Continuer le combat et inventer la Résistance

Deux formes de résistance, de nature différente au départ, se développent à partir de l’été et de l’automne 1940. Rejoindre Londres permet de continuer la lutte armée depuis l’extérieur aux côtés de la Grande-Bretagne. À l’intérieur du pays en revanche, pour ceux qui refusent la défaite et l’Occupation, la Résistance, qui n’a aucune structure et pas même de nom, est à inventer.

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Poursuivre la lutte aux côtés des Anglais haut ▲

Pour ceux qui veulent continuer le combat en 1940, la seule logique consiste à rejoindre la Grande-Bretagne. Parmi les premiers Français libres, certains se trouvent déjà en Angleterre en 1940, d’autres viennent d’unités qui se sont battues en Norvège. Surtout, dès la défaite, des filières assurent des liaisons entre la France et l’Angleterre. La plus risquée consiste à traverser la Manche en bateau depuis les ports bretons et normands malgré les interdictions de navigation imposées par les Allemands. Plus longue, la flière ibérique consiste à traverser l’Espagne et le Portugal pour se rendre à Gibraltar afn d’y être pris en charge par les Britanniques. Une fois en Angleterre, deux possibilités s’offrent aux combattants volontaires : s’engager dans les troupes britanniques ou rejoindre l’embryon qui se constitue autour du général de Gaulle.

Une armée et un Etat pour la France libre haut ▲

La situation de De Gaulle est fragile à Londres car le général ne dispose pas de la même légitimité que les gouvernements en exil (ceux de la Belgique, du Luxembourg et des Pays Bas) qui continuent de contrôler leur flotte et d’exercer leur autorité sur leurs possessions coloniales. Il lui faut donc s’afrmer comme l’incarnation d’une France qui continue le combat auprès des Britanniques et trouver des soutiens pour renforcer sa légitimité. Bien que peu nombreux au départ, les premiers ralliements n’en sont pas moins cruciaux pour permettre à la France libre de se développer, à la fois sur le plan militaire à travers les Forces françaises libres (FFL) mais aussi politique avec la mise en place d’une administration civile.

Les organisations pionnières en région parisienne haut ▲

Dès l'été 1940, des initiatives dispersées se manifestent un peu partout en zone occupée sous la forme d'inscriptions tracées à la hâte, d'affiches allemandes lacérées, de papillons et de tracts confectionnés, de sabotage de lignes téléphoniques. Très vite, les premiers noyaux d'opposants se forment. Ces cellules, qui prennent corps le plus souvent en s'appuyant sur des réseaux de sociabilité pré-existants, ne rassemblent au départ que quelques individus mais fleurissent tant à Paris qu'en province. Elles s'adonnent dès leur naissance à des activités variées qui vont de la collecte de petits renseignements militaires à l'évasion de prisonniers de guerre en passant par une propagande très rudimentaire, confectionnée avec des moyens dérisoires. Dès la fin 1940 déjà, des organisations pionnières portent des projets plus ambitieux. La principale organisation qui se développe en zone occupée à partir de l’automne 1940 est celle du Musée de l’Homme à Paris et ses ramifications tel que le groupe Vérité Française.

Dans la zone rattachée (Nord - Pas-de-Calais) haut ▲

Les premières formes de résistance divergent selon les territoires, tant le contexte local apparaît différent. Le nord de la France est un cas à part du fait de son histoire et du statut d’occupation particulier imposé par les Allemands. Les débuts de la Résistance y commencent avant la fn des combats en juin 1940. Spontanément, des hommes et des femmes, dont les motivations sont principalement patriotiques, hébergent des soldats britanniques ou français qui cherchent à échapper à la captivité. D’autres récupèrent des armes ou sabotent des câbles téléphoniques de l’armée allemande. Le nombre exceptionnellement élevé de ces actes s’explique par une série de facteurs spécifques au Nord–Pas-de-Calais. Cette première résistance se nourrit d’abord de l’expérience de 1914- 1918. Ses acteurs ont voulu suivre l’exemple de leurs aînés (créer des journaux clandestins, recueillir des renseignements sur l’ennemi, etc.). Parmi eux, nombreux sont les anciens combattants (Norbert Fillerin), les anciens travailleurs forcés (Joseph Dubar) ou des déportés (Jean-Baptiste Lebas) de la Grande Guerre. La région est le principal théâtre d’opérations de la campagne de l’ouest de mai-juin 1940 et reste un front essentiel jusqu’au début de l’année 1941 (opération Seelöwe, bataille d’Angleterre). Des unités allemandes continuent d’y stationner. Le statut d’occupation mis en place est enfn particulier avec le rattachement au commandement militaire de Bruxelles, une exploitation économique forte et certaines formes de germanisation notamment dans le domaine culturel. Les premiers groupes de résistants constitués dans une improvisation totale vont progressivement se structurer et s’intégrer aux réseaux belges et britanniques au début de l’année 1941.

En zone non occupée haut ▲

Dès le 17 juin 1940, le général d’aviation Gabriel Cochet avait exhorté ses troupes à refuser la défaite. Préconisant le camouflage du matériel pour préparer la revanche, il commença à diffuser en septembre 1940 des bulletins appelant les Français à faire face à l’occupation tout en approuvant la politique du maréchal Pétain et en s’opposant à l’action du général de Gaulle.

A Marseille, autour d'un jeune catholique, Jules-Xavier Perrin, aidé par un imprimeur, un groupe d'amis crée le mensuel Voix du Vatican. Reproduisant les émissions de Radio-Vatican, le journal dénonce la propagande de Vichy, le nazisme et les mesures antichrétiennes.

En 1940, un noyau de résistants se constitue à Toulouse autour du colonel d'artillerie en retraite Vincent Bonneau. Désireux de réagir, il prend contact avec quelques amis, tels que les professeurs Bugnard et Soula de la faculté de Médecine, le colonel d'aviation Cahuzac, ou encore André Raymondis, Maurice Viala, le vice-président de l'Union fédérale des anciens combattants. Ils forment un groupe informel et peu structuré d'une vingtaine de personnes qui prend le nom de Liberté-Egalité-Fraternité.

Toujours à Toulouse, au début de 1941, se forme un petit groupe d'étudiants antifascistes désireux de réagir à la situation de l'heure. Ils veulent dénoncer les mensonges et les orientations de la politique de Vichy. La plupart n'ont pas d'engagement politique marqué, et ils ne reçoivent pas de directive de l'extérieur. Leur initiative est spontanée. A partir de mars 1941, un petit journal, tapé à la machine, est tiré à plusieurs dizaines d'exemplaires. Il est distribué dans le milieu étudiant et intellectuel. Son titre est : Vive la liberté.

Le 25 novembre 1940 est diffusé en zone Sud le journal Liberté. Fondé par les professeurs de droit François de Menthon et Pierre-Henri Teitgen, imprimé à Marseille, il recrute ses militants dans les milieux démocrates-chrétiens. Autour de son journal, un mouvement s'étend sur la région de Lyon et dans le Sud-Ouest.

Dès l'automne 1940, Bertie Albrecht, une surintendante d'usine et le capitaine Henri Frenay, prisonnier évadé qui refuse les propositions de Vichy lancent un modeste Bulletin d'Information et de propagande très bien documenté.Ces deux personnes marquent sociologiquement l'organisation naissante qui, par sa fusion avec Liberté, donnera naissance au mouvement Combat.

En Alsace-Moselle annexée haut ▲

L’Alsace et la Moselle constituent un cas totalement à part, où le choix d’entrer en résistance se fait selon plusieurs spécifcités propres à ces deux territoires. Avec l’annexion de fait en juillet 1940, l’Alsace et la Moselle passent sous l’administration du IIIe Reich et sont germanisées. Les lois nazies s’appliquent. Résister signife donc, comme en Allemagne, affronter un système totalitaire aux méthodes policières rôdées depuis 1933. Tout signe de refus de la germanisation ou d’attachement à la France est interprété par les nazis comme une marque d’opposition. Des actes isolés (parler français, porter un béret) constituent des formes d’opposition inconnues en Allemagne nazie comme en France occupée. Dès le 2 août 1940, un camp de sûreté ouvre à Schirmeck pour « rééduquer » les Alsaciens et Mosellans récalcitrants. Dès lors, le curseur de la résistance n’est pas le même qu’en France occupée : en 1940, sur 60 Alsaciens et Mosellans envoyés à Schirmeck, 31 le sont pour francophilie ou hostilité à l’Allemagne. La plupart sont libérés ensuite, mais 5 sont déportés au camp de concentration de Dachau. Face à des services répressifs efcaces et très bien renseignés sur les opposants alsaciens et mosellans au nazisme (notamment les communistes), la résistance « consciente » et engagée reste marginale en 1940. Elle est à trouver du côté des plus expérimentés au combat – les militaires, avec la formation du groupe « Mission Lorraine » par le commandant Scharff à l’automne – ou des plus inconscients : les jeunes. Dès juillet 1940, des lycéens de Metz créent un groupe appelé L’Espoir français. En septembre, 21 adolescents fondent la Main noire à Strasbourg.

Désobéir au quotidien haut ▲

Différentes formes de désobéissance, qualifées parfois de « résistance civile » se développent au sein de la société dès l’été 1940, notamment en zone occupée, témoignant qu’une partie de la population ne s’accommode pas de la présence allemande.

La naissance des mouvements haut ▲

Les rares Français qui se sont engagés dans la Résistance dès 1940 l'ont fait à titre individuel ou au sein de petits groupes isolés, agissant de façon spontanée, sans mots d'ordre, sans liens entre eux. D'autres se sont mis au service des réseaux britanniques, notamment du Special Operations Executive (SOE) et des réseaux de la France libre, mis en place par le Bureau central de recherche et d'action (BCRA).
Ce n'est que progressivement que des liens se sont établis, que le recrutement s'est étoffé, que des mouvement structurés se sont constitués. En zone occupée, plusieurs mouvements voient le jour en 1940 et début 1941 ; parmi ceux-ci : Combat zone Nord, Libération-Nord, Organisation civile et militaire (OCM), l'Armée des volontaires ou encore les Bataillons de la Mort.