Ponts détruits ou endommagés pendant la guerre 1939-1945

Légende :

Croquis situant les principaux ponts routiers et ferroviaires détruits ou endommagés pendant la guerre 1939-1945

Genre : Image

Producteur : Alain Coustaury

Source :

Détails techniques :

Sur la carte de la géographie physique de la Drôme, relief et cours d'eau, les ponts routiers ou ferroviaires endommagés pendant le conflit ont été marqués.

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme

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Analyse média

Sur la carte de la géographie physique de la Drôme, relief et cours d'eau, les ponts routiers ou ferroviaires endommagés pendant le conflit ont été marqués. Le croquis n'est pas exhaustif. Des petits ouvrages détruits franchissant des ruisseaux ne sont pas signalés. On remarque que tous les ponts franchissant le Rhône ont été soit partiellement, soit totalement détruits. Seul le pont ferroviaire de Peyraud a été épargné. Ce serait le seul ouvrage franchissant le Rhône entre Lyon et la mer qui n'aurait pas été détruit. Les ponts routiers de l'Isère drômoise ont été, à une période ou à une autre de la guerre, endommagés ou détruits. Il en est de même pour ceux de la rivière Drôme. Au premier septembre 1944, date de la libération du département, la situation en ce qui concerne les ouvrages d'art franchissant les cours d'eau est catastrophique.


Alain Coustaury

Contexte historique

Le département de la Drôme est drainé par un réseau hydrographique qui le cloisonne en plusieurs bassins. Dans le Rhône, de direction méridienne; se jettent des rivières grossièrement orientées est-ouest. Les deux principales sont l'Isère et la Drôme. Du point de vue militaire cette disposition a d'importantes conséquences stratégiques.

En 1940, en juin, alors que la Wehrmacht déferlait vers le sud de la France, pour ralentir son avance, l'état-major français décida de faire sauter les ponts sur le Rhône depuis Andancette jusqu'à Valence. Il fit de même sur l'Isère et la Drôme, considérant ces deux rivières comme des points d'appui pour une ligne de défense ultime.

En août 1944, pour ralentir la poussée de l'US Army et des soldats de de Lattre de Tassigny, la Wehrmacht pratiqua la même tactique tout le long du Rhône et sur les rivières drômoises. À ces destructions totales ou partielles, il faut ajouter celles occasionnées par les bombardements, plus ou moins précis, qui ont préludé au débarquement de Provence le 15 août 1944, pour « encager » les arrières de l'opération. La Résistance sabota également plusieurs ouvrages pour désorganiser les communications de la Wehrmacht. Les ponts drômois subirent donc de nombreuses attaques et très peu furent épargnés pendant le conflit.

Un seul traversa intact la guerre. Ce fut celui de Peyraud. C'est un pont ferroviaire qui permet de faire transiter les trains de la rive gauche à la rive droite du Rhône à partir de la gare de Saint-Rambert d'Albon. Il aurait été le seul pont intact entre Lyon et la mer. Il fut donc très utilisé par les trains mais également par les convois routiers militaires de l'US Army. Dès septembre 1944, le dépôt de gravier sur le tablier permit le passage d'une rive à l'autre. Cette possibilité était d'autant plus intéressante que les ponts routier de la RN 7 et ferroviaire du Dolon avaient été détruits par la Wehrmacht qui se repliait vers Lyon.

À la libération de la Drôme, le 1er septembre 1944, l'état des ponts est donc catastrophique. Les ponts détruits en 1940 avaient été soit reconstruits partiellement, soit remplacés par des moyens de fortune. Les combats de la libération avaient souvent annihilé tous ces efforts de reconstruction. Pour faire face aux indispensables et vitaux besoins de transport, plusieurs solutions ont été apportées pour franchir fleuve et rivières. De petits cours d'eau sont traversés, quelque temps, à gué. L'auteur a le souvenir d'avoir passé à gué le Lez au pont de Montségur-sur-Lauzon. Des passerelles sont jetées sur la Drôme à Allex, Aouste-sur-Sye, Saillans. Mais cette rivière au régime méditerranéen a des crues brutales telles que la passerelle est emportée.

En ce qui concerne le Rhône, le problème est tout autre. Sa largeur, son débit sont tels qu'il n'est pas question de le traverser à gué, même si à certains endroits, aux seuils et en étiage, on pouvait le tenter. Il a fallu envisager des solutions plus complexes et plus longues à réaliser. L'utilisation de barques permit le passage de personnes. Mais cela était insuffisant. Le bac à traille a été un moyen relativement puissant et sûr pour assurer la traversée d'un nombre important de passagers voire de véhicules légers. On peut prendre l'exemple du pont de Valence-sur-Rhône pour résumer l'histoire des péripéties de la traversée du Rhône au niveau du chef-lieu du département. Le 20 juin 1940, devant l'avance allemande, le Génie fait sauter deux arches de la rive gauche du pont de pierre construit en 1905. Ce sont les barques des Sauveteurs de Enfants du Rhône qui assurent, tout de suite, les premières traversées. Un pont du génie, rapidement installé, est emporté le 8 juillet. Le 3 août 1940, un bac à traille commence à fonctionner. La fin de 1940 voit les travaux de l'établissement d'un pont Pigeaud. Il est inauguré le 1er mai 1941 et après divers avatars durera jusqu'en 1949. Dans le même temps, la reconstruction du pont est entreprise. Mais le bombardement, par l'USAAF, du 15 août 1944 qui vise le pont est imprécis et surtout détruit un quartier de la ville causant la mort d'environ 280 personnes. Ce sont les bombardiers de la RAF le 18 août qui détruisent 2 arches de la rive droite faisant aussi s'effondrer la partie du pont Pigeaud qu'elles soutenaient. La liaison entre les deux rives est à nouveau interrompue. Le bac à traille reprend du service mais il est coulé par une crue du fleuve. Un vieux bateau à vapeur, le Pilotin est alors mobilisé pour assurer le passage. On entreprend la restauration en ripant un double pont Pigeaud. Ce n'est que le 15 mars 1945 que la circulation est rétablie. La construction d'une passerelle provisoire est entreprise sur l'emplacement de la passerelle de 1830. Elle sera mise en service en 1949 et ce jusqu'en 1966, date de l'inauguration du pont Frédéric Mistral établi sur l'emplacement du pont de pierre de 1905. L'histoire des ponts de Valence résume parfaitement l'aspect stratégique de ces ouvrages, les difficultés de la vie quotidienne pendant la guerre, les enjeux militaires et la volonté de reconstruire après le conflit un lien indispensable entre les deux rives du fleuve. Les autres ponts sur le Rhône ont subi les bombardements liés à la préparation du débarquement de Provence. Comme à Valence, l'imprécision a causé de nombreuses victimes (Pont-de-l'Isère, Saint-Vallier, Crest). L'histoire des ponts unissant Romans-sur-Isère et Bourg-de-Péage a beaucoup de points communs avec celle de Valence. Détruits en juin 1940, reconstruits partiellement pendant l'occupation, ils l'ont été également en août 1944 par les Allemands lors de leur retraite.

La Résistance est à l'origine de la destruction de plusieurs ponts (pont de Crozes, de Saint-Paul-lès-Romans sur les voies ferrées). La plus spectaculaire et efficace est celle du pont de Livron sur la Drôme dans la nuit du 16 au 17 août 1944. Sans arrêter la retraite allemande, la destruction d'une arche a largement contribué au ralentissent de celle-ci et a favorisé les interventions aériennes et terrestres de l'US Army. Le sabotage réalisé par le commando Henri Faure est complété, en amont, par ceux de la Grenette et du Rif Noir. Ils ont été l'oeuvre de la compagnie Pons. Ces destructions de ponts rendent encore plus difficile la circulation sur un réseau routier médiocre.

On n'a cité que quelques exemples de l'histoire des ponts drômois. Le croquis révèle leur grand nombre et laisse deviner les difficultés des Drômois pour se déplacer, pour assurer leur ravitaillement, ce qui entrave aussi la reprise économique après la Libération. L'importance des ponts routiers ou ferroviaires est bien démontrée par l'abondance des photographies qui ont été prises après leur destruction ou leur endommagement. Il en est de même de leur reconstruction, symbole du renouveau de la France après la guerre. 


Coustaury Alain Sources : photographies de Mémoire de la Drôme