Attentat du groupe de Maurice Korzec contre le Soldatenkino "Le Capitole" à Marseille, 5 juin 1943

Légende :

Rapport du 14 juin 1943 du commissaire de la police de sûreté de Marseille sur l'attentat commis contre des soldats allemands le 5 juin.

Type : Rapport officiel

Source : © Archives nationales 19880042-30-2 Droits réservés

Date document : 14 juin 1943

Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Bouches-du-Rhône - Marseille

Ajouter au bloc-notes

Analyse média

Le 5 juin 1943, le groupe de combat du détachement Marat, composé de Maurice Korzec, dit Marcellin, Albéric d'Alessandri et Marcel Bonein commet un attentat contre les troupes allemandes qui fréquentent Le Capitole, cinéma qui leur est réservé situé en haut de la Canebière. Vers 21 heures, alors que les spectateurs sortent, Maurice Korzec lance une grenade qui, outre quelques dégâts matériels à la façade du cinéma et au trottoir, blesse une douzaine de personnes, quatre militaires allemands, une Italienne, deux gardiens de la paix en service devant le cinéma et quatre civils français. 

Maurice Korzec, blessé, est immédiatement arrêté ainsi qu'Albéric d'Alessandri, en possession d'une deuxième grenade. Marcel Bonein arrive momentanément à s'enfuir. Le commissaire de la Sûreté rappelle les conditions particulières dans lesquelles il interroge les auteurs de l'attentat. La police et la justice françaises sont dessaisies du dossier puisque les autorités allemandes ont immédiatement arrêtées deux des trois résistants qui ont participé à l'attentat. Le commissaire qualifie de conversation l'entretien qu'il mène avec Maurice Korzec et Albéric D'Alessandri en présence de la police allemande. Le rapport est centré sur les déclarations de Maurice Korzec, alias Henri Marcellin, dont l'identité a été percée à jour et de son camarade Albéric d'Alessandri. Les deux jeunes gens ne cachent pas qu'ils sont communistes. En revanche, ils se présentent comme des résistants de fraîche date, recrutés depuis à peine un mois. Le commissaire Payan retient de sa conversation qu'il faut diriger les investigations vers Saint Rémy de Provence.

La conclusion du rapport montre comment les autorités françaises en essayant d'affirmer leur souveraineté se font les auxiliaires de la police allemande et contribuent activement à la répression de la Résistance : « L'enquête se poursuit dans le but d'identifier toutes les personnes mises en cause et procéder à leur arrestation. une information pourrait être utilement ouverte pour permettre de poursuivre les investigations. »


Auteur : Sylvie Orsoni

Sources et bibliographie :
David Diamant, Les Juifs dans la résistance française 1940-1944 (avec armes ou sans armes), Paris, Roger Maria Editeur, 1971.
Grégoire Georges-Picot, L'innocence et la ruse. Des étrangers dans la Résistance en Provence, Paris, éditions Tirésias, 2011.
Robert Mencherini, Résistance et Occupation (1940-1944). Midi Rouge, ombres et lumières, tome 3, Paris, Syllepse, 2011.
Jacques Ravine, La résistance organisée des juifs en France 1940-1944, Paris, Julliard, 1973.

Contexte historique

L'attentat contre le Soldatenkino "Le Capitole" est une des actions menées par le détachement Marat qui représente les FTP-MOI sur Marseille. Très actif depuis l'automne 1942, le détachement Marat réalise plus d'une trentaine d'opérations à Marseille et dans ses environs. Depuis 1942, Maurice Korzec milite avec sa sœur Rose dans la résistance juive communiste à Marseille. Lorsqu'il est arrêté, Maurice Korzec a participé, entre autres, le 8 mai à « la nuit des transformateurs » qui a permis la destruction de seize transformateurs d'usines travaillant pour les Allemands. Il a dirigé le groupe qui une semaine plus tard place une bombe dans l'école de filles de la rue de l'Eclipse qui abrite un cantonnement de soldats italiens. Malgré les tortures subies, il n'avoue que le dernier attentat. La police arrive cependant à remonter la filière qui les conduit à Saint Rémy de Provence qui était un centre d'organisation de FTP-MOI animé par Olivier Menicucci et Carlo Piacenza. Un avis de recherche est lancé contre Carlo Piacenza, Marcel Bonein, fils d'un agriculteur communiste, le troisième homme du groupe du Capitole. Le Frisé, Stefano Brau, un des diriegants des FTP-MOI sur Marseille n'est pas identifié. Carlo Picenza est condamné par défaut pour propagande communiste. Marcel Bonein, dit Vidal, est arrêté ultérieurement et condamné à mort comme ses deux camarades par le tribunal militaire allemand siégeant à Lyon. Maurice Korzec est fusillé le 13 septembre, il avait 19 ans. Albéric D'Alessandri et Marcel Bonein sont fusillés le 1er novembre 1943. Ils avaient 26 et 21 ans.


Auteur : Sylvie Orsoni

Sources et bibliographie :
Archives départementales des Bouches-du-Rhône, 8 W 64.
Archives nationales 19880042-30-2 (dossier de police sur l'attentat du Capitole)
Service historique de la Défense, Vincennes 16 P 322432 (dossier individuel Maurice Korzec)
Diamant David, Les Juifs dans la résistance française 1940-1944 (avec armes ou sans armes), Paris, Roger Maria Editeur, 1971.
Georges-Picot Grégoire, L'innocence et la ruse. Des étrangers dans la Résistance en Provence, Paris, éditions Tirésias, 2011.
Mencherini Robert, Résistance et Occupation (1940-1944). Midi Rouge, ombres et lumières, tome 3, Paris, Syllepse, 2011.
Ravine Jacques, La résistance organisée des juifs en France 1940-1944, Paris, Julliard, 1973.