"Intensification de l’action avant le jour J (mai 1944)"



« Nous voulons faire des CFL l’élite de la lutte armée pour la libération de la France… Il faut donc agir et attaquer partout les troupes ennemies. Désorganiser leurs transports en frappant leurs moyens de communication, chemins de fer, canaux en attaquant leurs convois sur route. Saboter l’industrie au service de la machine de guerre allemande. Attaquer les lignes de transports d’énergie électrique »
(1).
Afin de s’assurer de l’application et du suivi de ces directives, Serge Ravanel et ses adjoints se rendent, au moins trois fois par semaine, comme le précise une directive de l’état-major, dans ses départements (2) afin de contrôler, conseiller et coordonner l’action des différents groupes militaires. À chacun de ses déplacements, Ravanel se heurte à un manque d’armes considérable, rendant la situation particulièrement critique, en dépit de demandes régulières adressées au DMR pour « intensifier les parachutages d’armement, fusils mitrailleurs, grenades, mousquetons, mitraillettes » et assurer un « plus grand appui financier et matériel » (3). Le maquis que dirige Jacques d’Andurain dans la Montagne noire, près de la petite ville de Revel, ne dispose que de « trois pistolets pour une vingtaine d’hommes » (4). « L’armement était nul, c’était dérisoire … D’après ses calculs, 90% du total des parachutages effectués en France avec des armes a été fait le 1er janvier 1944. Sur ces 90 %, les deux tiers ont été faits après le 6 juin 44… La question qui se pose alors est de savoir s’il faut agir avant ou après avoir reçu les armes » (5).
En réponse à cette question centrale, Serge Ravanel, en concertation avec les membres de son état-major, conseille à ses responsables le développement « d’actions qui ne demandent guère d’armes tels que les sabotages qui, en outre, constituent un excellent entraînement pour les hommes… et créent un climat d’insécurité pour les Allemands » (6).
De « gros efforts de sabotages » sont ainsi réalisés par les différentes formations. Citons à titre d’exemple le travail des équipes de Jean-Pierre Vernant :
- mise hors d’état d’une dizaine de locomotives dans le dépôt de la gare de Matabiau ;
- coupures constantes des lignes téléphoniques avec Bordeaux et Marseille ;
- actions multiples dans les usines d’armement visant à retarder la production (fausses manœuvres, mauvais réglages, pertes d’outillages…).
« Dans la nuit du 16 au 17 avril, un sabotage à l’explosif a détruit une presse de 1850 tonnes à l’usine de Saint-Eloi de la SNCASE » (7). Par ailleurs, « un train est déraillé en Haute-Garonne dans la nuit du 23 au 24 mai » (8).
Quelle que soit l’importance des moyens qu’ils engagent, l’intensification de ces sabotages a pour résultat de freiner l’ennemi et de ralentir leur production. Après un mois d’effort ininterrompu, Serge Ravanel adresse, les 22 et 24 mai 1944 deux télégrammes dressant un bref bilan sur la mise en place des CFL : il informe ses supérieurs que la période de mise sur pied des CFL est terminée. Ils sont « éclatés » sur cinq zones. Une impulsion nouvelle a été donnée à l’organisation militaire, ce qui a pour résultat un accroissement des actions.
L’organisation et la préparation des CFL poursuivent ainsi leur progression malgré des difficultés de liaison et des représailles des occupants.

Sources : (1) Note datée du 9 mai 1944 destinée à tous les départements présentant la doctrine relative à la création des CFL et établie le 5 avril 44. (2) Extrait d’une « décision » de TA à tous les départements, datée du 10 mai 1944. (3) Télégramme de Ravanel daté du 22 mai 1944 adressé au délégué militaire régional de la région de Toulouse (R4). (4) Télégramme de Ravanel adressé au DMR le 22 mai 1944. (5) Émission Les chemins de la liberté, « L’engagement 1942/1943 ». (6) Serge Ravanel, L’Esprit de Résistance, Editions du Seuil, 1995. (7) Op cit. (8) Télégramme de Ravanel daté du 24 mai 1944.



                              Preparing the Troops for D-Day (May 1944)

«We wanted the CFL to be the elite division of the France's Liberation Army...we needed to be able to launch a total attack against the enemy troops: sabotaging transports by attacking communication lines; destroying transportation by attacking railroads and enemy convoys; finding ways to hurt and weaken Germany's war industry, and cutting power lines.» (1).

In order to organize and launch such initiatives, Serge Ravanel and his deputies met with their departments no less than three times a week to discuss plans (2). Becoming a seamless counsel for the CFL's Chief of Staff, Ravanel and his men organized, counseled, and coordinated missions for all of the Resistance's military groups. But, at every turn, Ravanel faced a significant lack of supplies, namely weapons. This shortage was made worse by the DMR's regular demands to «intensify the paratrooper's armament. They needed more machine guns, grenades, carbins, and submachine guns» and a «larger budget for arms and equipment» (3). On the other hand, Jacques d'Andurain's maquis in the Montagne Noire, close to Revel, needed no more than «three pistols for twenty men» (4). «Arming our troops was useless, pathetic...According to our calculations, 90% of the paratroopers hadn't been armed until January 1st, 1944. Of those 90%; two-thirds hadn't been armed until after June 6th, 1944...The question was whether to launch attacks before or after a group had been armed» (5).

Serge Ravanel, with his fellow members of the Joinville's staff, decided to issue an order to develop «attacks that did not require arms rather than those that required both weapons and additional training...all with the goal of sabotaging the Germans» (6).

Such «missions » were carried out by all of the different groups. For example, Jean-Pierre Vernant's team enacted the following: -tampered with a dozen locomotives in the train station at Matabiau -continually severed the telephone lines in Bordeaux and Marseille -launched several acts of sabotage to delay production at weapon factories «On the night of April 16th, a massive explosion destroyed a 1850 ton press at the SNCASE's factory in Saint-Eloi» (7).
Another attack «at night on May 23rd derailed a train in Haute-Garonne» (8).

No matter how important the individual attack was, the growing number of sabotage missions against the enemy helped to slow their production and transport. After a month of non-stop missions, Serge Ravanel sent two telegrams on March 22nd and 24th to give the CFL an update: establishing organized men on the ground for the CFL was complete, and men were «active and mobilized» in the five zones.
New life had been breathed into the Resistance's military thanks to the CFL. And the CFL would continue to grow and mobilize in spite of a lack of cooperation with those who continued to resist.


Traduction : Catherine Lazernitz

Auteur(s) : Emmanuelle Benassi

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