Déclaration de la Délégation spéciale transmettant ses pouvoirs

Légende :

Déclaration de la Délégation spéciale transmettant ses pouvoirs au comité de Résistance de Saint-Uze en septembre 1944.

La Délégation spéciale, mise en place le 25 janvier 1940 à la place de la municipalité à majorité communiste de Saint-Uze, remet ses pouvoirs au comité de Résistance par un texte bref de 11 lignes.

Genre : Image

Type : Document officiel

Source : © Archives communales Saint-Uze Droits réservés

Détails techniques :

Registre de 39 x 25 cm.

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - Saint-Uze

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Analyse média

Cette déclaration est transcrite à la page 18 du Registre des délibérations municipales, où sont notées toutes les délibérations municipales à partir du 7 novembre 1943.

La municipalité de Saint-Uze, à majorité communiste, a été radiée par un arrêté du président de la IIIe République, le 25 janvier 1940. Le 5 septembre 1944, immédiatement après la Libération (1er septembre), la Délégation spéciale doit cesser ses fonctions :

« Transmission des pouvoirs
Ce jour 5 septembre 1944 à 11 h 30 en mairie de Saint-Uze la Délégation spéciale (composée de Mr Garde Fernand, Président. Mrs Baboin Marius, Sassoulas Séverin, Bonneton Élie, membres) sous réserve de la légalité, transmet le pouvoir (qui lui avait été conféré par le Président de la République Française Mr Albert Lebrun le 25 janvier 1940, pour la durée des hostilités) au comité de résistance de St-Uze composé de Mr Chabert Félicien, Président, Mrs Noir Émile, secrétaire, Bois-Soulier Gabriel, trésorier.
Signatures de Fernand Garde, Marius Baboin, Séverin Sassoulas. »

Paraphes dans la marge de « Félicien Chabert, Émile Noir, Gabriel Bois. »

À noter l’absence de signatures d’Élie Bonneton qui a d’ailleurs été absent de toutes les réunions de la Délégation spéciale pour la période dont on a pu consulter les délibérations. Élie Bonneton a d’ailleurs été maire de Saint-Uze, par la suite, sous l’étiquette « socialiste ».
Fernand Garde était artisan-mécanicien, Marius Baboin, petit industriel de la poterie, Séverin Sassoulas, agriculteur et président de la section locale de la Légion des combattants, Bonneton Élie, viticulteur.

Les nouveaux responsables sont Félicien Chabert, minotier (très apprécié pour l’aide qu’il a apportée à la population en distribuant de la farine sans ticket), Émile Noir, instituteur, Gabriel Bois-Soulier, agriculteur (catholique, tendance Jeune République).

Le Conseil municipal, composé des élus d’avant la guerre, se réunit le 22 octobre 1944, deux d’entre eux étant décédés. Francis Tarel est réinstallé, à l’unanimité dans ses fonctions de maire.



Contexte historique

De nombreuses municipalités ont été destituées par l’État français à partir de 1941. Mais pour Saint-Uze, cité ouvrière du nord de la Drôme, de 1 500 habitants environ (1 482 en 1936, 1 508 en 1946), s’était donné une municipalité à majorité communiste dont le maire était Francis Tarel, l’éviction de la municipalité date du 25 janvier 1940.

Après l’approbation majoritaire du Pacte germano-soviétique par le Parti communiste, le 20 janvier 1940, le Sénat et la Chambre des députés adoptent la loi de déchéance des députés communistes. Onze de ces députés seront emprisonnés à Valence. Ce ne sont pas seulement les députés qui sont déchus mais un grand nombre d’élus. Le 19 mars 1940, M. Sarraut, ministre de l’Intérieur, en fait le bilan général : 300 conseils municipaux, 2 778 élus communistes. Il y indique également la suppression de la presse communiste, les sanctions contre les fonctionnaires communistes, l’arrestation de 3 400 militants.

Cette répression se poursuivra dans les mois suivants, 28 Drômois dont des communistes, des syndicalistes, des anarchistes, sont arrêtés et internés au camp de Loriol, le 14 janvier 1941. Cette répression à l’égard des communistes a donc débuté sous la IIIe République finissante et l’État français a pris le relais en élargissant l’éviction des maires et des élus municipaux à tous ceux qui s’opposent au nouveau régime. Le gouvernement de Vichy, par le canal des préfets, met ainsi en place une administration municipale à sa solde pour pouvoir appliquer sa politique sans opposition.

Fin août ou début septembre 1944, les Comités locaux de Libération (nommés ici « Comités de Résistance ») reprennent possession des mairies, écartent les membres des délégations spéciales ou les maires, dans la ligne vichyste, mis en place par les préfets, et réorganisent l’administration municipale. Les situations ne sont pas identiques dans toutes les communes. En attente de l’organisation des premières élections municipales, certaines communes remettent en place le conseil municipal élu avant la guerre, d’autres confient l’administration au Comité local de Libération (CLL). À Romans, les instances de la Résistance avaient désigné Roger Raoux comme maire avant la Libération, le Comité local de Libération existe aussi et pendant un certain temps, le maire et le président du CLL doivent assumer cette dualité, le maire assurant surtout l’organisation administrative, le CLL veillant surtout à la remise en ordre de l’économie locale, la mise en place des structures chargées de la répression des collaborateurs, du ravitaillement, etc.


Auteurs : Jean Sauvageon
Sources : Archives communales Saint-Uze, de Romans-sur-Isère. Des indésirables.