Roger Priou, dit "Priou-Valjean"

Légende :

Roger Priou, membre du comité directeur de Libération-Nord, chef national adjoint du réseau Police et Patrie, commandant des FFI du IVe arrondissement de Paris et membre de l'état-major FFI de la capitale

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © Association Libération-Nord Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc.

Lieu : France - Ile-de-France

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Contexte historique

Né le 7 octobre 1912 à Paris (XVIIIe), Roger Paul Priou est fils d'un officier supérieur d'origine bretonne, Pierre Priou, et de son épouse Joséphine Bouteiller. Après son baccalauréat, il suit des études commerciales et juridiques à Paris.
En juillet 1935, il entre, comme rédacteur au service du contentieux de la Caisse interdépartementale d'assurances sociales. Dès son entrée dans cette institution, il adhère à la CGT et entre au bureau du syndicat des cadres. Très jeune, Roger Priou s'est écarté politiquement de son milieu conservateur. Influencé par les idées jaurésiennes, il adhère en 1929 à la Ligue d'action universitaire républicaine et socialiste (LAURS), ainsi qu'aux Étudiants socialistes (ES) et aux Jeunesses socialistes (JS). Il prend très vite des responsabilités dans ces organisations : il appartient à la commission exécutive parisienne des ES et de la commission exécutive de la LAURS.

Deux ans plus tard, il rejoint la 18e section de la Seine du Parti socialiste SFIO. Il est successivement secrétaire adjoint, délégué à la propagande de la Fédération des JS de la Seine, puis délégué à la propagande de la Fédération de l'Oise. Dans la SFIO, il se situe plutôt à la gauche du parti, appréciant particulièrement les qualités militantes de Marceau Pivert, mais se montre résolument patriote. Il se lie aussi à Pierre Brossolette. Initié à la franc-maçonnerie en 1936, il atteint le grade de "maître". En 1939, Roger Priou ne reprend pas sa carte de la SFIO. Sans partager les positions des pivertistes de la Gauche révolutionnaire -il condamne pour sa part la ratification des accords de Munich-, il n'a pas accepté l'exclusion de celle-ci l'année précédente.

Mobilisé au 22e COA, le 4 septembre 1939, à l'issue de la débâcle, il est replié avec son unité en Tarn-et-Garonne, puis à Mende (Lozère), où il est renvoyé dans ses foyers le 16 août 1940, avec le grade de lieutenant de réserve. Il a épousé durant cette période Madeleine Perceau (née le 14 mai 1921 à Paris XVIIIe), fille du responsable coopérateur Louis Perceau. La guerre et la défaite conduisent Roger Priou à se rapprocher des socialistes et syndicalistes qui refusent la capitulation. Contacté en septembre 1940 par Henri Ribière, son "patron" selon son expression, il devient un membre actif de la Résistance en janvier 1941. Ribière le met en relation avec les syndicalistes de la CGT signataires du Manifeste des douze, à l'origine de Libération-Nord et il est l'un des fondateurs du Comité d'action socialiste (CAS). En hommage au héros des Misérables, il adopte les pseudonymes de "Roger Valjean" ou de "Jacques Valjean". Durant toute l'Occupation, Roger Priou-Valjean milite conjointement dans ces deux organisations, abritant son action derrière une activité syndicale. En mai 1943, il est désigné secrétaire du syndicat des cadres des assurances sociales.
Le 31 juillet 1942, soupçonné de propagande communiste, Priou-Valjean est interrogé par les brigades spéciales et une visite de celles-ci à son domicile s'avère infructueuse. Vers cette date, il devient responsable du secteur Paris-Nord du CAS et de Libération-Nord et appartient à ce titre au comité directeur national de ce mouvement.

Henri Ribière, à l'automne 1942, propose à Priou-Valjean de co-fonder un réseau de noyautage de la police parisienne. N'ayant pas de contact dans ce milieu, il hésite, mais Ribière insistant -cherchant justement un homme qui ne soit pas mêlé aux querelles internes-, il accepte. Son appartenance à la maçonnerie constitue probablement un atout dans cette affaire. Il devient chef national adjoint du réseau Police et Patrie, sous la direction directe de Ribière. Il anime conjointement le réseau de renseignement Brutus de la région parisienne et signe à ce titre un engagement dans les Forces françaises combattantes le 1er mars 1943.
Commandant des FFI du IVe arrondissement de Paris et membre de l'état-major FFI de la capitale, il co-signe le 19 août 1944 l'ordre de grève à la police parisienne, dirige la prise de la préfecture de police de Paris où il s'installe du 19 au 26 août, et participe à la prise de l'Hôtel de Ville.

Délégué au congrès des fédérations socialistes reconstituées de la SFIO en novembre 1944, Priou-Valjean est élu au comité directeur socialiste, siège à la commission jeunes et se trouve désigné aux fonctions de secrétaire à la propagande de la fédération de la Seine. S'il se prononce pour l'élargissement du parti socialiste aux forces issues de la Résistance, il intervient pour défendre le caractère laïque de la SFIO et invite les délégués à se méfier de l'adhésion en masse de militants chrétiens, même résistants. Il est par ailleurs l'un des adversaires de l'unité organique avec le PCF.

Un an plus tard pourtant, délégué au congrès national SFIO d'août 1945, il intervient sur les rapports du parti avec les mouvements de la Résistance et préconise l'union pour les législatives de la SFIO et de l'Union démocratique et socialiste de la Résistance. Il appuie Daniel Mayer au congrès d'août 1946 contre Guy Mollet et n'est pas réélu à la direction nationale de la SFIO l'année suivante.
Durant trois années, il a été un propagandiste très actif du parti. Il est sans succès candidat de la SFIO aux élections législatives de juin et novembre 1946, puis en 1951 et 1956 dans le secteur Nord de Paris. La carrière de Priou-Valjean se limite donc au cadre du département de la Seine. À la Libération, il siège au Comité parisien de Libération et est désigné secrétaire de l'Assemblée provisoire de la Seine en octobre 1944.

Il est ensuite élu, en avril 1945, conseiller municipal et conseiller général SFIO du IVe arrondissement et est désigné secrétaire du conseil municipal le 27 juin 1946, puis rapporteur du budget de la préfecture de police en 1947. Il conserve ces fonctions jusqu'aux municipales de 1959.

Bien qu'opposant résolu à la direction de la SFIO durant la guerre froide, Priou-Valjean adopte une attitude réservée, soutenant le combat du parti en faveur de la Troisième force. À l'Assemblée municipale, en 1949, il rend hommage à la mémoire du général tchèque Pika, condamné à mort et pendu à Prague par les Soviétiques. Le communiste Ouzoulias met alors en cause ses titres de Résistance et un jury d'honneur est constitué à sa demande. Réuni le 17 septembre 1949, il déclare que Priou-Valjean est "entré dans la Résistance active dès 1940, y a joué un rôle éminent au péril de sa vie durant toute la durée de l'Occupation de 1940 à 1944 et a mené dans les postes de commandement où il a été placé une lutte active qui lui a valu plusieurs distinctions et citations élogieuses, comportant notamment l'attribution de la croix de guerre, de la médaille de la Résistance avec rosette et de la croix de chevalier de la Légion d'honneur". Son contradicteur ne se fait pas fait représenter.

L'ancien résistant s'oppose en 1954 au projet de Communauté européenne de défense, soutenu par la majorité du parti socialiste. Lors de la guerre d'Algérie, hostile par principe à toute entreprise coloniale, il soutient en 1956, la minorité qui se forme autour de ses amis Daniel Mayer, Édouard Depreux et Robert Verdier. Avec eux, il est en septembre 1958, l'un des fondateurs du parti socialiste autonome et est élu à la commission administrative provisoire du parti. Deux ans plus tard, en avril 1960, il participe à la fondation du parti socialiste unifié, mais le quitte peu après, heurté par ses divisions internes. Il adhère au parti socialiste en 1972.
Ayant perdu ses fonctions municipales en 1959, Priou-Valjean reprend ses fonctions de directeur du service contentieux de la Caisse primaire de sécurité Sociale de la Région parisienne et milite à Force ouvrière. En 1960, il est nommé sous-directeur et termine sa carrière, en 1968, comme directeur général adjoint.

Priou-Valjean occupe depuis la fin de la guerre des responsabilités dans les mouvements de Résistance. Présidant de la première séance du congrès de Libération-Nord, le 7 avril 1945, il est désigné président du comité directeur régional du mouvement et membre du bureau directeur de Libération-Nord en juin 1945, puis vice-président national en 1947. Il s'occupe plus particulièrement des jeunesses : vice-président du conseil d'administration des Jeunesses de Libération en mai 1945, il est président-fondateur la Fédération française des clubs de jeunes (Union des jeunes coopérateurs) en mai 1947. Il refuse la présidence nationale après le décès de Christian Pineau en 1995.

Priou-Valjean décède à Paris, le 23 janvier 1999. Il reçoit un hommage solennel au funérarium du cimetière de Batignolles à Paris (XVIIe) puis sa dépouille est inhumée dans le caveau familial à Hendaye (Pyrénées-Atlantiques).

Il a reçu de nombreuses décorations : chevalier de la Légion d'honneur à titre militaire, médaille de la Résistance avec rosette et croix de guerre avec étoile de vermeil et palmes.



Gilles Morin, " Roger Riou " in DVD-Rom La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004.