Note de service au capitaine Paul Pons du 10 juillet 1944

Légende :

Les notes de ce type permettent d'aborder des sujets divers, rarement évoqués par ailleurs.

Genre : Image

Type : Note de service

Source : © Archives privées Albert Fié, fonds compagnie Pons Droits réservés

Détails techniques :

Document dactylographié sur une feuille de papier de format 13,5 x 21 cm.

Date document : Juillet 1944

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - Die

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Analyse média

Cette courte note du 4e bureau traite de l'armement et de l'équipement médical.

Le document est soigneusement dactylographié. On constate que son origine a été écrite sur une étiquette collée sous le sigle FFI (Forces françaises de l'intérieur). Par transparence, on discerne le titre imprimé : « Commandement des guérillas en Drôme Sud, le capitaine ».

Il est signé par le responsable du 4e bureau ; la signature est illisible.

Deux sujets sont abordés. Il est demandé à Paul Pons de préciser le type de munitions dont il a besoin afin que le lieutenant Viel André, chef de secteur et responsable de l'armement, puisse le satisfaire. La récupération d'élastiques de parachutes afin de pourvoir en garrots, le service médical est la deuxième requête.


Auteurs : Alain Coustaury

Contexte historique

Il y a plus d'un mois que le débarquement de Normandie a eu lieu. L'espoir d'une opération semblable sur les côtes provençales s'éloigne. La Résistance dans le sud de la France, en Drôme particulièrement, pressent une attaque allemande contre les maquis. Pour y faire face, elle réclame armes et matériel aux Alliés. Des parachutages sont effectués. Mais ils sont loin de satisfaire les besoins.

La surcharge de l'adresse de la note par une étiquette précisant "3e bataillon, 4e bureau armement" s'explique par une réorganisation de la Résistance en Drôme sud. Le titre initial "Commandement des guérillas en Drôme sud" était plus explicite quant à la forme de combat préconisé. 


Cette courte note permet d'appréhender deux problèmes majeurs de l'équipement de la Résistance. Le premier est celui de la quantité et de la qualité des armes parachutées. Les 30 fusils évoqués doivent provenir du grand parachutage du 24 juin 1944 sur le terrain William 16 de Brette. La répartition des armes avait créé quelques difficultés entre les unités. Elles sont aggravées par l'hétérogénéité des armes. Dans une situation de pénurie, les Alliés parachutaient des armes d'origine, de fabrication variées. À Brette, des fusils étatsuniens et britanniques composaient une partie du parachutage. Tous ne furent pas récupérés en bon état. Paul Pons dans un courrier à "Alain", son chef de bataillon, se plaint que sur 30 fusils, 8 étaient cassés. Un mauvais emballage, une ouverture trop tardive ou avortée du parachute expliquent que jusqu'à 30 % du matériel parachuté était endommagé ou irrécupérable. Les différents calibres de fusils nuisent à une utilisation rationnelle des armes individuelles. Par exemple, le calibre du fusil britannique Enfield est de 7,7 mm alors que celui du Springfield étatsunien est de 7,62 mm. Ces deux types de fusils furent parachutés à Brette. Comme ils étaient dans des emballages différents des munitions, comme les containers furent récupérés et cachés dans des lieux divers, que plusieurs unités en reçurent, on comprend le désordre qui en résulta. Les autres armes individuelles des résistants, souvent récupérées, avaient de multiples calibres : le Lebel français tirait une cartouche de 8 mm, le Mauser 98 allemand une cartouche de 7,92 mm. Quant à la mitraillette STEN, arme symbolique, largement parachutée, elle avait un calibre de 9 mm. Une telle hétérogénéité a beaucoup nui à la puissance des unités résistantes. Si on y ajoute un approvisionnement insuffisant en munitions, une absence d'artillerie même légère, on comprend les limites de l'engagement militaire de la Résistance.

Le deuxième sujet de la note évoque également une pénurie, celle du matériel médical. Les parachutes sont soigneusement récupérés et utilisés à des fins diverses. Les plus connues sont leur transformation en habits, particulièrement en corsages féminins. Les suspentes, cordes très solides permettent de réaliser attaches et courroies. La récupération des élastiques qui libèrent la voile des parachutes montre à quel point la pénurie est grande puisque ils doivent permettre de réaliser des garrots.

Le document révèle parfaitement les grandes difficultés de l'armement de la Résistance et la carence en matériel divers, notamment dans le domaine sanitaire. Ces insuffisances ne sont pas spécifiques à la Résistance drômoise. Elles caractérisent toute la Résistance française, voire européenne.


Auteurs : Alain Coustaury
Sources : Mémoire d\'un vieil homme, Albert Fié , archives Pons