Serge Ravanel œuvre pour une action immédiate unifiée

En cette fin d’année 1943, le ralliement de la population à la Résistance est bien réel. Le développement de son organisation et de ses actions donnent confiance aux Français qui considèrent comme inéluctable la défaite des Allemands. Toutefois, « la partie est loin d’être gagnée ». Les résistants agissent dans un milieu de plus en plus hostile et dangereux. L’armée allemande comme la Gestapo et la milice, qui la soutiennent, se battent et persécutent sans relâche ces combattants de l’ombre quel que soit leur niveau d’implication (1). A partir du mois de novembre, la direction centrale des Groupes Francs (GF) est transférée à Paris ce qui lui donne une réelle identité nationale. Serge Ravanel et ses collaborateurs doivent poursuivre leur action et développer plusieurs équipes de GF. « Dans les derniers jours d’octobre, je partis donc à Paris » (2). « Nous avions comme préoccupation de toujours accroître l’intensité et l’unification de l’action de la Résistance, l’action militaire » (3).

Sources : (1) Copie d’une circulaire de Vichy datée du 22/11/1943. (2) Serge Ravanel, L’Esprit de Résistance, Editions du Seuil, 1995. (3) Serge Ravanel, interview d’Alain Vincent le 18/11/2003.

Auteur(s): Emmanuelle Benassi

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Bibliographie

Inégalité et discorde au sein de l’action immédiate haut ▲

Partout en France, les diverses formations militaires issues de la Résistance (AS, ORA, GF, FTP, Action ouvrière, le réseau Fer, les Espagnols de l’union nationale espagnole et les maquis…) s’engagent dans l’action immédiate. Mais celle-ci « n’est menée de façon efficace et régulière qu’au sein de services spécialisés tels que les GF, l’Action ouvrière et certains maquis. C’est la raison pour laquelle, sa mise en œuvre divise les Résistants en deux catégories : les partisans de l’action immédiate et ceux du Jour J. Pour Serge Ravanel, la seule préoccupation est « d’accroître constamment l’intensité de l’action militaire de la Résistance » ce qui suppose efficacité et unité. Avec ses camarades, il pense « qu’il est possible de créer un climat d’insécurité pour l’armée allemande en organisant chaque jour des centaines, voire des milliers, de petites actions-coups d’épingle ».

Parmi les différentes formations militaires engagées dans l’action immédiate il y a les maquis. Fantastique réservoir d’hommes mais dont l’efficacité de l’action militaire est inégale et, cela, pour des raisons multiples. Aux difficultés d’ordre logistique (camouflage, abri, nourriture, habillement, armement) s’ajoutent des difficultés d’ordre humain : d’un côté les maquisards dont le courage, le dévouement et la discipline (qualités indispensables pour la bonne conduite d’une opération militaire) font parfois défaut ou sont disparates, de l’autre, les chefs de maquis aux qualités et compétences très inégales et dont l’engagement ne s’inscrit pas toujours dans le sens de l’unification. Chef des corps francs, Ravanel est régulièrement en contact avec les responsables des différents maquis situés dans sa zone d’action. Leur « mise en place a mis des mois et des mois. Progressivement, Il a fallu apprendre, approfondir, faire des expériences et élaborer une doctrine » (1) qui consiste en la constitution de petits groupes très mobiles et dynamiques ayant pour « seule tactique d’attaquer et de foutre le camp sans jamais oublier de tourner le dos à l’adversaire ». Henri Romans-Petit, chef de maquis des MUR (Mouvements unis de Résistance) dans le département de l’Ain, est pour Ravanel « un homme remarquable » ; avec Tom Morel et Eugène Chavant, il est un de ces « chefs prestigieux » qui « assimilent avec un don extraordinaire la tactique de la guérilla ». Il organise des petits groupes disciplinés, mobiles et très entraînés. L’efficacité et l’envergure de leurs actions mettent la population en confiance, tandis que les Anglais n’hésitent pas à leur parachuter des armes. Tous les maquis ne connaissent pas le même succès. Beaucoup se heurtent à un manque de tactique et ne sont, parfois, pas convenablement encadrés.

Sources : Serge Ravanel, interview d’Alain Vincent, 18 novembre 2003.

Auteur(s) : Emmanuelle Benassi

Ravanel, témoin de la complexité organisationnelle des maquis haut ▲

Parmi les différentes formations militaires engagées dans l’action immédiate il y a les maquis. Fantastique réservoir d’hommes mais dont l’efficacité de l’action militaire est inégale et, cela, pour des raisons multiples. Aux difficultés d’ordre logistique (camouflage, abri, nourriture, habillement, armement) s’ajoutent des difficultés d’ordre humain : d’un côté les maquisards dont le courage, le dévouement et la discipline (qualités indispensables pour la bonne conduite d’une opération militaire) font parfois défaut ou sont disparates, de l’autre, les chefs de maquis aux qualités et compétences très inégales et dont l’engagement ne s’inscrit pas toujours dans le sens de l’unification. Chef des corps francs, Ravanel est régulièrement en contact avec les responsables des différents maquis situés dans sa zone d’action. Leur « mise en place a mis des mois et des mois. Progressivement, Il a fallu apprendre, approfondir, faire des expériences et élaborer une doctrine » (1) qui consiste en la constitution de petits groupes très mobiles et dynamiques ayant pour « seule tactique d’attaquer et de foutre le camp sans jamais oublier de tourner le dos à l’adversaire ». Henri Roman Petit, chef de maquis des MUR (Mouvements unis de Résistance) dans le département de l’Ain, est pour Ravanel « un homme remarquable » ; avec Tom Morel et Eugène Chavant, il est un de ces « chefs prestigieux » qui « assimilent avec un don extraordinaire la tactique de la guérilla ». Il organise des petits groupes disciplinés, mobiles et très entraînés. L’efficacité et l’envergure de leurs actions mettent la population en confiance, tandis que les Anglais n’hésitent pas à leur parachuter des armes. Tous les maquis ne connaissent pas le même succès. Beaucoup se heurtent à un manque de tactique et ne sont, parfois, pas convenablement encadrés.

Sources : (1) Serge Ravanel, interview d’Alain Vincent, le 18 novembre 2003.

Auteur(s) : Emmanuelle Benassi

Préparation d'une tentative d’évasion à la centrale d’Eysses haut ▲

A la fin du mois de décembre 1943, Serge Ravanel est chargé d’une nouvelle mission par le CNR : « j’ai été saisi d’une demande concernant la mise sur pied, en relation avec les prisonniers d’Eysses, d’une opération d’évasion » (1) de plusieurs détenus parmi lesquels Raymond Hego, compagnon de cellule de Ravanel de mars à mai 1943.
Le 2 janvier 1944, Ravanel se rend à un rendez-vous à Villeneuve-sur-Lot, avec un dénommé Fénoglio, alias Kléber, ancien détenu d’Eysses, avec l’aide duquel il élabore un plan opérationnel. « L’opération devait se faire par une action simultanée des prisonniers, fortement organisés et soutenus par la complicité de gardiens, et de Groupes Francs entraînés » (2).
Serge Ravanel le met en relation avec ses deux adjoints : Joly-Joyeux, responsable régional auprès duquel il doit récupérer des armes destinées aux prisonniers et Deleule, responsable des Groupes Francs (GF) pour le Sud-est, chargé de constituer, à partir des groupes lyonnais et marseillais, une équipe d’une douzaine d’hommes bien entraînés et d’assurer la liaison entre Paris et Toulouse. « Des systèmes de messages avaient été prévus afin de donner à nos camardes de Lyon et de Marseille le top de départ le moment venu » (3). Au terme de plusieurs réunions, l’organisation logistique de l’opération est bien engagée. Serein, Ravanel regagne Paris jusqu’à ce que soit donné le feu vert.
Le 10 janvier, afin de finaliser les derniers préparatifs de l’opération, il envoie Deleule à Toulouse. Ce dernier retrouve sur place Joly qui reconnaît avoir refusé de « remettre les armes à Kléber prétendant que Eysses était entre les mains de communistes. Il décide de ne pas participer à l’opération » (4). Très contrarié, Ravanel repart pour Toulouse et tente de rétablir, en vain, le contact avec Fénoglio.
L’échec de cette opération, pourtant minutieusement préparée témoigne de la regrettable méfiance de certains Résistants manifestée à l’égard des opinions politiques de leurs frères d’armes. Alors que l’urgence du combat unifié s’impose, des hommes, bien que sincèrement engagés dans une même lutte, ne parviennent pas à faire preuve de discrétion sur leurs origines ou leurs convictions et, ainsi, desservent leur engagement patriotique. Serge Ravanel déplore « ces méfiances qui freinent le processus d’unification » (5).

Sources : (1) Serge Ravanel, note concernant Eysses (1965). (2) Op cit. (3) Op cit. (4) Op cit. (5) Serge Ravanel, L’Esprit de Résistance, Editions du Seuil, 1995.

Auteur(s) : Emmanuelle Benassi

La Résistance : un souffle unitaire qui brassait les opinions haut ▲



« J’avais tellement pris l’habitude d’apprécier les hommes à leur action résistante que je n’attachais qu’une importance secondaire à leurs opinions politiques
[…]. Nous aspirions tous au rétablissement de la République et de la démocratie » (1).

Face au contexte bien spécifique de la guerre et à la clandestinité, un constat s’impose aux résistants les plus marqués politiquement avant la guerre : le succès de leur combat n’est possible que grâce à la sincérité, au désintérêt, au dévouement et au courage de leur engagement. Le développement et la construction de la Résistance a été envisageable grâce à des hommes et des femmes qui se sont montrés capables de comprendre et de respecter les opinions de chacun. Hélas, certains ne sont pas parvenus, malgré l’enjeu de l’intérêt général, à mettre de côté ou à atténuer leur propre militantisme politique. Serge Ravanel l’a compris dès le début. Animé bien plus par son sens de « l’humain, qui génère l’attachement, la solidarité et la fraternité » (2), que par des convictions politiques, Serge Ravanel s’est nourri tout au long de ces quatre années de guerre de la richesse de chacun des hommes qui ont croisé son chemin et qui, comme lui, se sont dévoués corps et âmes pour leur Patrie et ont œuvré avec courage et sincérité pour le rétablissement de la liberté de leur pays. « J’ai vu dans la guerre des gens de tous les horizons, des gens que je ne connaissais pas se comporter magnifiquement bien... J’ai vu des dévouements fantastiques » (3).

Sources : (1) Serge Ravanel, L’Esprit de Résistance, Editions du Seuil, 1995. (2) Discours de Raymond Aubrac, Hôtel national des Invalides, 5 mai 2009. (3) Interview de Yves Blondeau, le 9 juin 2006.



               The Resistance: A Uniting Force

«I always admired men in the Resistance for what they did that I never thought of their political opinions...We all wanted to reinstate the Republic and democracy» (1).

Faced with war and the underground Resistance, movement, it was imperative that members of all political backgrounds had to forget them in order to band together. Without heart, devotion, and courage, they would never be successful in their efforts. The Resistance was only possible thanks to men and women who were able to form a movement while respecting every individual's opinion and beliefs. But there were some who were not willing to put aside their politics for the greater good. Ravanel had always understood the importance of tolerance. Driven by his belief that «humans are destined to create relationships, solidarity, and fraternity» (2), and not by his own politics, Serge Ravanel met several others along the way who shared his patriotism and conviction. He would cherish these friendships throughout the entire war. «During the war, I met great men from all sorts of backgrounds...I witnessed incredible devotion to our country » (3).


Traduction : Catherine Lazernitz

Auteur(s) : Emmanuelle Benassi

Création des Corps francs de la libération (fin mars 1944-début avril 1944) haut ▲



Fin mars-début avril 1944, alors que le débarquement est imminent, les chefs des divers organismes du MLN (Mouvement de Libération nationale) se réunissent rue des Beaux-Arts à Paris, afin de regrouper dans une même structure leurs différentes formations militaires et répondre ainsi au besoin d’immédiateté et d’efficacité des combats. « Il est certain que l’organisation actuelle des groupes d’action ne peut nous satisfaire. La multiplicité des services parallèles nuit à notre efficacité. Les moyens utilisés en hommes et en matériels ne sont pas utilisés à plein. De là, la nécessité de réaliser le commandement unique. La création des CFL (Corps francs de la Libération) vise à atteindre ce but. Il ne s’agit pas d’un nouvel organisme venant se superposer à ceux existants. Il s’agit simplement de grouper dans le terme CFL et sous un commandement unique tous les éléments actifs de la Résistance pris dans les mouvements ayant adhérés au MLN. En fait, les grands services nationaux : Groupes Francs (GF), AO (Action ouvrière), AS (Armée secrète), maquis, Fer, disparaissent en tant qu’organisme de commandement vertical » (1). Les Espagnols de l’Union nationale espagnole rejoignent également cette structure. Le MLN souhaite, par cette initiative, « gagner en combativité et en efficacité » (2).
Marcel Degliame est nommé chef et Alfred Malleret Joinville, chef d’état-major. Quant à Ravanel, il devient « conjointement avec Robert Ducasse, responsable du bureau Action de l’état-major ». Les GF, qui ont prouvé à de nombreuses reprises, leur efficacité, sont chargés de l’instruction et de l’animation des CFL.
Par ailleurs, la création de ces CFL est l’occasion de « renforcer le contrôle des Groupes Francs » et des maquis qui, parfois, « agissent avec une trop grande autonomie » ce qui peut être à l’origine de certains abus.
Les GF de l’Île-de-France, que commande Charles Gonard, conservent leur structure et sont mis à la disposition du CNR (Conseil national de la Résistance).
Les premières missions pour l’état-major consistent à envoyer certains de ses membres dans les régions afin d’y mettre en place la nouvelle organisation. C’est ainsi que Ravanel est envoyé à Toulouse afin de solutionner le problème de la nomination du chef régional du CFL.

Sources  (1) Rapport du CD du MLN daté 5 avril 1944 communiquant la charte d’organisation des CFL. (2) Op cit.



                       The Creation of the Corps Francs of the Liberation (End of March 1944-beginning of April 1944)

Between the end of March and the start of April 1944, with D-Day fast approaching, the heads of the MLN (Movement for National Liberation) met on the rue des Beaux Arts in Paris to reorganize in order to be prepared for combat as soon as possible. «It was clear that our military groups would not be enough. We had to reorganize all of the groups and supplies under one command. The creation of the CFL (Corps Francs of the Liberation) was the solution. It was not another organization that would lead the others that existed. It was simply a way to gather everyone under the same name and same leadership as the MLN. Essentially it was the Groupes Francs, the Action ouvrière (“Labour action”), the Armée secrète, the maquis, and Fer all reorganized into a vertical command »(1). The Spanish in the National Spanish Union would also join later on. The MLN, by doing this, wanted to be able to «fight as efficiently as possible» (2).
Marcel Degliame was named its head, with Alfred Malleret Joinville as the Chief of Staff. Ravanel became «with Robert Ducasse the Secretaries of Defense for Joinville. » The GF, who had proven time and again their expertise and strength, were put in charge of training and organization of the CFL. The CFL also acted as way to «keep the GF in check» as well as the maquis who always «acted independently», an autonomy that they had abused. The GF of the L'Île-de-France, headed by Charles Gonard, remained the same and was at the disposal of the CNR (National Counsel of the Resistance).

The Chief of Staff's first missions, in light of the new organization, was to place lead members in each region. Ravanel was sent to Toulouse as the new regional leader for the CFL.


Traduction : Catherine Lazernitz

Auteur(s) : Emmanuelle Benassi
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