole, arrivé en janvier 1944 à Groléjac (Dordogne) pour organiser des groupes MOI, avait été nommé pour remplacer Juan Gimenez après sa disparition le 4 mars. Léon Lichtenberg s’engage dans des activités intenses de sabotage de ponts, de voies ferrées, d’usines de production pour les Allemands. Lorsque approche la Libération, les Espagnols s’organisent dans l’espoir de renverser Franco et la plupart des résistants de la MOI sont intégrés dans le 4e régiment FTPF de Soleil, cantonné à Villefranche-du-Périgord (Dordogne).

A la mi-août 1944, la section juive nationale de la MOI demande à tous les responsables militaires et politiques des FTPF de constituer des détachements juifs. En Dordogne, Yves Péron, membre de l’état-major départemental FTP et futur député communiste du département, commande à Léon Lichtenberg et à Raphaël Finkler de créer un détachement juif. Parti avec ce détachement sur le front de la Rochelle il signe, le 30 novembre 1944, un engagement pour la durée de la guerre au 108e RI.

Après-guerre, Léon Lichtenberg entreprend à Paris des études de droit et s’inscrit au barreau de Paris puis à celui de Périgueux après son retour en Dordogne où il exerce durant vingt-cinq ans. Il décède à Périgueux le 16 janvier 2011.


Auteur : Bernard Reviriego

Sources et bibliographie :
Service historique de la Défense, Vincennes : GR 16 P 372195
Archives départementales de Dordogne :
- Témoignage oral de Léon Lichtenberg [disponible en ligne]
- PR 223, revue Droit et liberté

Reviriego (Bernard), Les Juifs en Dordogne. 1939-1944, Archives départementales de la Dordogne – Editions Fanlac, 2003, p. 76-80. 
ANACR Dordogne, De 1939-40 à 1945 en Dordogne. La Résistance contre le nazisme et le régime de Vichy. Récits, témoignages et documents, Périgueux, Imprimerie Moderne, 1996, p. 216-219. 

Sur les activités du MNCR : Ralph Finkler, "Les légaux ou la résistance des obscurs", in Anacr Dordogne, De 1939-40 à 1945 en Dordogne. La Résistance contre le nazisme et le régime de Vichy. Récits, témoignages et documents, Périgueux, Imprimerie Moderne, 1996, p. 216-219.