La reconstruction matérielle et économique

Après la Libération, dans toute la région, il est nécessaire de remettre en état de nombreuses infrastructures routières et ferroviaires affectées par les bombardements, sabotages ou destructions effectuées par l’armée allemande. La reprise des activités industrielles nécessite, en préalable, de réparer de nombreuses installations très endommagées et de pallier la pénurie toujours très importante de matières premières et d’énergie. La situation de l’agriculture régionale est également très préoccupante : déjà déficitaire avant-guerre, elle pâtit fortement du manque de semences, de bétail et de matériel.

La reconstruction, dans tous ces secteurs, s’effectue progressivement et avec difficultés. Plusieurs années sont nécessaires pour que les infrastructures soient, de nouveau, en état de fonctionner et que les circuits commerciaux, dont certains ont été profondément modifiés par la rupture des années de guerre, soient rétablis.

Auteur(s): Robert Mencherini

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Le redémarrage du trafic maritime et des transports haut ▲

Après les destructions effectuées, en août 1944, par l’armée allemande, le port de Marseille est d’abord aménagé, de manière très sommaire, pour les besoins militaires, par les autorités américaines. Puis, progressivement, en 1945-1946, les équipements portuaires sont remis en état, les épaves renflouées et les quais et bassins de radoub sont réparés. Le trafic civil, indispensable pour l’alimentation de la population et les activités industrielles, reprend dès le début de l’année 1945 et augmente rapidement. Il retrouve, en 1948, son niveau d’avant-guerre, aussi bien pour les marchandises que pour les voyageurs.

Au début de l’année 1945, les moyens de transport routiers et ferroviaires sont dans un piètre état. Des réparations d’urgence sont effectuées sur les routes et ponts détruits ou endommagés par les Allemands, les sabotages, les bombardements, les combats, et la circulation des engins militaires. Mais de longs mois seront nécessaires pour la remise en état du réseau routier. Et les pénuries en pièces mécaniques, pneumatiques et carburant rendent difficiles pendant longtemps les transports à longue distance.

Le réseau ferroviaire, très endommagé, est l’objet d’une nouvelle « Bataille du Rail » qui mobilise les cheminots et les personnels des ateliers SNCF ou privés (comme ceux des Aciéries du Nord à Marseille). Le Rail bénéficie aussi d’apports américains en wagons et locomotives débarquées au port de Marseille. Le trafic ferroviaire augmente rapidement, principalement pour les voyageurs, surtout après le mois de mai 1945, avec le rapatriement des prisonniers et déportés et le retour des troupes. Le trafic des marchandises, essentiellement militaire jusqu’à cette date, devient ensuite civil.

Auteur(s) : Robert Mencherini

Industrie et agriculture haut ▲

Après la Libération, les pénuries et destructions qui ont affecté la région depuis 1940 pèsent toujours sur les activités industrielles et agricoles. Elles pâtissent fortement, en règle générale, des carences en énergie et matériaux divers. Mais les conséquences ne sont pas uniformes dans tous les secteurs.

Il existe une grande hétérogénéité entre les branches et les productions industrielles. Certaines, et non des moindres, sont très dépendantes du trafic portuaire. C’est évidemment le cas de la construction et de la réparation navales. L’évolution des transports maritimes a également des effets décisifs sur des industries qualifiées généralement de « traditionnelles » comme les industries chimiques ou alimentaires, dont les matières premières proviennent d’Outre-Mer.

Mais d’autres branches, moins dépendantes des importations, sont moins éprouvées. L’activité de certaines d’entre elles est très liée à des décisions des autorités. C’est le cas des entreprises de Marseille réquisitionnées par le commissaire de la République. Et parmi elles, des établissements des Aciéries du Nord (ADN) qui réparent les locomotives pour le compte de la SNCF.

Les productions agricoles subissent aussi de manière différenciée les effets des pénuries. Si, dans l’ensemble, elles sont pénalisées, certaines d’entre elles font exception. C’est le cas de la riziculture qui prend alors son essor en Camargue, alors que la production globale de céréales demeure stagnante.

Sauf exception, l’industrie et l’agriculture ne retrouvent un niveau satisfaisant qu’au terme de plusieurs années de reconstruction. Il faut noter que la Seconde Guerre mondiale accélère le déclin de branches très liées au trafic portuaire, comme les industries des corps gras ou du sucre.

Ravitaillement haut ▲

Les pénuries évoquées par ailleurs ont, après la Libération, des conséquences sur la vie quotidienne des Provençaux, en particulier pour leur ravitaillement. Le rationnement, maintenu par l’ordonnance du 9 août 1944 et qui concerne tous les produits de première nécessité, perdure jusqu’en 1950. Plusieurs tentatives pour essayer d’en assouplir les contraintes se heurtent à la réalité des pénuries, comme pour le pain, à la fin de l’année 1945, ou la viande en 1946. Les rations alimentaires légales sont loin d’être suffisantes. Il est donc nécessaire, pour pourvoir aux besoins vitaux, de recourir au marché noir. Les familles qui ne peuvent le faire, en particulier pour des raisons financières, subissent les effets de la dénutrition et de la malnutrition. La consommation alimentaire et ses effets ont été étudiés par l’Institut national d’hygiène (INH, futur INSERM). On constate alors que les conséquences sanitaires sont catastrophiques, en particulier dans les grandes villes du Midi, pour les enfants et les femmes enceintes, et que la mortalité est beaucoup plus forte sur le littoral méditerranéen que dans l’ensemble de la France.
Les nouvelles autorités, le commissariat régional de la République et les comités départementaux de Libération, sont conscients de la gravité de la situation. Mais la prolongation des pénuries et du marché noir entraîne une forte irritation de la population dont témoignent les articles de presse, les interceptions de correspondance et les rapports des renseignements généraux. Les services du Ravitaillement sont mis en cause, et même, comme pendant l’Occupation, les étals vides suscitent des manifestations de « ménagères ». Ces difficultés réactivent parfois des sentiments antisémites et xénophobes. Le mécontentement ne s’apaise vraiment qu’à la fin des années 1940 avec une réelle amélioration des conditions alimentaires.

Auteur(s) : Robert Mencherini