Répression avant le 6 juin 1944



Les défaites nazies à Stalingrad et El-Alamein, le renforcement de la Résistance qui s’attire, sinon l’aide active, du moins la sympathie d’une population neutralisée par la peur du régime policier, l’inquiétude grandissante des forces occupantes ont pour conséquence un durcissement de la répression, aussi bien à l’égard des Juifs, qu’il importe d’exterminer au plus vite, que des résistants de plus en plus redoutés, et de la population, facilement considérée comme adversaire du régime pétainiste ou de l’Allemagne ou utilisée sans scrupule comme otage. L’État français légifère, organise ses forces, tolère les méthodes les plus indignes pour interner, déporter ou massacrer ses opposants.




                    Repression before June 6th, 1944


The Nazi defeat in Stalingrad and El Alamein, the Resistance's reinforcement, which attracts—if not active aid—at least, the sympathy of a population offset by the fear of a police regime, and the growing anxiety of occupying forces result in a hardening of repression, especially against Jews. Extermination becomes more urgent, far faster than the Resistants had feared. The French people, seen as opponents to the Petainist regime, or Germany, are easily used as hostages. The French state makes legislations, organizes its forces, and tolerates the most outrageous methods to detain, deport or kill its opponents.


Traduction : Meghan Briggs

Auteur(s): Robert Serre
Source(s):

Dvd-rom La Résistance dans la Drôme-Vercors, éditions AERI-AERD, février 2007.

Plan de l'expo

Crédits

Partenaires

Bibliographie

Cartographie

Chronologie

Pédagogie

Vichy met en place son système répressif haut ▲



Pour les gouvernants de Vichy, l’ennemi, ce sont les forces de l’anti-France, Juifs, communistes, francs-maçons, étrangers, résistants, … C’est donc sur eux que s’exerce la répression qui commence avec les mesures frappant les communistes, les révocations de la Fonction publique et qui ne cessera de se durcir avec la création de Cours spéciales, la multiplication des camps d’internement, la mise en place de polices parallèles et de services nouveaux, comme les GMR (Groupes mobiles de réserve), puis la Milice, véritable auxiliaire des forces allemandes, qui devient toute puissante avec l’arrivée de son chef Darnand au secrétariat au Maintien de l’ordre.

Les gendarmes, formés au respect de la discipline, soutiennent d’abord le régime et participent à cette répression, notamment à l’égard des Juifs. Peu à peu, ils s’interrogent, s’inquiètent, puis, en grand nombre, se font des soutiens discrets de la Résistance.



                          Vichy puts its repressive system in place

For the Vichy regime, the enemy were Anti-France forces, Jews, Communists, Freemasons, foreigners, Resistants...thus, it was upon those people that the repression was focused. The system begins with measures against Communists, the revocation of public services and will continue to harden with the creation of special courts, the multiplication of internment camps, the establishment of parallel police and new services, such as GMR (paramilitary groups) as well as the militia, auxiliary German forces, which is omnipotent with the arrival of its head of Police Secretariat, Darnand.

The French police force, trained in enforcing discipline, at first support the regime and participate in the repression, particularly against Jews. Gradually, they wonder, they worry, and in large numbers, finally become secret supporters of the Resistance.



Traduction : Meghan Briggs

Auteur(s) : Robert Serre
Source(s) :

Dictionnaire historique de la Résistance, (sous la direction de François Marcot), éditions Robert Laffont, 2006.

Internement : les prisons haut ▲

Nous distinguerons les prisons de transit, en attendant le départ vers la déportation, les prisons pénitentiaires, dans lesquelles un individu faiblement condamné est libéré quand sa peine est achevée, tandis que d’autres y croupissent longuement ou sont transférés dans un établissement similaire, avant d’être exécutés.

Dans les premières années de guerre, des « politiques » de la Drôme ont été incarcérés à la centrale d’Eysses ou dans diverses autres prisons, comme celles de Sisteron dans les Basses-Alpes, de Saint-Paul-d’Eyjeaux en Haute-Vienne ou à la prison Saint-Paul à Lyon.

Les gens arrêtés ou raflés par la suite sont d’abord conduits dans les prisons les plus proches, Valence, Montélimar, etc., puis transférés dans des prisons centrales. La plupart des non-Juifs sont emmenés à Lyon, à la prison Montluc de sinistre mémoire (sauf quelques-uns à la prison Saint-Paul). Les seules exceptions à ce passage à Montluc sont les gens du sud de la Drôme qui transitent par Avignon ou Marseille et quelques autres, dont les sept infirmières de la grotte de la Luire, dans le Vercors, d’abord envoyées à Grenoble.

Ensuite, ces hommes et femmes sont rassemblés, en attente du départ, dans des camps de regroupement en vue de leur déportation : Drancy pour les Juifs, le fort de Romainville pour quelques femmes, Royallieu à Compiègne pour les plus nombreux, Résistants ou otages. Exceptionnellement, des départs vers la déportation se font depuis d’autres lieux, avec un transbordement direct dans une gare, en particulier à Paris ou à Lyon-Perrache.

En 1944, l’évacuation de nombreux détenus du nord de la France, la destruction de prisons par les bombardements et les combats provoquent un engorgement qui entraîne des transferts, la réouverture d’anciennes prisons, l’entassement, la dégradation des conditions de détention, d’où la multiplication des évasions et des mutineries.



                     Internment and Prisons

We distinguish transit prisons, where inmates awaited departure to exile, penitentiaries, in which a condemned individual is freed when his sentence is up, from others, where prisoners languish at length, or are transferred to a similar prison before being executed.

In the early years of the war, the "political prisoners" of Drôme were incarcerated at the Central Eysses or various other prisons, such as Sisteron in the Basses-Alpes, Saint-Paul-d'Eyjeaux in Haute-Vienne, or Saint-Paul in Lyon.

People who were arrested or round up thereafter are first taken to the closest prisons, Valence, Montelimar, etc., then transferred to central prisons. Most non-Jews were taken to Lyon, to Montluc prison (with the exception of some being sent to Saint-Paul). The only exceptions to this passage to Montluc are those from Southern Drôme who pass through Avignon or Marseilles and a few others, including seven nurses from Grotte de la Luire in Vercors, and then sent to Grenoble.

Then, these men and women are gathered, awaiting departure, in resettlement camps for deportation: Jews to Drancy, Fort de Romainville for some women, Royallieu Compiegne for the most numerous, either Resistants or prisoners of war. Remarkably, departures for deportation will be from other places, with a direct transfer to a station, especially for Paris or Lyon Perrache.

In 1944, the evacuation of many prisoners in the North, the destruction of prisons from bombing and fighting causes flooding, resulting in transfers, the reopening of old prisons, overcrowding, deteriorating conditions, and hence, the profileration of escapes and riots.


Traduction : Meghan Briggs

Auteur(s) : Robert Serre
Source(s) :

AD Rhône, 3808 W 33, déposition d’André Saviard. AD Rhône, 3808 W 325, déposition de Roger Giganti. AD Drôme 1920 W. Archives PCF Drôme, tract hommage 16/10/1991. Thèse A. Chaffel, page 26. SHGN

Massacres haut ▲



Si en France, occupée ou non, une certaine légalité dans la répression existe durant les premières années d’occupation, en 1944, surtout après le débarquement, les « lois de la guerre » font place à des mesures bestiales : les résistants sont des francs-tireurs, des terroristes, pas des combattants, ils doivent donc être fusillés immédiatement, les sanctions sont collectives et, comme on ne peut guère distinguer un résistant d’un civil, toute une population pourra être exterminée et les biens détruits, les troupes allemandes ne seront jamais punies pour leurs abus. La « dureté impitoyable » est sensée décourager les engagements ou l’aide à la Résistance.

Les « opérations de nettoyage » se traduisent par des incendies, des destructions, des tortures, des pillages et par des centaines de personnes massacrées atrocement, femmes, enfants, vieillards compris. Le Vercors est au sommet de l’horreur, mais de multiples lieux drômois ont été le théâtre de semblables cruautés.


 

                                    Massacres

If in France, occupied or not, a certain legality existed within the repression during the first few years of the occupation, in 1944, above all, after landing, the "war policies" give way to brutish measures: Resistants are mavericks and terrorists, not fighters, and thus they must be shot immediately. Sanctions are collective and, as one can hardly distinguish a resistant from a civilian, a whole population could be wiped out, and property destroyed. The German troops will never be punished for their abuses. The "ruthless severity" is meant to discourage commitments or aid to the Resistance.

"Cleansings" result in fires, destruction, torture, looting, and the massacre of hundreds of people—women, children, and the elderly included. Vercors is at the height of the horror, but many places in Drôme have witnessed similar atrocities.


Traduction : Meghan Briggs

Auteur(s) : Robert Serre
Source(s) :

Dvd-rom La Résistance dans la Drôme-Vercors, éditions AERI-AERD, février 2007.

Déportation et répression haut ▲



Les déportés sont les gens arrêtés par les autorités allemandes, italiennes ou de l’État français et transportés dans les prisons ou camps des régions ennemies ou administrées par l’ennemi, prisons ou camps recensés par le Service de recherche de la Croix-Rouge.
À la différence des déportés raciaux, qu’on frappe pour ce qu’ils sont, les « politiques » sont, en principe, déportés pour ce qu’ils ont fait. Il faut cependant nuancer cette distinction. On trouve en effet de nombreux exemples de personnes appartenant aux deux catégories, Juifs résistants par exemple. En principe, leur transport en Allemagne devait suivre deux itinéraires différents, menant à l’extermination immédiate pour les Juifs, à l’extermination après exploitation de leur travail pour les politiques. En réalité, les cheminements seront plus diversifiés et on verra par exemple des Juifs échapper à la mort et des non juifs internés à Auschwitz.
Les « politiques » sont les gens déportés par mesure de répression, pour avoir lutté – ou être suspectés d’avoir lutté – contre l’occupant, qu’ils soient éditeurs et diffuseurs de tracts ou de journaux clandestins, colleurs d’affiches, fabricants de faux papiers, transmetteurs de renseignements, ou saboteurs, etc. Ils forment deux grands courants : les communistes et sympathisants, les autres qu’on coiffait de l’appellation de « gaullistes ». S’y ajoutaient les membres de réseaux, les victimes de rafles, résistantes ou pas, les parents de résistants pris en otage, les personnes arrêtées lors d’un franchissement de la ligne de démarcation ou d’une frontière, les auditeurs de la radio anglaise, les gens trouvés en possession d’armes, même de chasse…
Les otages entrent aussi dans cette catégorie. Pour prévenir les attentats et les sabotages, les autorités occupantes veulent intimider la population et la dissuader de commettre ou de soutenir ces actes. Pour les Allemands de plus en plus harcelés, toute personne arrêtée devient un otage.
Les assujettis au STO (Service du travail obligatoire) ou requis civils (volontaires ou contraints) ne sont pas classés parmi les déportés, mais ceux qui ont été sanctionnés pour leur opposition au régime nazi – pour propagande anti-allemande, refus de travail, évasion ou aide à l’évasion, sabotage – et envoyés dans les lieux concentrationnaires, figurent dans les listes de déportés comme arrêtés sur le territoire du Reich. C’est le cas de Marcel Astic, René Audra, Francis Casanova, Maurice Dupuis, Victor Figuet, Charles-José Fourel, Jean Perriolat ou l’abbé Pel. On inscrit aussi parmi les déportés les personnalités otages, pour la Drôme le préfet Robert Cousin, Maxime Germain, et l’aristocrate Paul Vaquier de la Baume, capturés comme monnaie d’échange et relativement privilégiés de façon à être conservés.

 


                       Deportation and Repression

Deportees are people arrested by the German and Italian authorities, or the French state and transported to prisons or camps in enemy regions, or administrated by the enemy, prisons or camps identified by the Research Sector of the Red Cross.

Unlike racial deportees, who are arrested for what they are, "political prisoners" are, in principal, deported for what they did. One must detail this distinction. There are indeed many examples of people belonging to both categories, for example, Jewish Resistants. In principle, their transport to Germany would follow two different routes, leading to immediate extermination of the Jews, and extermination after work exploitation for political prisoners. In reality, the pathways will be more diversified and we will see examples of Jews who escaped, and non-Jews interned at Auschwitz. Politicals are deported in order to be repressed, having fought—or being suspected of having fought—against the occupier, whether they be editors and publishers of leaflets or newspapers, bill posters, manufacturers of false papers, transmitters of information, or saboteurs, etc. They form to main currents: the Communists and sympathizers, others called "Gaullists". In addition, there were members of networks, victims of raids, resistants and non-resistants, the parents of those taken hostage, people arrested during a border-crossing, listeners of English radio, people found in possession of weapons, even hunters. Hostages also fall into this category. To prevent attacks and sabotage, occupying authorities want to intimidate and deter people from committing or supporting such acts. For the increasingly pestered Germans, anyone arrested becomes a hostage.

Those subject to STO or civil duties (both voluntary and forced) are not classified as prisoners, but those who were punished for their opposition to the Nazi regime—for anti-German propaganda, work refusal, avoidance or evasion aid, sabotage—and sent to concentration camps, appear on the lists of deportees as arrested on the territory of Reich. This is the case of Marcel Astic, René Audra, Francis Casanova, Maurice Dupuis, Victor Figuet, Charles-José Fourel, Jean Perriolat or abbot Pel. It also included, amongst the deportees, hostages from Drôme, the prefect Robert Cousin, Maxime Germain, and the aristocrat Paul Vaquier de la Baume, captured as currency exchanged and relatively privileged in order to be retained.


Traduction : Meghan Briggs

Auteur(s) : Robert Serre
Source(s) :

Robert Serre, De la Drôme aux camps de la mort, les déportés politiques, résistants, otages, nés, résidant ou arrêtés dans la Drôme, éd. Peuple Libre / Notre Temps, avril 2006.