Maquis et lutte armée

Dans l'attente d'un débarquement espéré dès l'automne 1943, les maquisards sont entraînés quotidiennement à la lutte armée et mènent avant le 6 juin 1944 des actions de guérilla. Considérés comme des francs-tireurs, ils subissent une répression féroce qui ne fera que s'accentuer.

A l'été 1944, on assiste à une montée massive aux maquis et parfois même à des libérations éphémères de zones dans lesquelles la République est proclamée. Les missions des maquisards varient selon les zones géographiques et l'avancée des troupes alliées: leu rôle est souvent secondaire mais ils profitent de la retraite allemande pour libérer des villes voire des départements entiers en zone sud avant l'arrivée des Alliés (notamment dans les départements savoyards et dans le Massif central).

Préparation militaire et attente du Débarquement haut ▲

Au sein des maquis, l'entraînement militaire quotidien permet notamment d'initier les jeunes recrues n'ayant pas effectué leur service militaire. La journée commence invariablement par des exercices physiques, suivie par une cérémonie de lever des couleurs. Les recrues apprennent le maniement des armes, le camouflage et les techniques de guérillas. Des exercices de nuit sont exécutés afin de préparer les maquisards à la nécessité d'une évacuation rapide du camp. Des cours théoriques sont également dispensés et à l'approche de la libération, les maquisards apprennent à marcher au pas cadencé dans l'optique d'un futur défilé. La discipline est stricte et des sanctions de nature très variées punissent tout manquement: corvées supplémentaires, privation d'une ration de tabac. Les sanctions sont parfois très lourdes vis à vis de ceux qui se sont adonnés au pillage qui risque jusqu'à la peine capitale.

Les parachutages sont très inégalement répartis selon les maquis, même au niveau départemental. Leur contenu révèle une grande variété: matériel médical, billets de banque, essence, explosifs, armes (au total 196 000 stens répartis sur l'ensemble des maquis).Après le Débarquement, l'intensification des parachutages mobilise des moyens considérables pour récupérer les containers disséminés en pleine nature: ainsi, dans la nuit du 17 au 18 juin 1944, le maquis de St Marcel en reçoit 640. Les maquisards doivent parfois solliciter l'aide d'agriculteurs de plusieurs villages environnants, qui leur apportent les charrettes et autres attelages susceptibles de transporter des charges très lourdes ( un container de type « C » rempli pèse 250kg et nécessite 4 porteurs). En effet, la pénurie d'essence et le faible nombre de véhicules motorisés en état de fonctionnement, expliquent le recours à des moyens archaïques (mulets, boeufs) pour récupérer le matériel ou évacuer les blessés.

Source(s) :

D'après Jacques Canaud, Le temps des maquis, Editions De Borée, 2011. 

Le rôle des maquisards dans la libération du territoire haut ▲

Dans les jours qui suivent le Débarquement, on assiste à une montée massive aux maquis et à la libération de petites zones dans la moitié sud de la France où la République est parfois réinstaurée: comme dans les maquis du Vercors, du Mont-Mouchet, Nantua (Ain), Annonay (Ardèche) dans les villes du Tulle et de Guéret (Corrèze) et dans certains bourgs provençaux. Ces expériences sont très éphémères et toutes les zones susceptibles de gêner les communications, sont reprises par les Allemands dans les semaines suivantes. Les maquisards, progressivement intégrés à l'armée française, en application de l'ordonnance prise par le GPRF en juin 1944, se regroupent alors et reçoivent l'aide d'unités alliées, notamment en Bretagne avec le parachutage d'équipes Jedburghs ou SAS. Alors que les troupes alliées sont bloquées fin juillet dans le Cotentin, elles reçoivent l'aide des FFI qui les renseignent, les guident et aident à cacher les aviateurs abattus.

En août, après la percée d'Avranches et le débarquement en Provence, en un peu plus d'un mois, la majorité des départements sont libérés car les Allemands battent en retraite et rétablissent un front devant les Vosges à la mi-septembre. Dans la plupart des cas, les maquisards n'ont joué qu'un rôle secondaire et les libérations s'effectuent au rythme plus ou moins rapide de l'avancée alliée. Toutefois, dans les zones que les Allemands ont évacué (Ardèche, Haute-Savoie, Ain, Jura), la libération du territoire est effective avant leur arrivée.Il faut toutefois éviter des libérations trop hâtives qui peuvent engendrer une reprise de villes par les Allemands et de féroces représailles à l'encontre des populations civiles. Dans les villes libérées par les seuls maquisards, notamment dans les départements savoyards et dans le centre de la France, même si les rivalités entre chefs se font jour, on assiste à des défilés et des rassemblements joyeux. Les maquisards sont alors honorés et on commémore le sacrifice des jeunes morts aux maquis. Après ces libérations, d'anciens maquisards poursuivent leur engagement, notamment au sein de la 2e DB ou de la 1ère armée. Au total, 137 000 combattants volontaires sont incorporés au sein des forces régulières.

La répression à l'encontre des maquisards haut ▲

En application de la convention d'armistice du 22 juin 1940, les Allemands assimilent les maquisards à des francs-tireurs et sont impitoyables avec ceux qu'ils considèrent comme des criminels à punir de manière exemplaire. Les maquisards et les FFI qui ne sont pas considérés comme des soldats réguliers ne sont donc pas protégés par les conventions internationales (La Haye en 1907 et Genève en 1929). Perçus comme des "terroristes" ou des "bandits", ils doivent donc être exécutés, même s'ils sont faits prisonniers. Il s'agit pour l'Occupant de "nettoyer" le terrain de bandes, perçues comme lâches et révolutionnaires. 

Au début de l'année 1944, des compagnies de la Wehrmacht se spécialisent dans la lutte contre les maquis dans les régions les plus exposées à leurs actions de guérilla. Ils coopèrent avec la Milice française, notamment contre le maquis des Glières et s'acharnent contre certains villages. Les attaques surprises, le blocage des sources d'approvisionnement du maquis, les représailles contre les civils sont des moyens de semer la terreur et d'isoler le maquis. Ainsi, en Haute Savoie, des fermes sont incendiées et des villageois arrêtés ou exécutés.

Après le débarquement en Normandie, la répression à l'égard des maquis et des villageois s'intensifie. Des troupes auxiliaires, formées de supplétifs regroupant plus d'une dizaine de nationalités sont chargées de la traque des maquisard. Indisciplinées, brutales, elles commettent de nombreuses exactions  l'égard des populations civiles. Engagées notamment en Savoie, dans le Vercors, en Bretagne et en Bourgogne, elles se livrent au pillage systématique des villages. A partir de l'été 1944, certains soldats désertent, encouragés en cela par les maquisards: les maquis se renforcent grâce à l'intégration de certains déserteurs chargés initialement de les combattre. La division d'élite "Das Reich" est chargée dès le printemps 1944 d'anéantir les maquis du Limousin et du Périgord. Elle sillonne la région de Tulle à Oradour-sur-Glane employant une barbarie inouïe sous l'Occupation face aux populations civiles locales.La tragédie du Vercors en juillet 1944 montre bien que l'anéantissement des maquis devient prioritaire lorsque ceux-ci entravent les communications des troupes allemandes.

Après le débarquement en Provence, les Allemands qui battent en retraite abandonnent des zones entières aux maquis car ils n'ont plus les moyens ni le temps de les anéantir. A partir de l'automne 1944, la retraite des troupes allemandes s'effectue dans la peur des représailles du côté de la population civile et dans la crainte des "terroristes" exécutant les prisonniers allemands au sein de l'armée allemande.

On estime entre 12 et 15 000 le nombre de morts liés aux combats et à la répression à l'égard des maquis.